samedi 22 mars 2025

Ceci est notre post-partum (2021)

🥁🥁Roulement de tambours 🥁🥁

Est-ce que ce blog se tournerait vers la parentalité?

🥁🥁 Roulement de tambours 🥁🥁

Non. J'ai lu ce bouquin parce que Shaya me l'a prêté et que le sujet est d'intérêt général pour les femmes. Pas pour me préparer aux suites d'un accouchement. J'étais largement hermétique à l'idée avant et je le suis toujours autant. (Mais pas plus, ce qui est dire combien j'étais déjà hermétique avant... 😅)

Illana Weizman a écrit cet ouvrage dans la suite du lancement du hashtag #MonPostPartum sur les réseaux sociaux. Il est structuré en cinq chapitres bien échelonnés: définition du post-partum, traitement de la douleur des femmes, rejet du corps post-partum, contexte de domination masculine, pistes politiques pour une meilleure prise en charge.

Déjà, la première partie m'a été bien utile pour relativiser l'emploi du terme "post-partum". À la base, quand j'ai découvert ce terme, c'était au sein d'un autre terme: "dépression post-partum". Du coup, je me suis souvent dit, en entendant des gens évoquer le post-partum, que ces gens collaient un terme grave, lié à la dépression, sur un état qui n'était pas si grave que ça. Même ma Clotilde adorée de Change ma vie, quand elle a fait son épisode "Mon post-partum", je me suis dit "mais ce n'est pas du tout une dépression, ce qu'elle décrit"... 🤨 Cela ne m'a pas empêchée d'ouvrir grand les oreilles pour écouter cet épisode, hein, parce que Clotilde est l'amie ou la grande sœur que je n'ai pas dans la vraie vie et que je prends tout ce qu'elle dit très au sérieux. Mais bon, perplexité de ma part sur l'usage du terme médical. Donc, désormais, je saurai: le post-partum, c'est la période après l'accouchement et tout ce qu'elle implique. Elle peut parfois impliquer une dépression post-partum, mais pas forcément. Le terme "post-partum" est bien plus large que le terme "dépression post-partum".

La suite est très intéressante. L'autrice retrace les différentes raisons pour lesquelles on fait collectivement semblant que la douleur s'arrête avec l'expulsion de l'enfant et pour lesquelles les femmes n'osent pas trop évoquer leurs difficultés, ainsi que les critiques qu'on leur adresse quand elles le font – critiques qui viennent souvent d'autres femmes, ce qui n'est pas une surprise mais est néanmoins désespérant. Elle décrit les différents problèmes rencontrés, comme les saignements qui peuvent continuer durant des jours, voire des semaines, et toutes sortes de joyeusetés bien dégueulasses. Les corps biologiques sont décidément des choses affreuses. Le plus frustrant et révoltant, pour moi, c'est toutefois le manque d'accompagnement médical, tous ces gens qui sont censés nous soigner et qui s'en foutent éperdument...

Évidemment, tout ceci est très politique, avec une vraie charge contre la domination masculine et l'héritage judéo-chrétien. C'est là que je ne rejoins pas tout à fait l'autrice, dans le sens que je ne pense pas qu'il y ait une sorte de complot anti-femmes au sein de la société et que, même si j'ai été élevée par des catholiques bien gratinés qui m'ont inculqué plusieurs horreurs, la judéo-chrétienté a bon dos pour porter tout le machisme de la société. L'islam, en revanche, est à peine nommé, ce que je trouve singulier. En revanche, j'ai apprécié qu'elle évoque le machisme invétéré de certains penseurs de la Grèce antique! Là aussi, je trouve assez facile de faire porter la responsabilité du machisme du XXIe siècle sur des gars morts depuis deux millénaires et demi, mais ça met de la nuance au sein d'une civilisation qu'on considère généralement comme éclairée, et "positive" et "enviable" de manière générale.

Voilà voilà. Avant, j'avais envie de cramer pas mal de gens et je trouvais l'accouchement un truc absolument épouvantable qu'il faut vraiment être tarée pour affronter volontairement, et je sors de cette lecture inchangée. J'ai peut-être un peu plus envie de cramer les gynécos, mais même pas tant que ça, lol. Bref, pas de trauma majeur pour moi (contrairement à ce que prétendent craindre tous les gens qui ont reproché à l'autrice d'évoquer le sujet, qui soutiennent que les femmes ne vont plus vouloir avoir d'enfants si on leur dit que c'est dur!) (ah, eux j'ai pas mal envie de les cramer 😅), mais plus de connaissances sur une période qu'ont traversée, que traversent ou que traverseront pas mal d'amies. Et des questionnements personnels, bien sûr: et ma mère? Et mes grands-mères? Qu'ont-elles éprouvé? Qu'ont-elles pensé? Je ne le saurai jamais, et, en fin de compte, c'est ça qui me laissera longtemps en goût amer en bouche.

lundi 17 mars 2025

La Mare au diable (1846)

Pour ouvrir ce billet, une perplexité: je ne sais plus où je suis tombée sur ce bouquin. Une boîte à livres, je crois. Les livres d'occasion sont tellement omniprésents, maintenant, que je confonds totalement leurs lieux d'origine.

Bon. La Mare au diable de George Sand. J'adore ce titre, que je trouve très évocateur, et j'ai un vague intérêt pour cette autrice au nom d'homme, que j'ai, justement, prise pour un homme pendant des années, si ce n'est des décennies. Il y a deux ans, la visite de l'exposition Héroïnes romantiques du Musée de la vie romantique l'a aussi vaguement placée sur mon radar, car l'exposition permanente présente des objets lui ayant appartenu.

(Quand je dis "vaguement", c'est que je me suis dit "tiens, ce serait bien que je la lise", comme je me le dis tous les jours à propos de tas de gens différents, en sachant d'avance que je n'y arriverai jamais.)

La Mare au Diable est un court roman champêtre. Le titre évoque quelque chose de ténébreux, mais ce n'est pas du tout le cas. L'histoire est celle de Germain, un laboureur du Berry, qui va à la ville voisine pour rencontrer une veuve. Lui-même est veuf depuis deux ans, et son beau-père, chez qui il vit, lui a expliqué qu'il serait temps qu'il se remarie. Et, justement, il y a cette veuve plutôt fortunée et de bonne réputation dans la ville d'à côté. D'ailleurs, le beau-père a déjà discuté avec le père de la veuve, et Germain a toutes ses chances. Alors, Germain, un brave garçon sérieux, décide d'aller la rencontrer, même s'il n'est pas vraiment remis de la mort de sa femme, qu'il adorait.

Pour ce petit voyage, il emmène aussi Marie, une jeune fille du village, qui va aller travailler dans un autre village. Et, sur la route, ils sont rejoints par Petit-Pierre, le fils aîné de Germain, qui est très curieux de rencontrer sa peut-être future maman. Malheureusement, ils se perdent dans la forêt et sont contraints de passer la nuit à la bonne étoile, ce qui permet à Germain de mieux connaître Marie. Et, bien sûr, il se rend compte que Marie est non seulement charmante et jolie, mais aussi très sérieuse et travailleuse, et pleine de bon sens.

À part une scène durant laquelle j'ai cru que Germain allait purement et simplement sauter sur Marie et la violer (mais ouf, non!), j'ai beaucoup apprécié ce roman pour une raison simple: les personnages sont gentils. Germain est gentil. Il est gentil avec tout le monde. Il est droit dans ses bottes; il travaille dur sans se plaindre; il fait son devoir. Marie est gentille. Elle est gentille avec tout le monde. Elle est droite dans ses bottes; elle travaille dur sans se plaindre; elle fait son devoir; et elle est très perspicace pour son jeune âge. Petit-Pierre est gentil. Il est aussi espiègle, mais il a sept ans, donc ça peut passer, et ça ne change rien au fait qu'il est gentil. Et il s'occupe déjà un peu d'aiguillonner les bœufs pendant que son père laboure, donc on peut presque dire qu'il est travailleur.

Moi, j'aime bien les gens gentils et travailleurs dans la vraie vie, alors ça m'a fait grand-plaisir de passer quelques heures de lecture avec ces personnages. Le roman est bien daté dans son contexte et sa vision du monde – à commencer par le chapitre durant lequel le beau-père de Germain lui parle de la veuve pouvant faire une épouse intéressante: c'est un mariage arrangé de A à Z entre gens qui ne se connaissent même pas –, mais c'est champêtre et désuet de manière positive. Ça donnerait presque envie de vivre dans ce Berry agricole où tout le monde est content de son lot, franchement. Les annexes décrivent avec force détails les festivités entourant une noce, ce qui en fait presque un document anthropologique sur les mœurs du peuple berrichon au XIXe siècle... ^^ Et puis le climat n'était pas encore flingué à l'époque, ce qui semble fortement enviable.

Bon, il y a aussi un enfant de sept ans qui commence à travailler aux champs, et une fille de seize ans qui finit avec un homme de vingt-huit, ce qui provoque un léger frémissement de la part du lecteur moderne. Mais je vous assure que ça semble parfaitement naturel et charmant, dans son contexte.

Voilà. Ce n'est pas non plus une lecture ultramarquante, et George Sand n'est pas non plus devenue ma nouvelle prosatrice préférée, mais ce roman est sans aucun doute original et plaisant. C'est un peu La Terre de Zola, mais sans le point de vue zolien, quoi. 🤣🤣🤣

Et le titre, alors? Eh bien, il y a vraiment une mare au diable dans l'histoire, comme le révèle une vieille femme rencontrée dans la forêt. Je ne suis pas sûre que cela justifie de nommer le roman ainsi ("Le Laboureur" aurait été plus juste), mais elle est bien là.

mercredi 12 mars 2025

La Touche étoile (2006)

En 2021, j'ai découvert Benoîte Groult avec un immense plaisir. Après une trouvaille dans une étagère de livres à donner en 2023, j'ai cette fois-ci trouvé un roman d'elle en bouquinerie, et je n'ai pas hésité.

La Touche étoile est paru en 2006, et il m'a pas mal rappelé La Part des choses, qui est paru bien plus tôt, en 1972. On y retrouve des éléments communs: des points de vue multiples, la Bretagne, la mer et la navigation, les relations entre hommes et femmes, l'insatisfaction, l'adultère et le vieillissement. Et le franc-parler formidable de cette autrice, bien sûr.

Le premier chapitre donne la parole à Moïra, le destin en grec. Les autres chapitres alternent entre le point de vue d'Alice, âgée de quatre-vingt ans et plus, et celui de sa fille Marion. J'ai parfois eu un peu de mal à me repérer, chacune ayant un mari et plusieurs enfants, mais leurs trajectoires sont assez différentes.

Alice est une féministe "historique", qui voit les portes se fermer progressivement à cause de son âge, et qui observe avec consternation les jeunes générations. Son arrière-petit-fils est tellement gâté qu'elle l'appelle "l'énergumène" ou quelque chose de ce genre, ce qui m'a bien fait marrer. Je pense qu'elle est l'avatar de l'autrice, car c'est là que j'ai le plus retrouvé la verve que j'avais déjà lue.

L'intrigue de Marion tourne essentiellement autour de sa relation adultère avec un Irlandais, Brian, qu'elle a fréquenté par intermittence durant des années et dont elle a eu un enfant. Moi, cet élément d'adultère me laisse assez perplexe. Je considère la fidélité comme une des bases du couple, donc je vois l'adultère comme quelque chose de malhonnête – et ce même si, dans ce cas précis, le mari de Marion la trompe allègrement, à répétition et y compris avec ses amies à elle! (Enfin, des "amies"... Le terme ne me semble pas terriblement adapté... 🙃) Mais j'ai tout de même apprécié son histoire aussi.

Les deux femmes parlent toutes deux du vieillissement, de la santé qui s'amenuise, des expériences vécues qui s'accumulent, et c'est drôle par moments et poignants par d'autres.

"Une des tristesses de l'âge, c'est de s'apercevoir que les pires traditions, les préjugés les plus révoltants, les comportements les plus condamnables et qui ont été brillamment condamnés depuis trente ans par des sociologues et des psys de toutes obédiences, survivent à tout imperturbablement."
Halàlà, quelle déprime.

Surprise: la fin du roman se termine par un plaidoyer en faveur de l'euthanasie humaine. J'avais totalement oublié que Benoîte Groult militait pour l'Association pour le droit de mourir dans la dignité, et même que, selon sa page Wikipédia, elle a elle-même été euthanasiée. J'ai trouvé ça vibrant, quoi qu'un peu flippant. J'aimerais bien soutenir cette association, mais l'environnement reste ma priorité – accompagné en 2025, si mes moyens me le permettent, de journaux indépendants –, donc je doute d'y venir. Mais j'écris ça ici dans l'espoir de m'aider à me souvenir de franchir le pas un jour.

Autres livres de l'autrice déjà chroniqués sur ce blog
La Part des choses (1972)
Ainsi soit-elle (1975)
Mon évasion (2008)

vendredi 7 mars 2025

Recherche d'une Église (1934)

Taratata, taratata, c'est le retour de Jules Romains!!

Après un sixième tome qui se terminait avec la prise de conscience de Jerphanion qu'il lui fallait quelque chose de plus grand que lui – une Église, en d'autres termes – et sa prise de contact avec Clanricard, le septième tome de la Saga des Hommes de bonne volonté s'articule en grande partie autour de cette recherche. Ce qui n'a rien d'étonnant, au vu du titre.

Pour Jerphanion, et Laulerque qu'il rencontre grâce à Clanricard, la piste à suivre est assez marrante: ce ne sera pas le Parti Socialiste ou une autre entité du même genre, mais... des sociétés secrètes. Jerphanion se tourne vers la Franc-maçonnerie; Laulerque, vers une société tellement secrète que le lecteur n'apprendra rien à son sujet. Par ailleurs, Jerphanion discute beaucoup avec Jallez, son camarade de Normale, et on en apprend plus sur Juliette, l'amante de celui-ci. J'adore Jerphanion et Jallez, alors je me suis régalée. Et le mari trompé entre aussi en scène.

Du côté de la bonne société, on a un dîner autour d'une actrice, Germaine Baader, et quelques rendez-vous rapides. Et Gurau, devenu ministre je ne sais plus quand, plante sa démission!! Mais on le voit très peu, et je n'ai pas du tout saisi les tenants et les aboutissants de son mandat.

Bref, l'intrigue avance tranquillement, et l'apparition des sociétés secrètes est sans doute très importante pour la suite, mais il n'y a pas de changement majeur. J'ai passé un excellent moment, et j'ai retrouvé avec grand plaisir tous les personnages, et je me réjouis de lire la suite.

Du point de vue du support, ce septième tome est le dernier du premier tome de la collection Bouquins!! C'est fou. Je l'aurai lu en moins d'un an, ce sur quoi je n'aurais jamais misé quand je l'ai commencé. Avant de le ranger dans la bibliothèque, j'ai resurvolé l'introduction – qui est beaucoup trop pointue pour moi mais fournit tout de même des informations intéressantes –, la biographie de l'auteur et surtout sa préface, qui éclaire son projet de manière très intéressante. Le premier paragraphe est d'ailleurs très drôle:

"Je publie aujourd’hui les deux premiers volumes de l’œuvre qui sera probablement la principale de ma vie. Par les dimensions d'abord. Ces deux volumes doivent être suivis, à des intervalles que je tacherai de rapprocher autant que possible, d'un certain nombre d'autres. (Je m'abstiens d'indiquer un chiffre précis pour n'effrayer personne.) Par le contenu aussi, je l'espère."
"Je m'abstiens d'indiquer un chiffre précis pour n'effrayer personne." C'est beau. Je crois que, à l'époque, il ne misait que sur dix ou douze romans. Au final, il y en aura eu vingt-sept!!! Vingt-sept!!! Pour sept cent soixante-dix-neuf chapitres!!! 779!!! Le gars était un malade. 😅 Et il ne voyait pas ça comme une saga en plusieurs volumes, mais comme un seul et unique roman très long!! Le fou.

mardi 4 mars 2025

La gamelle de février 2025

Comme toujours, retour sur les activités culturelles du mois écoulé, hors lecture!

Sur petit écran


Pas de film.

Sur grand écran

Babygirl de Halina Reijn (2024)

Ouch! Nicole Kidman joue une PDG très maîtresse d'elle qui initie une liaison avec son stagiaire bien plus jeune. Leur relation est nettement moins sordide et dominatrice que la bande annonce ne le laisse présumer, mais il y quand même pas mal de tension. Malgré cela, je me suis ennuyée ferme. Je n'ai absolument pas compris ce que le personnage de Nicole Kidman peut bien trouver au jeune homme. La moitié des dialogues sont hachés, interrompus, chuchotés et marmonnés, ce qui m'a exaspérée. La caméra bouge beacoup, ce qui m'a exaspérée aussi. Je ne suis pas sure d'avoir compris la fin. Et pour un film qui tourne autour de la jouissance de NICOLE KIDMAN, une actrice avec un potentiel de dingo, c'était bien peu excitant. Mais en bien, je dirai que Nicole Kidman a un charisme fou et joue un rôle difficile, qu'Antonio Banderas est merveilleux même en père de famille ennuyeux, et que le film parle de sexualité féminine, y compris de masturbation, ce qui est toujours bien.

Better Man de Michael Gracey (2024)

Holàlà qu'est-ce que j'ai aimé!!!! J'ai chanté (tout bas 😂😂), j'ai gigoté sur mon siège, j'ai pleuré!!! Les chansons de Robbie Williams – dont j'ai découvert que j'en connaissais vaguement quelques-unes, outre "Rock DJ" que j'adore et "Angels" que j'ai redécouverte grâce à la bande-annonce – ne seront plus jamais les mêmes pour moi. La fin, son message de rédemption et cette autre chanson que je ne divulgalcherai pas m'ont électrisée et m'ont donné de l'espoir. Holàlà!!!!

Moulin Rouge! de Baz Luhrmann (2001)

Holàlàlà mais quelle merveille, ce film!! Je l'aime teeelllleeeeement!! Je l'avais déjà (re)vu au cinéma en 2021 et en 2022 et non seulement je ne m'en lasse pas, mais je l'ai trouvé encore meilleur!!

Creation of the Gods 2 – Demon Force de Wuershan (2025)

Holàlàlà mais quel bonheur!!! Cette fantasy chinoise me dépayse totalement et m'enthousiasme démesurément en dépit de certains côtés ridicules!! Je suis tellement heureuse que mon cinéma l'ait passé!!! Vivement le troisième film!!!! Aaaaaaaah!!!
Mon avis sur le premier film (ohlàlàlà!!!).

Du côté des séries

Toujours rien.

Et le reste

J'ai lu le Manière de voir de décembre 2023-janvier 2024 sur les femmes et le féminisme. Cette revue regroupe des articles passés du Monde Diplomatique. À quelques rares exceptions près, tous les articles réunis ici sont très récents – post Me-Too, dirais-je –, ce qui m'a laissée assez songeuse. Le Monde Diplomatique n'écrivait-il pas sur les luttes des femmes, avant? Enfin, d'un autre côté, l'article de Gisèle Halimi de 1993 m'a plutôt déprimée, vu qu'elle décrit des réactions identiques à celles d'aujourd'hui. Rien ne change et c'est assez désespérant.

Cheval Magazine est arrivé un peu tard et le mois de février est un mois court, alors il a basculé sur le mois de mars. ^^

jeudi 27 février 2025

The Sittaford Mystery (1931)

Chronique express!

Photo souvenir d'une des meilleures matinées de l'année:
j'avais passé un super week-end, j'avais du temps avant mon train, j'avais de quoi payer, je savais que ce serait délicieux... 💖

Un petit Agatha Christie, ça ne se refuse jamais, et encore moins quand on trouve un exemplaire abandonné sur son chemin. Cela faisait bien trop longtemps que je n'avais rien lu de la reine du crime (six ans depuis The Hollow!), et je l'ai retrouvée avec une jubilation totale.

Au menu de ce roman: une séance de spiritisme qui annonce un meurtre, un homme tué chez lui, un suspect tout trouvé, un policier précis et perspicace, une tonne de personnages secondaires qui pourraient bien être suspects à leur tour, une multitude de fausses pistes et surtout Emily Trefusis, la petite amie délicieusement charmante du principal suspect, qui est bien déterminée à prouver son innocence. Comme souvent, l'intrigue se passe dans le genre de coin paumé d'Angleterre qui me fait rêver, où tout le monde connaît tout le monde, où les trains roulent sans difficulté, où le chômage et la criminalité n'existent pas (enfin, sauf qu'il y a un meurtre, HAHAHAHAHA), et où les saisons sont de vraies saisons, ma petite dame. Et les personnages vivent au sein d'une société pas très huppée, mais néanmoins très policée et propre sur elle. J'A-DO-RE. Et puis Christie avait beaucoup d'humour et fait ici pas mal de références à Arthur Conan Doyle, que j'aime d'amour aussi. Et puis comme j'ai bien compris qu'il faut soupçonner TOUT LE MONDE dans ses romans, j'ai soupçonné le meurtrier!!! Bonheur et fierté.

samedi 22 février 2025

The Kaiju Preservation Society (2022)

Chronique express!

Après Redshirts et ses membres d'équipage bien décidés à survivre, place à un nouveau John Scalzi! Dans The Kaiju Preservation Society, on suit les aventures de Jamie Gray, un New-Yorkais qui a perdu son emploi à la veille du confinement de 2020 et est devenu livreur pour une société type UberEats (son ancien employeur, soit dit en passant). Il retrouve ainsi par hasard une vieille connaissance, qui lui propose un emploi bien plus rémunérateur sans lui donner trop de détails.

Le personnage qui débarque dans un environnement qu'il ne connaît pas, c'est évidemment un procédé bien connu pour poser un décor, et cela marche ici très bien pour nous mener jusque sur une Terre parallèle à la nôtre, où la vie a évolué de manière très différente, prenant parfois des proportions... titanesques. Tout est dans le titre. Mais les kaijus ne sont pas seulement super cools parce qu'ils sont des kaijus: ils ont aussi un fonctionnement assez intéressant, qui implique des tas de parasites. Comme le dit un personnage, il faut plutôt les concevoir comme des écosystèmes que comme des animaux...

Si j'ai été incapable de retenir qui faisait quoi dans l'équipe du personnage principal et si j'ai été exaspérée par la structure "ligne de dialogue - description d'un geste - ligne de dialogue - description d'un geste" absolument INCESSANTE de ce roman, j'ai tout de même passé un super moment avec notre brave Société. C'est truffé de références à la pop culture (heureusement que j'écoute Godzilla Final Podcast, sinon je n'aurais pas compris pourquoi le vaisseau s'appelle le Shobijin 😂😂), c'est truffé de vannes et de blagues, ça se lit tout seul, c'est parfait. J'ai aussi beaucoup apprécié la postface dans laquelle Scalzi explique avec honnêteté comment il a galéré à écrire en 2020 et début 2021. Quelque chose me dit qu'il doit de nouveau avoir du mal à écrire depuis novembre dernier...

Allez donc voir ailleurs si ces kaijus y sont!
L'avis du Chien critique
L'avis d'Ombrebones

lundi 17 février 2025

Les Falsificateurs (2007)

Après avoir lu trois romans d'Antoine Bello (Ada, Roman américain et Du Rififi à Wall Street), j'étais ultra motivée pour continuer le voyage aux côtés de cet écrivain billant, qui sait aborder des sujets complexes avec une plume limpide et brouiller les frontières entre réalité et fiction.


Dans Les Falsificateurs, il met en scène Sliv Dartunghuver, un Islandais embauché dans un cabinet d'expertise. Après sa première mission, qui se déroule au Groenland, son patron lui révèle que l'entreprise sert en réalité de façade au CFR. Personne ne sait avec certitude ce que signifie ce sigle, mais tout le monde s'accorde à penser qu'il s'agit du "Consortium de falfication du réel". En tout cas, c'est une organisation tentaculaire, présente dans le monde entier, qui modifie la réalité via la falsification grâce à des moyens humains, techniques et économiques ahurissants.

"Je vous invite à lire ce dossier. Il a été monté il y a trois ans par une jeune recrue dont c'était la première affaire. Il est loin d'être parfait mais il vous donnera un bon aperçu de notre travail au quotidien. [...] Un conseil: si cette lecture ne suscite chez vous aucune forme de jubilation intellectuelle, arêtez les frais immédiatement. Si, dès le deuxième paragraphe, vous vous prenez à vous demander s'il était possible de faire mieux et comment vous auriez procédé à la place de l'auteur, c'est que vous êtes ferré."
Le premier dossier de Sliv consiste à inventer une histoire d'expropriation des peuples premiers au Bostwana. Insertion d'un chapitre inventé de toutes pièces dans le projet de publication de l'autobiographie bien réelle d'un célèbre anthropologue, invention de divers personnages ayant révélé l'affaire, modification de sources réelles: après avoir écrit un scénario, il faut concevoir la falsification dans ses moindres détails afin que l'affaire tienne debout et trompe le monde entier.

Ce concept même – l'histoire d'un falsificateur qui modifie le monde aux yeux de ses contemporains – est belloesque par essence, et je me suis ré-ga-lée. Déjà, le style limpide de l'auteur est bien présent, et avec une bonne dose d'humour.
"Vers la fin de l'année 1994, je commençai à préparer mon voyage en Patagonie. Lena Thorsen avait anéanti mes espoirs de prendre un mois entier de congé en m'accordant royalement quinze jours "pendant la période creuse" (elle était bien la seule à s'être penchée sur la saisonnalité du business de la falsification)."

Les personnages sont tous bien croqués: Sliv, son patron, ses amis falsificateurs. Les histoires dans l'histoire (les divers scénarios que Sliv étudie ou rédige) sont prenantes et passionnantes. Et bien sûr, l'étendue de la falsification et la minutie nécessaire pour qu'elle tienne l'épreuve du réel sont absolument immenses, jubilatoires, passionnnantes, renversantes. Et, bien sûr, on s'interroge sans cesse, en toile de fond, sur l'identité exacte du CFR et ses motivations réelles. Pourquoi monter autant de projets dans tous les domaines? Et comment diable sont-ils financés?

Je n'ai que deux bémols à cette lecture. Premièrement, l'étendue de la falsification à l'œuvre ici m'a fait sérieusement relativiser la falsification d'une page Wikipédia qui m'avait pas mal retourné le cerveau dans Roman américain; pour Antoine Bello, c'était probablement un petit exercice de routine. 🤣🤣🤣 Deuxièmement, le roman se termine sur deux mots terribles, deux mots qui hantent les nuits des lecteurs confrontés à un certain espace-temps: "à suivre". Car l'histoire n'est pas finie!!! Heureusement pour moi, j'arrive mille ans après la guerre et j'ai donc déjà la suite, Les Éclaireurs. Je l'avais même achetée la première, avant de découvrir qu'il valait mieux la lire à la suite des Falsificateurs. Je suis joie, je suis bonheur, je suis jubilation, je lirai ça bientôt. Antoine Bello est un génie!