Chronique express!
Après la déception des Armoires vides, il me restait un livre d'Annie Ernaux dans ma pile à lire: Journal du dehors. Par bonheur, il m'a énormément plu et a confirmé tout le bien que je pense de cette grande écrivaine. Ce court ouvrage d'une centaine de pages, écrites dans une police plutôt grande, rassemble de menus évènements auxquels Annie Ernaux a assisté entre 1985 et 1992: rencontres dans le RER ou le métro, conversations entendues au supermarché... Il s'apparente à un journal intime, sauf qu'elle n'y note pas ce qu'elle fait et pense, mais ce que font et pensent d'autres personnes. D'où le titre, Journal du dehors.
Pour moi, une partie du plaisir de lecture a découlé du fait qu'Annie Ernaux parle de la banlieue parisienne, plus précisément de Cergy Pontoise. Je n'habite pas Cergy, mais une autre ville nouvelle d'Île-de-France, et je me suis retrouvée dans ces descriptions, à commencer par l'absence de traces du passé dans ces villes sorties de terre très récemment. Certaines choses ont déjà changé depuis les années quatre-vingt, mais l'essence des lieux reste la même. Au-delà de cela, j'admire la capacité d'Annie Ernaux à voir le monde; avant d'écrire, elle a senti ces choses, elle a saisi ces petits riens qui en disent long. Une cliente qui consteste son ticket à la caisse du supermarché, deux amies qui parlent fort dans le RER, un homme qui ramasse les caddies sur le parking avant l'introduction des caddies à pièces (who knew?)... C'est le quotidien, ça n'a aucun intérêt, mais ça en dit long sur la société et sur l'humanité. Et après avoir vu cela, Annie Ernaux l'exprime avec une netteté admirable. Parfois, c'est atroce – un paragraphe sur l'excision, à peine six lignes probablement, et j'ai dû m'arrêter de lire –, mais on n'en attend pas moins d'une autrice engagée comme elle l'est. Je recommande chaudement, surtout si vous êtes banlieusard; c'est bien la seule fois où le RER a sa place en littérature. 🤪
Pour moi, une partie du plaisir de lecture a découlé du fait qu'Annie Ernaux parle de la banlieue parisienne, plus précisément de Cergy Pontoise. Je n'habite pas Cergy, mais une autre ville nouvelle d'Île-de-France, et je me suis retrouvée dans ces descriptions, à commencer par l'absence de traces du passé dans ces villes sorties de terre très récemment. Certaines choses ont déjà changé depuis les années quatre-vingt, mais l'essence des lieux reste la même. Au-delà de cela, j'admire la capacité d'Annie Ernaux à voir le monde; avant d'écrire, elle a senti ces choses, elle a saisi ces petits riens qui en disent long. Une cliente qui consteste son ticket à la caisse du supermarché, deux amies qui parlent fort dans le RER, un homme qui ramasse les caddies sur le parking avant l'introduction des caddies à pièces (who knew?)... C'est le quotidien, ça n'a aucun intérêt, mais ça en dit long sur la société et sur l'humanité. Et après avoir vu cela, Annie Ernaux l'exprime avec une netteté admirable. Parfois, c'est atroce – un paragraphe sur l'excision, à peine six lignes probablement, et j'ai dû m'arrêter de lire –, mais on n'en attend pas moins d'une autrice engagée comme elle l'est. Je recommande chaudement, surtout si vous êtes banlieusard; c'est bien la seule fois où le RER a sa place en littérature. 🤪
"Dans Libération, Jacques Le Goff, historien: "Le métro me dépayse." Les gens qui le prennent tous les jours seraient-ils dépaysés en se rendant au Collège de France? On n'a pas l'occasion de le savoir."
"Un caddie renversé dans l'herbe, très loin du centre commercial, comme un jouet oublié."
Tiens mon père m'a fait une réflexion de ce genre sur le métro il y a quelques temps. Il a toujours été au taf en voiture et depuis qu'il est retraité, il a une carte stib senior (ça coute pas grand chose) et donc prend le metro de temps en temps maintenant.
RépondreSupprimerCa a l'air drôlement bien en tout cas.
@Tigger Lilly: Oups, moi aussi j'ai fait une réflexion du genre dans ma vie, c'est pour ça que ce passage m'a sauté aux yeux 🙃 Je pense que tu apprécierais le livre.
SupprimerIntéressant, c'est effectivement pas courant un texte qui laisse sa place aux transports en commun ^^
RépondreSupprimer@Vert: Et des transports en commun pas franchement sexys! Car des livres avec des trains de luxe ou mythiques, il y en a eu. Mais un bon vieux RER à l'heure de pointe, hein?
SupprimerÇa fait un bon livre d'Histoire en même temps, de la petite Histoire, ça sera encore plus frappant en le lisant dans quelques (dizaines d')années.
RépondreSupprimerIl t'en reste à lire de l'autrice hors-PàL ?
@Baroona: Oui, je pense qu'il faudra que je le relise dans vingt ans pour voir. Je compte acheter Passion simple la prochaine fois que j'achète un livre d'elle. Marilyne l'avait mentionné en commentaire d'un de mes billets précédents.
SupprimerC'est original en effet comme roman !
RépondreSupprimer@Shaya: Oui! D'ailleurs, ce n'est pas un roman, du coup – "juste" des bribes de vie d'inconnus.
SupprimerJe ne suis pas banlieusard, et j'ai lu Les armoires vides il y a très longtemps sans que cela ait marqué ma mémoire.
RépondreSupprimer@Le chien: J'ai justement été très déçue par les Armoires vides, que j'ai trouvé difficile à suivre. Il me semble que ses autres textes sont nettement supérieurs.
SupprimerC'est bien les instants de vie comme ça. Il faut avoir envie d'observer, entendre sans voyeurisme, juste pour laisser une trace des autres quelque part.
RépondreSupprimerCela me plaît et me donne envie de le lire.
@Ite: C'est assez fascinant. Les gens disent beaucoup sur eux, même quand ils ne s'en rendent pas compte.
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