Je connais bien les critiques concernant l’œuvre de Lovecraft, qui concernent généralement ses structures répétitives et ses descriptions axées sur la non-description (ou: le recours à l'adjectif innommable à tout bout de champ). Je dois dire que ces critiques sont fondées et je suis d'avis qu'il ne faut pas lire Lovecraft à grosses doses, l'excès d'HPL risquant de lasser, puis de dégoûter, le lecteur. Il faut garder à l'esprit qu'il publiait dans des magazines et que ses lecteurs n'étaient pas sensés lire plus d'un texte à la fois.
En revanche, HPL continue de bien marcher sur moi, et si j'oublie régulièrement le thème de telle ou telle nouvelle, j'adore certains de ses textes, qui m'ont vraiment marquée. J'ai lu ce recueil-ci --The Haunter of the Dark, aux éditions Wordsworth-- avec d'autant plus de plaisir qu'il contient quelques textes qui ne relèvent pas de la structure habituelle, comme The Unnamable (qui reprend avec humour les critiques que je citais plus haut), Les Chats d'Ulthar ou Fungi from Yoggoth (un texte en vers). J'ai aussi beaucoup aimé les textes liés au rêve: si je me suis ennuyée avec The Dream-Quest of Unknown Kadath, qui est immensément longue par rapport à ce qu'il s'y passe réellement, j'ai adoré Celephaïs. Et j'ai relu avec plaisir Pickman's Model, un texte qui m'avait marquée quand j'avais emprunté un recueil d'HPL à la bibliothèque de Dublin, mais dont j'avais oublié le nom.
En revanche, le texte dont je souhaite vous parler aujourd'hui est le petit essai qui clôt le recueil: Supernatural Horror in Literature (Épouvante et surnaturel en littérature). Il s'agit d'une histoire de la littérature weird au sens large, depuis les mythes des civilisations du Moyen-Orient jusqu'aux auteurs du début du XXe siècle. HPL a dû l'écrire pendant les années vingt ou trente et ne peut donc pas se pencher sur l'explosion qu'a connue le genre après la guerre, avec des auteurs comme Stephen King et Anne Rice qui sont devenus parmi les meilleurs vendeurs du monde entier; mais il résume bien l'évolution du genre pendant le XVIIIe et le XIXe (cette dernière période étant celle que je connais le mieux).
"The oldest and strongest emotion of mankind is fear, and the oldest and strongest kind of fear is fear of the unknown."
Après cet incipit ô combien lucide, l'essai s'articule sur les chapitres suivants:
Introduction
The Dawn of the Horror-Tale
The Early Gothic Novel
The Apex of Gothic Romance
The Aftermath of Gothic Fiction
Spectral Literature on the Continent
Edgar Allan Poe
The Weird Tradition in America
The Weird Tradition in the British Isles
The Modern Masters
Cette dernière partie est un peu lourde, dans la mesure où la plupart des écrivains qu'HPL considère comme des maîtres ne sont pas passés à la postérité (ou, en tout cas, ne sont pas parvenus jusqu'à mes oreilles). Mais le reste est vraiment intéressant. Tous les auteurs dont vous avez déjà entendu parler y passent: Conan Doyle, Maupassant, Balzac, Jane Austen, Ann Radcliffe, Daniel Hawthorne et des dizaines d'autres. J'ai vraiment été ébahie par la richesse de ses références et, une fois de plus, j'ai repris conscience de combien je ne suis pas une lectrice de littératures de l'imaginaire en général, mais bien une lectrice de fantastique en particulier.
Je conclus en vous laissant sur le passage qui m'a fait du bien:
"Of younger Americans, none strikes the note of cosmic terror so well as the California poet, artist, and fictionist Clark Ashton Smith, whose bizarre writings, drawings, paintings, and stories are the delight of a sensitive few."
Allez, je ne fais pas partie des happy few, mais je suis des sensitive few; et en compagnie d'HPL, excusez du peu. :)
Je n'ai jamais lu Lovecraft, et je dois dire que ce n'est pas l'envie qui manque ! Alors, un de ces quatre, pourquoi pas ?
RépondreSupprimerCe n'est pas moi qui vais te dire le contraire :P
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