lundi 30 août 2021

Michel Strogoff (1876)

Chronique express!

Comme toujours, c’est un immense plaisir de lire Jules Verne, qui mélange à merveille aventure, humour et informations scientifiques. Dans Michel Strogoff, ce dernier élément s’exprime essentiellement par des données géographiques. En effet, Michel Strogoff, courrier du tsar, est chargé de transporter une précieuse missive depuis Moscou jusqu’à Irkoutsk, ville de Sibérie orientale, afin de prévenir le frère du tsar des manigances d’un traître, un Russe qui soutient l’invasion tartare menaçant l’empire. Bien entendu, le chemin de Michel Strogoff, déjà pénible en temps normal, sera semé d’embûches à cause de ladite invasion et des hordes tartares qui rôdent dans la campagne. Mais Michel Strogoff est un homme de fer, déterminé à arriver coûte que coûte, et il rencontrera en route plusieurs personnages qui sauront l’aider: Nadia, qui cherche elle aussi à gagner Irkoutsk, et Alcide Jolivet et Harry Blunt, journalistes respectivement français et anglais. Deux personnages hauts en couleur qui apportent une touche d’humour très sympathique.

Des aventures à fond de train à travers la Russie: évidemment, j’ai adoré, et je recommande. Lisez Verne, c’est vraiment génial!

mercredi 25 août 2021

D'un cheval l'autre (2020)

Chronique express!

Bartabas, fondateur de la troupe de théâtre équestre Zingaro, propose dans Un cheval l’autre une sorte d’autobiographie, cheval après cheval. Chaque chapitre est consacré à un épisode dans la vie d’un de ses chevaux, que ce soit la rencontre, un instant partagé, une maladie ou une séparation. Mis bout à bout, tous ces moments permettent de suivre ses débuts à cheval et sa carrière.

Bien entendu, il est impossible de ne pas rêver à ses descriptions de dressage et de spectacles; n’importe quel cavalier bave devant ses chevaux. Et je me suis retrouvée, de manière plus personnelle, dans une sorte d’aisance et de plénitude ressentie en présence des chevaux plus que des humains, comme si ces animaux donnaient du sens à la vie. J’ai aussi été émue par un chapitre très douloureux sur la fin de Zingaro, le célèbre étalon frison qui a fait la renommée de la troupe. Par contre – et cela, je pense, n’étonnera pas les gens qui ont déjà vu le personnage en interview... – Bartabas a un égo GIGANTESQUE, un truc juste hallucinant, et s’exprime avec une certaine pomposité qui m’a profondément déplu. En plus, je l’ai souvent trouvé anthropomorphique dans son propos, ce que je trouve fort surprenant chez un professionnel du cheval. En bref: je dirais que c’est un livre à lire pour les chevaux, pas pour l’homme… 😅

vendredi 20 août 2021

La Langue de Trump (2019)

Chronique express!

En 2016, Bérengère Viennot, journaliste et traductrice, a été confrontée de près à une sacrée difficulté: traduire Donald Trump, nouvellement élu à la présidence des États-Unis. Après un rappel fort concis et clair sur ce qu’est une traduction – nous restituons un message, pas des mots –, elle explique dans ce court essai comment elle a dû faire évoluer sa pratique dans le cas de Trump.

En général, en effet, le traducteur est censé "réparer" le discours du locuteur d’origine si celui-ci commet des erreurs. Par exemple, si vous traduisez un roman dans lequel un personnage habillé en vert est soudain en bleu, vous rétablissez la couleur verte de sa tenue (à moins que ce changement de couleur ne soit délibéré, bien sûr). Autre exemple: si vous traduisez quelqu’un qui n’a pas beaucoup de vocabulaire, vous trouvez des synonymes pour éviter les répétitions.

Or, chez Trump… Eh bien, sa manière de s’exprimer fait partie intégrante du personnage et de son message, donc, vous devez vous exprimer comme lui. À partir de là, Bérengère Viennot aborde plusieurs points caractéristiques de la communication de Trump: les phrases sans queue ni tête, la déformation de la réalité, l’usage massif de Twitter, l’égo, la haine des journaux… C’est passionnant et ça se lit tout seul, c’est vraiment à mettre entre toutes les mains – même si, bon, quand elle cite Trump pendant plus de quatre lignes, ça donne un peu mal à la tête d’essayer de comprendre ce qu’il raconte. Ça manque un peu de complotisme, mais l’essai est paru en janvier 2019, donc bien avant le délire de Trump sur la prétendue fraude électorale qui lui aurait coûté sa réélection.

Bref: un document d’actualité à lire sans hésiter, et en serrant les doigts pour que le délire ne recommence pas en 2024. 🙃🙃

dimanche 15 août 2021

L'Argent (1890)

Dix-huitième tome des Rougon-Macquart: après les locomotives de la Bête humaine, place à la finance et à la Bourse de l’Argent!


L’intrigue
Saccard, le spéculateur qui faisait fortune dans la Curée en achetant des immeubles parisiens durant les grands travaux haussmanniens, rôde à la Bourse de Paris. Il est au plus bas et ne rencontre guère d’aide parmi les joueurs et spéculateurs, mais est toujours aussi déterminé à brasser les millions. Avec l’ingénieur Hamelin et sa sœur Caroline, naît alors un projet d’ampleur: fédérer les paquebots de Méditerranée et exploiter des mines en Orient sous le chapeau d’une banque, l’Universelle. Hamelin pourra travailler sur le terrain, tandis que Saccard se chargera de la création de la banque et de son entrée en bourse.

Le monde de la finance
Le roman commence à deux pas de la Bourse de Paris, institution qui y jouera un rôle essentiel. Zola nous plonge dans les arcanes de la création d’entreprise et de la capitalisation boursière. L’Universelle est constituée avec un capital de vingt-cinq millions de francs, à raison de cinquante mille actions valant cinq cents francs chacune. Bien sûr, l’objectif est ensuite de faire monter la cote de ces actions à la Bourse. Dès le début, l’affaire est louche: le comité d’administration est créé en faisant circuler un mensonge sur l’éventuel soutien d’Eugène Rougon, ministre de l’Empereur et frère de Saccard, les actions ne sont pas créées/achetées de manière bien légale (elles ne sont pas "souscrites", mais je ne sais plus ce que ça veut dire… 😅) et Saccard se jette dans le combat à la hausse par tous les moyens, essentiellement en achetant des actions lui-même, sous des prête-noms, ce qui est évidemment illégal. Les concepts financiers ne sont pas des plus clairs et le lexique présent dans cette édition du Livre de poche est très utile, même si, parfois, je ne l’ai pas compris non plus. 😅 En tout cas, Zola s’est bien documenté, comme toujours, et c’est assez prenant de plonger dans la Bourse du temps du papier.

Le prix de l’argent
Bien sûr, toutes ces magouilles ont un coût, et ce ne sont pas ceux qui prennent les risques qui vont le payer. Saccard obtient la confiance de nombreux petits investisseurs, d’une part parce qu’il fait beaucoup de publicité, d’autre part parce qu’il rachète des journaux et leur fait publier, évidemment, des articles élogieux (l’indépendance de la presse, ce thème toujours d’actualité…) et enfin parce qu’il fait courir des rumeurs discrètes sur le véritable but de l’Universelle, une banque proche des milieux catholiques qui aurait vocation à soutenir le Pape grâce aux investissements des catholiques du monde entier. Parmi ces investisseurs, je me souvenais des Beauvilliers, une comtesse âgée et sa fille, qui maintiennent un luxe de façade en se privant du moindre confort: pourvu de recevoir avec classe deux fois par mois, elles mangent des pommes de terre le reste du temps. Leur ruine sera totale et RIEN ne leur sera épargné. Elles sont peut-être parmi les personnages les plus poignants de Zola…

Un antisémite de base
L’épopée de cette banque catholique se fait en opposition à la finance juive, incarnée par Gundermann, le roi de la Bourse de Paris. Saccard est un antisémite de base, convaincu que les Juifs sont retors, qu’ils contrôlent tout et que ce sont des voleurs, et il prononce plusieurs tirades contre eux. Ce n’est pas le plus marquant dans ce roman, mais c’est intéressant de le citer car cela fait écho à l’engagement futur de Zola en faveur de Dreyfus; on comprend très bien que Zola ne partage pas l’avis de Saccard et que celui-ci est en pleine théorie du complot. (Ah, si Zola avait connu le début des années 2020, quel roman n’aurait-il pas écrit sur le complotisme… 😅)

Mme Caroline, un personnage lumineux
Face aux magouilles de Saccard et à la fin catastrophique que l’on voit arriver, le lecteur peut trouver un peu de réconfort auprès de Mme Caroline, la sœur de l’ingénieur Hamelin, et, dans une moindre mesure, auprès de celui-ci. Elle est un beau personnage droit dans ses bottes, plein de compassion pour autrui et de bon sens, et l’on s’attache beaucoup à elle malgré ses choix malheureux. Son frère est très positif aussi, mais on le voit beaucoup moins, vu qu’il part en Orient. Caroline, présente à Paris tout au long de l’intrigue, a un rôle plus important et c’est son point de vue qui nous guide dans certains chapitres. La sœur et le frère sont très différents, mais ils font preuve d’une belle entente qui fait chaud au cœur. L’idée me vient soudain qu’on pourrait les rapprocher de Hubert et Hubertine dans le Rêve, un couple très soudé.

Pour finir : Zola ne serait pas Zola sans appétits sexuels…
Bien sûr, l’Argent parle essentiellement de soif d’argent (ah, ah!), mais il contient la dose réglementaire de sexe avec une scène INCROYABLE impliquant la baronne Sandorf et Saccard, surpris en petite tenue par l’amant attitré de Madame, et les suites d’un viol issu d’un lointain passé et en entraînant un autre, triste à mourir. Comme toujours, Zola osait tout dire, c’est épatant dans un roman d’un siècle très puritain!

Allez donc voir ailleurs si cet argent y est!
L'avis de Baroona
L'avis de Tigger Lilly

mardi 10 août 2021

The Sundial (1958)

Après We Have Always Lived in the Castle, j'avais très envie de poursuivre ma découverte de Shirley Jackson. C'est chose faite avec The Sundial, le Cadran solaire, un roman très étrange...


La splendide maison Halloran abrite une famille très aisée et très particulière. La maîtresse des lieux est Mrs Halloran. Elle règne sur les finances et les habitants. Son mari, Richard Halloran, est en fauteuil roulant et semble avoir perdu l'esprit. Il y a ensuite la tante Fanny, la sœur de Richard, veille fille aigrie contre sa belle-sœur. Il y a aussi la jeune Mrs Halloran, Maryjane, qui a épousé feu Lionel, le fils de Mrs Halloran et de Richard, et qui accuse la mère de celui-ci de l'avoir poussé dans les escaliers. Citons enfin Fancy, la fille de la jeune Mrs Halloran, et Miss Ogilvie et Essex, deux domestiques au statut plutôt élevé.

Tout ce petit monde se déteste et s'envoie des piques avec le plus grand flegme, jusqu'au jour où la tante Fanny se perd dans le jardin et aperçoit, dans un brouillard qu'elle est la seule à voir, le fantôme de son père, décédé depuis des lustres. Celui-ci lui annonce la fin du monde, mais lui garantit qu'il protègera tous ceux qui se trouvent dans la maison Halloran et qu'ils hériteront du monde d'après...

Il est difficile de décrire ce roman. En deux mots, c'est Downton Abbey à la sauce complotiste. Quand la tante Fanny décrit l'apparition et la mise en garde de son père, tout le monde la croit (avec plus ou moins de conviction, tout de même), y compris des personnages qui arrivent là après les faits. Commencent alors des préparations pour affronter la fin du monde et survivre au lendemain de sa destruction: la tante Fanny commande toutes sortes de provisions et d'équipements, Mrs Halloran met en place des règles à respecter. C'est très bizarre. En revanche, c'est toujours très drôle; la manière dont les personnages enchaînent les monologues croisés, sans jamais prêter attention à ce que disent les autres, le ton poliment cassant de Mrs Halloran, les inquiétudes très comme il faut de Mrs. Ogilvie... C'est un vrai régal, et Shirley Jackson était une excellente dialoguiste! Les deux ou trois passages étranges, essentiellement les apparitions de feu Mr Halloran, sont également très réussis.

Malgré le plaisir de la lecture, je tire toutefois une certaine perplexité de ce roman, d'autant plus que la fin, relativement ouverte, ne répond pas à la question principale: elle est vraie, cette prophétie, ou pas? Le monde va-t-il oui ou non prendre fin par une nuit d'apocalypse? Nos riches bourgeois attendent...

jeudi 5 août 2021

La gamelle de juillet 2021

Comme tous les mois, retour sur les activités culturelles du mois précédent!

Sur petit écran

Pas de film.

Sur grand écran

Black Widow de Cate Shortland (2019)

Enfin, le retour des films à grand spectacle sur grand écran! Dommage que celui-ci manque d'envergure et ait du mal à trouver son ton: entre le comique lourd du père et les émotions que je n'ai pas pu partager par manque d'attachement à une famille à peine rencontrée, je n'ai pas été très convaincue. Et puis il y a beaucoup d'explosions, mais bon, tout le monde n'est pas Michael Bay. Reste une Scarlett Johansshon très convaincante, elle, comme toujours, et la satisfaction de voir une deuxième super-héroïne Marvel avoir droit à son film.

Cruella de Craig Gillespie (2021)

Un divertissement sympathique, plus prenant que le début, qui laisse présager d'un film très familial, ne le laisse craindre. Emma Stone (actrice que je n'aime pas du tout, pourtant) incarne très bien le personnage et Emma Thomson est formidable. Pour les amateurs de mode, il y a aussi de très belles tenues. Précisons toutefois qu le meilleur personnage du film est... un chihuaha. 😅

Du côté des séries

Loki – saison 2 (2021)

J'aurai donc détesté jusqu'au bout cette série que j'attendais avec tout l'amour du monde. Je suis désespérée. Entre l'élément temporel, le Loki-bouffon, un Tom Hiddleston qui n'est pas exploité ne serait-ce qu'à 30 % de ses capacités, l'histoire d'amour d'une mièvrerie extraordinaire en soi et parfaitement navrante pour ce personnage-là et l'antagoniste de fin que j'ai juste eu envie d'étrangler, je n'ai jamais autant exprimé mon mécontentement devant un produit Marvel. 😅 Et je ne pouvais même pas me consoler en reluquant Loki parce que 1/ ils lui ont collé des cheveux encore plus huileux qu'avant, ce qui ne lui va pas, et 2/ parce qu'il était toujours habillé en humain alors que je le trouve sexy en Asgardien. Voilà. Le drame. Il me faudrait une cure de Thor 2 pour m'en remettre. Une dernière chose: le meilleur personnage de la série est un alligator. 👀🐊

Et le reste

Outre mon Cheval Magazine adoré, j'ai lu Translittérature, la revue de l'Association des traducteurs littéraires de France, une lecture de qualité sur des traductions et des traducteurs extraordinaires.