jeudi 5 mars 2015

Contes cruels (1883)

Après Barbey d'Aurevilly, nouveau retour en arrière avec Villiers de l'Isle-Adam, un auteur lu au lycée et jamais relu depuis.

Avec du recul, je me demande si ma prof de français de l'époque, un personnage un peu schizophrène, n'était pas une réelle spécialiste des écrivains français marginaux relativement oubliés par la postérité.


Contes cruels est un recueil de nouvelles réunissant théoriquement un thème commun, la cruauté. Je n'y pas vu grand-chose de cruel en réalité, mais admettons. Comme beaucoup de recueils, il m'a semblé inégal: en plus d'un choc culturel et temporel qui m'a fait passer à côté de pas mal de sous-entendus, j'ai trouvé Villiers tour à tour très bon et absolument passable dans son style d'écriture. Les thèmes abordés, en revanche, ont éveillé mon intérêt et restent d'actualité.

À retenir:

Véra (1874)
Une des deux nouvelles pour lesquelles la prof en question avait cité cet auteur alors qu'on parlait de l'amour et de la mort. Ce texte est vraiment très élégant et j'adhère totalement (à tel point qu'il y a trois ans j'avais cité les protagonistes dans un Top Ten Tuesday). On y aborde un sujet qui m'a semblé récurrent dans le recueil, une sorte d'influence de la volonté sur la réalité ("Et comme il ne manquait plus que Véra elle-même, [...] il fallut bien qu'elle s'y trouvât").

Vox populi (1880)
Une courte nouvelle très réussie sur le contraste entre les cris de la foule et ceux d'un mendiant aveugle, année après année, qui fait réfléchir sur la volubilité des masses. Parfaitement d'actualité.

Deux augures (1883)
Un texte beaucoup plus redondant, presque ennuyeux à lire, représentant bien ce que je n'ai pas aimé dans ce recueil. J'en parle néanmoins parce qu'il est très drôle: un éditeur de journal explique à un aspirant écrivain qu'il ne peut absolument pas le publier parce que son texte n'est pas assez mauvais. De quoi relativiser mon opinion de plus en plus basse des journalistes actuels.

L'Affichage céleste (1875)
Autre texte redondant et démodé, mais tout à fait précurseur dans sa vision de la publicité.

Le Convive des dernières fêtes (1874)
Un texte prévisible mais un peu glaçant. J'ai bien aimé qu'on se penche sur ce personnage un peu psychopathe qui doit quitter les fêtes nocturnes auxquelles il participe car il a un rendez-vous qu'il ne peut vraiment pas manquer à l'aube.

Impatience de la foule (1876)
Un texte un peu cruel qui rejoint Vox populi en pointant du doigt la foule et ses réactions imbéciles. Facile à retenir car il se passe dans la Grèce antique.

Fleur de ténèbres (1880)
L'autre texte cité par ma prof de l'époque. À peine une page recto-verso. Je n'ai pas apprécié le style, mais le contenu me plaît. Il y a vraiment des fleurs et on peut vraiment les qualifier "de ténèbres", ça flatte mon côté gothique refoulé.

Les Brigands (1882)
Autre texte sur l'imbécilité de la foule et une attaque contre la bourgeoisie. Amusant et, avouons-le, cruel! Un peu glaçant, en revanche, car très plausible...

L'Inconnue (1876)
La meilleure nouvelle du recueil avec Véra. Ce texte aborde une figure rarement traitée, celle du sourd. Villiers m'a vraiment touchée, je l'ai trouvé très humain et... pas cruel pour un sou. Je ne suis pas prête d'oublier cette inconnue...

Le tri a été difficile; même si j'ai traîné ce recueil un bon moment, je me suis rendu compte au moment du bilan que presque toutes les nouvelles abordaient des sujets intéressants. Il est un peu décourageant de voir que les choses évoluent si peu, d'ailleurs...

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