Tranquillou bilou, je continue de lire la saga des Hommes de bonne volonté de Jules Romains.
En novembre, j'ai lu le cinquième tome, Les Superbes.
Trois intrigues principales sont abordées ici. D'une part, la relation adultère de Marie de Champcenais et Roger Sammécaud: rencontres, secret de Marie, rapports sexuels, cliffhanger final. D'autre part, Harverkamp. Pour l'instant, je l'avais plutôt identifié comme "le patron de Waremmes", mais là on le voit mener ses affaires immobilières durant plusieurs chapitres passionnants. Le gars est une force de la nature, un peu genre Saccard dans La Curée, mais sans les magouilles (enfin, avec des magouilles moins alambiquées). Ses stratégies nous mènent au journal La Sanction, où on retrouve le député Gurau, troisième personnage principal. J'adooooooore Gurau, le socialiste idéaliste, pragmatique et imbu de lui-même en même temps (un vrai bel exemple d'humain plein de facettes parfois légèrement contradictoires: comme quoi on peut à la fois vouloir sincèrement aider la classe ouvrière et rêver du jour où on sera, soi, au pouvoir à la place du gouvernement actuel – et auréolé de gloire, bein sûr).
Durant ma lecture, je n'ai pas compris pourquoi le roman s'appelle ainsi. Il y a bien deux personnages qui peuvent être qualifiés de superbes, dans le sens de "atteints de superbe" (Larousse: Assurance orgueilleuse hautaine), mais, dans l'ensemble, ça ne me semblait pas très clair. Jusqu'à ce que je réalise que le roman suivant s'appelle Les Humbles. J'ai donc pensé que les deux fonctionnent ensemble en étudiant deux classes sociales et économiques opposées.
Et j'avais bien vu. Le sixième tome met plutôt en scène des personnages pauvres. Dès le premier chapitre, on retrouve Louis Bastide, le petit garçon qui jouait avec son cerceau dans un chapitre entier du tome 1. Certes, après, on passe pas mal de temps avec Marie de Champcenais, mais je pense qu'elle est à la lisière des deux, cette pauvre petite. Ici, on la voit avorter en cachette, ce qui donne des pages assez poignantes, puis une scène légèrement dégueulasse (ah, jeter aux toilettes un morceau de coton qui résiste quand on le déchire en deux, parce qu'il contient un foetus de trois mois... Même pour le père, c'est quelque chose!).
Le vrai héros du roman, c'est donc Louis Bastide, un modèle d'enfant vertueux et plein de bonne volonté, que j'ai adoré. Il fait de son mieux quand ses parents sont en galère économique, et c'est poignant de voir ses efforts. J'espère qu'il ne va pas mal finir, mais, vu son âge, il me semble évident qu'il va se prendre la Première Guerre mondiale en plein dans la tronche... 😭😭 C'est lui qui nous mène au père Jeanne, le prêtre qui lui fait ses leçons de catéchisme. Et c'est le père Jeanne qui nous expose la différence entre les humbles et les superbes!
"Il y avait d'un côté les Humbles, de l'autre, les Superbes. Cette démarcation ne correspondait pas à des classes définies de la Société. Elle ne se ramenait pas, comme les catégories d'Ernest Torchecoul, à des "critères purement économiques". Comme il était naturel, les Humbles se recrutaient surtout chez les pauvres, dans le monde de ceux qui travaillent pour un faible salaire, et qui obéissent. Les Superbes, plutôt chez les riches, chez ceux qui gagnent beaucoup d'argent et qui commandent. [...] Mais il pouvait y avoir des Humbles parmi les riches, et des Superbes parmi les pauvres. Il pouvait y avoir des Humbles qui, peu à peu, comme envahis par l'affluence de la sève, se redressaient jusqu'au rang des Superbes; et des Superbes qui mystérieusement trouvaient le chemin de l'humilité, ou y étaient conduits par une main invisible."
Ainsi, il me semble clair que les parents de Louis Bastide, bien qu'issus de la classe laborieuse, sont plutôt des Superbes. 👀
J'ai bien aimé le père Jeanne, qui est sincèrement bon malgré quelques nœuds au cerveau.
En parallèle, l'intrigue de Jerphanion et Jallez avance peu, mais Jerphanion fait un pas de géant: il décide de s'inscrire au Parti Socialiste et prend contact avec Clanricard, qui est l'instituteur de Louis Bastide (parce que tout est lié, dans cette série 😱😱😱) et que j'ai repéré dès le premier roman comme, probablement, un des hommes de bonne volonté qui donne son nom à la saga. Et tout ceci tourne autour du fait que Jerphanion, comme tant d'autres, recherche "une Église", au sens non religieux du terme, pour se sentir moins seul. Et justement, le septième tome s'appelle... Recherche d'une Église. Je suis joie, je suis bonheur, je crie au génie, je suis tout ébourrifée.
Purée, qu'est-ce que je me régale. Il ne me reste qu'un roman dans cette intégrale. J'espère ardemment recevoir le deuxième volume en cadeau en ce Noël!!!
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