samedi 20 juillet 2024

Chien 51 (2022)

Après Eldorado, que j'ai trouvé brillant, je me suis empressée de chercher du Laurent Gaudé sur mon chemin. J'ai eu la chance de trouver La Mort du roi Tsongor dans jenesaisplus quelle boîte à livres, et j'ai emprunté Chien 51 en bibliothèque. Le prêt en bibliothèque étant limité dans le temps, j'ai commencé par là.

La couverture, superbe, est créditée au nom de Xiaohui Hu.

L'histoire se passe dans une mégalopole futuriste appartenant à une entreprise, GoldTex. La ville est divisée en trois zones, de la plus riche à la plus pauvre, et le personnage principal, Zem Sparak, est un policier de la zone 3, la plus pourrie. Dans une autre vie, il était grec. Mais un jour, la Grèce a été rachetée par GoldTex. La population a été déplacée. Zem a changé de vie, est devenu policier. Un "chien", ainsi surnommé parce qu'il flaire partout. Un beau jour, il est mis en binôme avec une inspectrice de la zone 2 pour résoudre un meurtre sordide, qui pourrait avoir un lien avec un trafic d'implants.

Comme les autres romans de Laurent Gaudé que j'ai lus, ce livre parle essentiellement des inégalités sociales. Magnapole, le genre de ville ultra hiérarchisée que la SF affectionne, est une scène parfaite pour dénoncer le traitement de certains citoyens de seconde zone et aborder la question de la puissance des entreprises jouant à armes égales avec les États, voire, ici, les rachetant. Et franchement, tous les souvenirs du protagoniste font froid dans le dos tellement ils résonnent avec la crise grecque et l'échec cuisant de bien des luttes. Cela m'a rappelé L'ombre de ce que nous avons été, dans lequel Luis Sepulveda met en scène d'anciens militants chiliens; je ne me souviens pas des détails, si ce n'est que ces hommes ont été vaincus par la torture, l'exil et le temps et ne sont plus, dans leur vieillesse, que l'ombre des jeunes d'autrefois. (D'où le titre du bouquin.)

Dans ce décor totalement déprimant (notamment lorsque Zem profite d'un casque de réalité augmentée pour juste voir Athènes telle qu'elle était... C'est à pleurer...), Laurent Gaudé met en scène une enquête assez classique, avec ses deux enquêteurs que tout sépare mais qui vont devoir apprendre à travailler ensemble, ses informateurs, ses pourris, ses réseaux. De ce point de vue, cela m'a rappelé les romans de Rosa Montero sur Bruna Husky, dans lequels le contexte science-fictif est certes intéressant, mais n'est pas le fond du sujet, puisque l'idée est essentiellement de savoir qui a tué Machin et pourquoi.

Chien 51 m'a moins marquée que Eldorado, voire relativement peu marquée de manière générale, mais ce qui est cool, c'est que Laurent Gaudé nous dit quelque chose et nous happe même quand il n'est pas à son meilleur, ce qui est fort admirable. Et je l'ai trouvé très intéressant, humble, lucide et pourtant encourageant dans l'épisode de C'est plus que de la SF consacré à Chien 51. Bref, je l'adore. 🥰 Je vais juste laisser passer plus de temps avant de lire La Mort du roi Tsongor, de peur que ses écrits perdent de leur force si je les lis de manière trop rapprochée.

Autres livres de l'auteur déjà chroniqués sur le blog
Le Soleil des Scorta (2004)
Eldorado (2006)
Ouragan (2010)

10 commentaires:

  1. Ça va dans le sens de ce que je crois me souvenir des chroniques (mitigées) de blogueurs à sa sortie : c'est un roman qu'il ne faut pas lire dans l'idée de lire un récit de SF. Et ta comparaison avec Rosa Montero confirme totalement cela.
    Du coup, étonnamment, si un jour je veux lire l'auteur je ne commencerai pas par celui-ci je pense. Heureusement, pour choisir il y aura bientôt toute la bibliographie de Laurent Gaudé chroniquée sur ce blog. ^^

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    1. @Baroona: Je suis complètement dans l'impasse, ma pile à lire se compose pour 40% de Laurent Gaudé et Antoine Bello et, dans les deux cas, je ne veux pas les lire trop vite, de peur de me lasser 😁

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  2. Ca a une vibe Rosa Montero en effet. Comme Baroona, je ne commencerais sans doute pas l'azuteur par celui-ci, même si je suis moins réfractaire que d'autres lecteurs spécialisés SF à la SF écrite par des autres de litt gé.

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    1. @Tigger Lilly: C'est un bon mélange de policer et de SF 😊 On sent plus le message politique dans le contexte de la ville, toutefois.

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    2. Mon message est bourré de fautes XD Mes excuses. *s'en va chercher une définition à azuteur"*

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    3. @Tigger Lilly: Ahah t'inquiètes, c'est une faute de frappe trop mignonne!!

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  3. Du coup c'est plus une enquête avec un décor de SF si je comprends bien. Ca a tout de même l'air bien sympathique, c'est noté chez moi !

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    1. @Shaya: Oui, c'est quand même essentiellement un policier. Mais il y a aussi ce décor SF qui est parfaitement cohérent avec ce que j'ai lu d'autre de l'auteur. J'espère que tu aimeras!

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  4. Tout le monde veut que je le lise celui-là mais j'ai un peu peur d'être l'habituée de la SF qui râle pendant toute la lecture alors je vais m'abstenir 😂

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    1. @Vert: Ah dommage, j'aurais bien aimé avoir ton avis aussi! Mais j'espère que d'autres y viendront!

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