vendredi 31 juillet 2015

Le Liseur (1995)


Le Liseur ayant d'abord été pour moi un film, The Reader, j'ai forcément été influencée par la version cinématographique lorsque je l'ai lu. Cette relecture, plusieurs années plus tard, en porte certainement aussi la trace, mais elle m'a semblé plus autonome; certaines scènes du film, que j'avais trouvées après-coup extrêmement fidèles au livre, me restaient en tête, mais je me souvenais moins des détails de l'intrigue.


L'intrigue à proprement parler est relativement limitée car ce n'est pas l'action qui compte ici. À quinze ans, un jeune garçon allemand des années cinquante rencontre et devient l'amant d'une femme plus âgée, Hannah, qui disparaît mystérieusement du jour au lendemain. Profondément marquée par cette première relation amoureuse et sexuelle, sa vie sera encore plus influencée par Hannah lorsqu'il la retrouvera par hasard des années plus tard durant un procès sur lequel il travaille pendant ses études.

Le Liseur est un livre vraiment très fin et très juste parce que Bernard Schlink y aborde de nombreux thèmes difficiles avec beaucoup de pudeur et de tact, mais sans perdre en lucidité. C'est-à-dire qu'il ne diminue pas la peine et la cruauté que certaines choses infligent. Mais il travaille vraiment en nuances de gris et jamais dans le noir ou le blanc. Parfois le gris n'est guère encourageant... Parfois il est un peu plus serein. Dans tous les cas, c'est le gris qui est là et c'est avec lui qu'il faut composer.

J'ai été particulièrement marquée par la notion de culpabilité soulignée par le narrateur, qui insiste vraiment sur la différence entre la culpabilité des actes et celle des pensées. "J'avais eu la conviction que c'était moi qui la faisais partir parce que je l'avais trahie et reniée [...]. À vrai dire, qu'elle ne fût pas partie à cause de moi n'empêchait pas que je l'avais trahie. Je restais donc coupable." Si triste et si vrai... Cette notion-là est aussi traitée de manière plus globale au niveau de l'Allemagne tout entière et surtout de la génération née juste après la Seconde Guerre mondiale, qui côtoyait forcément ceux qui avaient vécu/fait/subi/soutenu l'Allemagne nazie. Bernard Schlink n'a aucune réponse à fournir, ni même des questions précises à poser, mais il parle du ressenti de cette génération, de ses tentatives de régler symboliquement certains comptes et de combien cela est impossible.

La discussion entre le narrateur et son père m'a aussi beaucoup touchée. C'est une impasse qui en ressort mais une impasse qu'il faut accepter avec tristesse...

Je ne sais pas trop comment formuler cela, mais j'ai lu en grande partie ce livre dans un train qui m'emmenait en week-end et dans les dernières minutes avant l'entrée en gare, après l'avoir fini, j'ai beaucoup réfléchi à ce que j'avais lu, à ce que j'allais faire, au destin si triste d'Hannah et à toutes les erreurs que nous commettons même quand nous essayons vraiment de faire au mieux...

"Pourquoi ce qui était beau nous paraît-il rétrospectivement détérioré parce que cela dissimulait de vilaines vérités? [...] Parce qu'on ne saurait être heureux dans une situation pareille? Mais on était heureux!"

Le détail que je ne veux pas oublier: j'ai relu ce livre cet été pour trois raisons concomitantes: Grominou l'a lu et chroniqué début juin, ce qui me l'a remis en tête; depuis fin juin, je lis petit à petit La Destruction des Juifs d'Europe; et en juillet j'ai lu Jézabel d'Irène Nemirovsky, dans lequel une autre femme se tient à la barre pour défendre le secret sur lequel est construite sa vie. Un nouvel exemple de l'enchaînement imprévisible et parfois fortuné des évènements.

Prochaine étape: revoir le film.

mardi 28 juillet 2015

Les mannequins ne sont pas des filles modèles (2013)

Chronique express!


Après Les Talons hauts rapprochent les filles du ciel, le roman qui a lancé sa carrière, Olivier Gay remet en scène le personnage de Fitz, un dealer parisien amené un peu par hasard à enquêter sur des affaires louches. Ici, la petite amie de son meilleur pote a disparu alors qu'elle participait à un concours de beauté. Roman policier très sympa, Les Mannequins se veut ironique et léger et ne se prend pas plus au sérieux que son personnage principal, toujours enclin à souligner son incompétence et les travers de ses rencontres. Mais l'humour de looser devient un peu lourd quand il fait son apparition à chaque paragraphe et les dialogues très "parlés" ne passent pas toujours très bien à l'écrit, ce qui m'a un peu irritée dans ma lecture. Mais bon c'est un livre sympa et je continuerai certainement à lire les aventures de Fitz car le titre du prochain opus est juste énorme: Mais je fais quoi du corps? :)

samedi 25 juillet 2015

Fantasy, de l'Angleterre victorienne au Trône de fer

Au cours des mois de juin et de juillet, j'ai tant bien que mal suivi le MOOC Fantasy proposé par l'Université d'Artois.

Après Dino 101, The Horse Course et Les chansons des troubadours, je dois dire que mon sérieux et mon intérêt pour le concept du MOOC ont pas mal diminué et que j'ai suivi ce cours-ci comme j'aurais regardé un documentaire à la télé. C'est-à-dire que je n'ai même pas essayé de prendre des notes, alors que je l'avais fait très sérieusement pour les deux premiers et que j'avais commencé à le faire pour le troisième (avant de réaliser que le sujet ne s'y prêtait guère).


Mon "verdict" (si je puis dire) est le même ici que dans les autres cas: il ne s'agit vraiment aucunement d'une formation, mais "juste" d'un apport de connaissances de qualité sur un sujet. Précisément comme un documentaire. Mais bon, c'est déjà pas mal de recevoir gratuitement des connaissances de qualité, alors on ne va pas se plaindre!

Côté négatif, j'ai retenu ici le singulier manque de dynamisme de certaines intervenantes, une prononciation extrêmement douteuse de certains noms et mots anglais (désolée, ça n'est pas pertinent comme remarque mais j'ai vraiment rigolé!) et une certaine "légèreté" dans le traitement de certains œuvres. Évidemment, c'est un débat sans fin, chacun voudrait entendre parler de ce qu'il aime le plus et on ne peut pas mettre tout le monde d'accord; mais bon parler de vampires pendant deux heures en analysant finement des livres qui passeront certainement à la postérité comme Les vampires de San Francisco ou Vampire Academy et à peine citer Anne Rice en passant, ça m'a laissée pas mal sceptique.

Côté positif, et bien il y a évidemment la débauche d'idées de lecture, que je n'ai pas notées mais qui m'ont donné tellement, tellement envie de lire plus et même de lire tout le temps. "So many books, so little time", c'est juste dingue! C'était aussi une belle excursion dans des sous-genres différents, avec une ouverture finale sur les autres supports médiatiques, comme les jeux vidéos, que j'ai trouvée passionnante. J'ai adoré entendre parler de L'Histoire sans fin et de Conan, adoré les illustrations proposées, et bien sûr adhéré corps et âme à la présentation d'une vidéo complète sur les figures féminines. L'historique de début était aussi super intéressant.

Je ne sais pas trop ce qu'il me restera de ce MOOC dans un an, mais il est certain que je me suis sentie un peu plus cultivée en le suivant! :)

En revanche, l'investissement en temps que j'ai consacré à ces MOOC ayant été assez conséquent, j'ai décidé de ne pas suivre le cinquième et dernier cours auquel je suis inscrite, Fantasy and Science Fiction: The Human Mind, Our Modern World. J'ai besoin de souffler jusqu'à la rentrée de septembre, même si je passe à côté d'heures d'infos passionnantes. Une nouvelle session semble devoir être lancée en octobre, peut-être que la période sera plus propice!

mercredi 22 juillet 2015

Mont-Oriol (1887)

Chronique express!


Au détour de mes trouvailles chez Gibert, je continue de creuser la biographie de Maupassant, un de mes écrivains préférés. Je dois dire que je n'ai pas vraiment retrouvé le Maupassant que j'aime dans Mont-Oriol, avec son élégance typique du XIXe, son lyrisme et sa noirceur cosmique... Stylistiquement, ce roman m'a semblé vraiment en-dessous de ses autres œuvres. Mais il est très intéressant parce qu'il présente la construction d'une ville d'eau via un vaste et subtil enchaînement de magouilles et d'ententes à demi-mot. La source découverte sur les terres des Oriol n'est peut-être pas bien miraculeuse, mais qu'importe si l'on peut convaincre des médecins en vue d'en dire le plus grand bien? En parallèle, une intrigue amoureuse se noue entre deux personnages situés au cœur de la machination, un vrai amour absolu qui occupe nos héros corps et âme et dont on devine d'emblée qu'il est voué à l'échec (sinon ce ne serait pas du Maupassant). En bref, un roman intéressant, certes plaisant à lire car c'est tout de même très bien écrit, mais pas le chef d’œuvre de l'auteur.

Lisez plutôt...
Contes fantastiques (1875-1890)
Clair de lune (1883)
La Main gauche (1889)

mardi 7 juillet 2015

Jézabel (1936)

Au milieu des années trente, une femme d'une grande beauté est jugée pour meurtre: elle a froidement abattu son amant, un homme plus jeune qu'elle. Les témoins se succèdent, les faits ne font pas de doute et le verdict est prononcé. Les spectateurs quittent la salle et passent aussitôt à autre chose. La belle accusée est déjà de l'histoire ancienne.


Après une cinquantaine de pages sur le procès, Irène Némirovsky entre dans le vif du sujet en retraçant le parcours de Gladys Eysenach, depuis son entrée dans le monde aisé du début du XXe ("une enfant qui avait dansé pour la première fois à Londres, au bal des Melbourne, par un beau soir de juin depuis longtemps passé") jusqu'à ce moment fatidique où, bien plus tard, après une vie de mondaine marquée par le plaisir mais aussi par le malheur, elle a fait feu sur le jeune Bernard Martin. Comment une obsession superficielle, mais si compréhensible, peut-elle se mettre en place dans la vie d'une femme qui a tout pour elle? Comment l'angoisse peut-elle prendre le dessus de tout autre sentiment? La vie de Gladys a été marquée et écrite par sa beauté ("dont l'éclat effaçait la beauté de toutes les rivales") et la séduction que celle-ci lui offrait dans un monde insouciant dédié aux bals et aux flirts, où l'argent coule à flots et où les femmes n'ont qu'une chose à faire: précisément être belles et séduire. Mais cette beauté a un ennemi implacable: le temps. Si Gladys est horrifiée par la vieillesse des autres, elle est surtout paniquée à l'idée d'être un jour elle-même celle dont on dira qu'elle "a été belle"...

Jézabel n'égale pas Suite française du même auteur, mais est néanmoins un beau roman sur un personnage complexe, saisi avec une grande justesse par une plume simple et élégante, parfaitement adaptée. Outre la solitude et le vieillissement, qui sont les thèmes principaux, j'ai aussi cru y voir une critique voilée de la place de la femme (oisive) dans la (haute) société: Gladys est certes un cas extrême, mais dans son milieu les femmes n'ont de place que tant qu'elles sont jeunes et belles. Une fois passés les quarante ans, elle ne sont plus que "la mère de" et l'on parle d'elles au passé.

Cela m'a beaucoup fait penser à Gatsby le Magnifique de Fitzgerald et à Daisy, notamment quand elle souhaite à sa fille d'être une petite sotte car c'est ce qui peut arriver de mieux à une femme... Comme pour Daisy, d'ailleurs, j'ai un peu eu envie d'étrangler Gladys, mais il faut se resituer dans le contexte de l'époque et ne pas juger avec notre regard du XXIe, époque à laquelle nous avons malgré tout des horizons autrement plus larges.

En définitive, un beau et triste roman très bien écrit qui fait réfléchir sur le passage du temps. Je recommande.

Livres de l'auteur déjà chroniqués sur ce blog

samedi 4 juillet 2015

The Hobbit Location Guide

Chronique express!



Quel beau coup marketing! Les films de Peter Jackson ayant fait exploser le tourisme en Nouvelle-Zélande, pourquoi ne pas pousser le concept jusqu'au bout et proposer un guide de voyage présentant les lieux de tournage du Hobbit? Et bien c'est chose faite par Ian Brodie, qui avait apparemment déjà réalisé le même projet pour Le Seigneur des Anneaux. The Hobbit Location Guide est précisément un guide proposant de nombreuses visites de lieux utilisés dans Le Hobbit, que ce soit (évidemment) Hobbiton ou un champ, une rivière ou un bout de montagne à l’autre bout du pays. Avec de très belles photographies d’une nature sauvage et préservée, il fait vraiment rêver et donne vraiment envie de voyager (pas forcément aussi loin par manque de sous, mais au moins quelque part). On n’apprend pas grand-chose sur les films et le ton est parfois un peu béat, mais ce n’est pas bien grave… Je regretterais juste que l’accent ne soit jamais mis sur la randonnée équestre, qui est à peine citée deux ou trois fois alors qu’elle me semble une méthode de voyage incroyablement adaptée à la beauté des lieux. À lire pour rêver les yeux grands ouverts.




Allez donc voir ailleurs si ce photographe y est!

mercredi 1 juillet 2015

La gamelle de juin 2015

Le mois de juin a progressivement marqué le retour à un rythme professionnel normal. Je manque toujours de temps pour lire mais je ne travaille plus sept jours sur sept! :) C'est aussi le mois où j'ai découvert le yoga, ce qui m'a permis de sortir un mythique et très justifié "Je peux pas, j'ai yoga" à un pote qui organisait une soirée! \o/

Sur petit écran

Rien. ^^

Sur grand écran

À la poursuite de demain de Brad Bird (2015)
Un film de SF grand public très réussi et très positif avec une héroïne vraiment intelligente et débrouillarde qui ne vit pas d'histoire d'amour, n'est jamais mise en avant pour son physique – elle se balade en jean, en sweat informe et avec une casquette de baseball – et n'est même pas le seul personnage féminin du film puisqu'elle reçoit l'aide d'une petite fille, c'est assez rare pour être souligné. Ajoutez un message positif sur la prise de décision individuelle, la valorisation de l'intelligence et de la science, un peu d'humour et un sens de l'émerveillement vraiment démesuré... J'aime tellement Disney. ♥

Jurassic World de Colin Trevorow (2015)
LE film tant attendu et tant redouté!!! Au final, un bon moment de rigolade qui ne se prend pas excessivement au sérieux et qui se fait facilement pardonner sa démesure un peu ridicule. Avec autant de clins d'oeil au premier film, de toute façon, il me caressait vraiment dans le sens du poil... ^^ Comme tous les films d'action du moment, il est rempli d'incohérences, mais si on l'accepte en tant qu'amusement pur il est tout à fait efficace. Notons que le personnage de Bryce Dallas Howard est plus présent et utile que la bande-annonce ne le laissait craindre.

Spy de Paul Feig (2015)
Un film d'espionnage comique et parodique qui marche plutôt bien sur une discrète employée de la CIA en surpoids flagrant qui part pour la première fois sur le terrain, l'identité des autres agents étant compromise. Il y a des passages lourds et je me suis parfois demandée si le film n'était quand même pas, au fond, moqueur contre les gros, mais il n'empêche qu'on ne voit ni de gros héros ni de femmes espionnes tous les jours et que ce film a donc quelque chose de révolutionnaire! :D Il est en tout cas bien drôle et la performance de Jason Statham est hilarante.

Vice-Versa de Peter Docter (2015)
Encore une victoire de Pixar avec ce dessin animé plutôt fin et très amusant sur les différentes émotions qui occupent le cerveau d'une petite fille de onze ans. J'ai adoré Tristesse et Peur et évidemment hautement désapprouvé Joie. J'ai fondu en larmes au quart de tour lors de la scène que je ne citerai pour ne pas spoiler; l'émotion était telle que le lendemain j'ai dû aller m'isoler à l'imprimante car je me mettais à chialer sur l'ordi au boulot. En plus le film est plein de petites infos simplifiées mais réelles sur le cerveau, ce qui en fait aussi un truc intelligent pour éveiller les gosses au monde. Et en plus il y a une licorne arc-en-ciel. Bref, un film très réussi, qui a cependant pour moi un gros bémol: je n'aime pas du tout les graphismes...

Du côté des séries

Plein d'épisodes de la saison 5 d'Arabesque; un épisode de la saison 2 de l'Inspecteur Barnaby; deux ou trois épisodes de la saison 2 de Penny Dreadful.

Le reste

Bein j'ai lu mon Cheval Mag, comme tous les mois. ♥