Comme d'habitude, retour sur les lectures graphiques du trimestre.
Wonder Woman: Historia de Kelly Sue DeConnick (scénario), Phil Jimenez, Gene Ha et Nicola Scott (tous trois au dessin), traduit de l'anglais par Thomas Davier (2022)
J'ai lu ce comics parce que les GG Comics lui ont consacré un épisode très enthousiaste, et grand bien m'en a pris – ou plutôt, quelle claque je me suis prise! Sur un scénario de Kelly Sue DeConnick, trois dessinateurs décrivent, en trois livres, l'origine des Amazones. (Le titre original est d'ailleurs WonderWoman: The Amazons.) Dans le premier livre, dessiné par Phil Jimenez, l'histoire commence avec sept déesses exaspérées par le traitement réservé aux femmes: Hestia, Artémis, Démeter, Hécate, Aphrodite, Athéna et Héra. Défiant Zeux, les six premières façonnent les Amazones, qui se répartissent en six tribus; la septième ne participe pas au projet, mais le soutient de loin. Les dessins de cette partie sont tout simplement ahurissants. La richesse des costumes et des symboles des déesses est FOLLE. Dans le deuxième livre, qui est dessiné par Gene Ha, se forme une septième tribu, composée de femmes mortelles, dont une certaine Hippolyte, la mère de WonderWoman dans l'univers de DC. J'ai beaucoup moins aimé le dessin et j'ai même trouvé certains visages ratés, mais l'histoire se poursuit avec brio. Enfin, le troisième livre, dessiné par Nicola Scott, raconte la guerre entre les dieux (masculins!) et les Amazones une fois l'existence de celles-ci révélée au grand jour (et c'est le cas de le dire, le soleil jouant un rôle important dans cette révélation). Une fin brillante et logique, quoiqu'un peu tragique, et qui ouvre la voie à l'arrivée de la plus célèbre des super-héroïnes.
Même si j'ai parfois galéré à comprendre dans quel ordre lire les bulles (un problème que je rencontre souvent si je lis quelque chose de moins cadré que le franco-belge à la Tintin) et que j'ai moins aimé les dessins de la deuxième partie, je suis sortie de là tout ébourrifée par la maîtrise du scénario, le souffle épique, l'inspiration mythologique, le détail des costumes des déesses et des Amazones et la manière dont les déesses sont clairement non humaines. Un comics d'exception (et ultraféministe par-dessus le marché!), qui méritait effectivement que les GG lui consacrent un épisode dédié!
Éditeur: Urban
Amitié. Tout ce qui nous lie de Heike Faller (texte) et Valerio Vidali (dessin), traduit de l'allemand par Olivier Mannoni (2020)
Un album "dédié à toutes les amitiés", dans laquelle chaque page associe une phrase et un dessin illustrant un moment entre deux amis. C'est très joli, mais personnellement ça m'a totalement déprimée et c'est venu renforcer mon impression tenace que je n'ai jamais vécu une grande et belle amitié. Mais bon, ça prend dix minutes à lire, alors n'hésitez pas si ça vous tente. Notez qu'il est traduit de l'allemand par Olivier Mannoni, qui fait ainsi le grand écart par rapport à Mein Kampf et son travail habituel et illustre à la perfection l'extrême polyvalence du traducteur professionnel. 😅
Éditeur: Sous-sol / Seuil
Le premier chat dans l'espace a mangé de la pizza de Mac Barnett (texte) et Shawn Harris (dessin), traduit de l'anglais par Philippe Touboul (2022)
La lune est en danger! Des rats la grignotent! La seule solution: envoyer sur place un chat. 😼 Ce pitch délirant lance une BD fort sympathique, créative et amusante, dans laquelle ledit chat – qui s'exprime uniquement en disant "miaou" – s'allie à un robot coupe-ongles (😂) et à la reine de la Lune pour tuer le roi des rats, qui habite du côté obscur de la Lune. J'ai bien rigolé et c'était vraiment chouette.
Éditeur: Albin Michel
Poltron Minet. Le protocole Seth de Mayen (scénario) et Madd (dessins et couleurs) (2024)
Suite de La Voie romane, que j'ai lu l'année dernière, ce deuxième tome est tout aussi adorable et joliment dessiné, mais probablement plus dur. En tout cas, je n'ai pas le souvenir qu'il y ait eu des cadavres dans le premier. J'ai trouvé le thème du laboratoire d'expérimentation animale assez éculé, mais je suis ravie qu'on le propose à des enfants – et assez étonnée en même temps, car, bien que les dessins soient mignons, le contenu de certaines cases est AFFREUX. Il y a quelque chose de politique à montrer les humains comme des tortionnaires et je trouve ça bien, d'autant plus que les personnages non humains ne sont pas tous dignes de confiance, ce qui évite une opposition simpliste. J'ai du mal à reconnaître les renards les uns des autres, ce qui m'a empêché de bien suivre l'histoire, mais je trouve que cette série est vraiment pas mal.
Éditeur: Dupuis
Les Dinosaures du Paradis de Mazan (2024)
Une BD aussi épaisse que dense sur une expédition française au Laos, en 2012, destinée à chercher le squelette d'un spinosaure, Ichthyovenator laosensis. Tout débute, à la base, en Charente, département français connu pour ses gisements de dinosaures. En 2010, Mazan, dessinateur, a l'occasion de passer voir un chantier de fouilles, et le voilà embarqué par Ronan Allain (un des plus célèbres paléontologues français, dont j'ai chroniqué un bouquin il y a mille ans) (dans un des billets les plus courts de l'histoire du blog, lol!) à l'autre bout du monde. J'ai adoré, car les dessins sont superbes et qu'on suit toutes les étapes d'une expédition de terrain qui n'a rien d'évident! En revanche, j'ai trouvé l'auteur peu respectueux des Laotiens. Il n'y a rien d'insultant à proprement parler, mais il donne l'impression d'être un boomer qui trouve tout ce qui est différent ridicule...
De cet auteur, j'avais déjà lu, et avec grand plaisir, Mimo, qui parle d'un dinosaure retrouvé en Charente.
Éditeur: Futuropolis
Mimo. Sur la trace des dinos (2011) et Mimo II. Les dinos des antipodes (2016) de Mazan (dessin), Isabelle Dethan (textes narratifs), Ronan Allain et Jean-François Tournepiche (textes pédagogiques)
Évidemment, j'ai, dans la foulée, relu les deux BD sur Mimo, un ornithomimosaure retrouvé en Charente et mis en scène ici dans deux aventures avec Hector, le carchorodontosaure albinos. Les dessins sont mignons tout plein et les deux histoires sont très amusantes. Dans chaque album, la deuxième partie, beaucoup plus dense et sérieuse, présente des informations scientifiques sur les lieux des fouilles et les espèces qui y ont été retrouvées. D'ailleurs, je ne suis pas sûre que le jeune public visé par la partie en BD puisse vraiment s'y retrouver dans la deuxième, mais bon. Notons que Mazan a réutilisé quelques dessins de ces deux BD dans Les Dinosaures du Paradis, et que Les Dinos des Antipodes se passe justement au Laos (ou plutôt dans ce qui deviendrait, un jour, le Laos).
Éditeur: Eidola