Deuxième tome de la trilogie de Troie après Lord of the Silver Bow, Shield of Thunder est également le dernier livre entièrement réalisé par Gemmell lui-même et le premier à être publié après son décès, l'auteur étant mort deux mois avant la publication. C'est sa femme Stella qui a bouclé la trilogie l'année suivante.
Sans surprises, j'ai adoré ce deuxième tome, que j'ai trouvé juste trop bien et trop génial, et qui m'a fait sérieusement penser que j'avais affaire à ce que Gemmell a fait de mieux, avant même Légende, que j'aime pourtant d'amour.
Comme dans le premier tome, on suit principalement trois personnages qui se rencontrent sur la Méditérannée: Piria, une prêtresse en fuite qui se rend à Troie pour retrouver son grand amour; et Kalliades et Banokles, deux soldats mycènes hors la loi, qui tentent d'échapper à la colère d'Agamemnon. Ces deux personnages étaient apparus à la toute fin du premier tome et j'ai adoré les voir prendre de l'épaisseur ici.
Cependant, on passe aussi beaucoup de temps avec d'autres personnages. Odysseus a droit à pas mal de chapitres, ce qui était vraiment fort plaisant vu que c'est le personnage le plus réussi de la série. On retrouve Andromaque que j'avais adorée et on rencontre Achille qui est particulièrement désagréable, tout comme les trois quarts des alliés d'Agamemnon.
Des intrigues secondaires du premier tome prennent une importance décisive: le passé de Gershom qui lui permet de faire intervenir un certain Prophète pour soigner son maître (et lancer ainsi un aspect historique que je n'avais absolument pas vu venir et que j'ai extrêmement hâte de lire); et surtout ce que Odysseus a fait pour protéger Helikaon des années plus tôt va soudain prendre une importance primordiale et précipiter la guerre de Troie.
Gemmell m'a d'ailleurs fait beaucoup de peine en donnant un tel relief à Odysseus pendant la toute première partie, seulement pour qu'on bascule aux deux tiers dans la séparation irréparable entre les deux camps. Priam, trop sûr de lui et de son fils imbattable, trop persuadé que sa ville est indestructible, est finalement victime de sa vanité et se fait un ennemi du roi qu'il ne fallait surtout pas faire basculer du côté d'Agamemnon. Et les amis d'hier finiront par s'entretuer demain...
J'ai bien sûr retrouvé quelques tics gemmelliens, comme la bonne vieille prophétie auto-réalisatrice, les éternelles considérations sur la peur, la mort, la barbarie et le sens de la vie, le sauvetage in extremis d'un combat désespéré... Mais tout ceci est amplement compensé par ces personnages et ces guerriers plus grands que nature, au premier rang desquels Banokles est décidément mon chouchou et m'a beaucoup rappelé Titus Pulo de la série Rome; et c'est la première fois que je rencontre un élément religieux lié à notre monde (via Gershom) et, surtout, si je ne me trompe pas, des personnages homosexuels et bisexuels.
En bref, j'ai adhéré corps et âme à ce roman, que j'ai fini au péril d'une nuit de sommeil pourtant précieuse, et ma seule véritable critique concerne l'accélération très marquée du rythme dans la troisième partie: les chapitres se font plus courts, l'action plus rapide, et on pourrait presque croire qu'on lit le plan du roman plutôt que le roman abouti lui-même. Ce qui est dommage en soi, mais amène à finir le livre en mode encore plus hystérique que précédemment tellement il se passe de choses.
Je redoute un peu de passer à Fall of Kings et de clore la trilogie. Stella Gemmell l'a terminé en se servant des notes de son mari: le changement de plume va-t-il se faire sentir? L'intrigue tiendra-t-elle la route? Mais, surtout, on sait comment s'est terminée la guerre de Troie, et je n'ai pas du tout hâte de voir la défaite et la mort engloutir tous ces personnages que j'ai aimés... :'(