Un écrivain de polars en manque d’inspiration retourne dans la maison de sa grand-mère décédée afin d’y faire du tri. Dans le petit village où rien n’a changé, il retrouve des souvenirs d’enfance et se souvient notamment d’une légende locale, celle du Vert-de-Lierre, un être végétal qui volerait l’essence vitale de ses victimes. Il décide de visiter le château où serait née la légende et est témoin d’une apparition mystérieuse. Une Anglaise dissimulé par une voilette s’est installée au village et attise les commérages…
Vert-de-Lierre de Louise Le Bars a d’abord été publié en
auto-édition. La version que j’ai lue est celle publiée ensuite par la maison
Noir d’absinthe, avec une couverture (superbe) de Marcela Bolivar et un blurp en quatrième de couverture proposé par rien
moins qu’Amélie Nothomb!
Ce roman reprend pas mal de codes du roman fantastique et
gothique, comme le fait qu’une partie du récit est constituée des écrits de
certains personnages, essentiellement le roman écrit par Rose, la jeune femme
qui partage la maison de la mystérieuse Anglaise. On a aussi la grande maison
de campagne entourée de son jardin luxuriant, où l’on se balade la nuit au
clair de lune…
Étant friande ce genre d’histoire, je suis rentrée dedans
sans aucune difficulté, d’autant que Louise le Bars écrit bien, avec une plume
élégante, riche et facile à lire à la fois. Le style n’est pas parfait (si tant
est que la perfection existe, merci de ne pas m’étrangler dans les commentaires
😉) et sa richesse même laisse deviner le jeune
auteur un peu naïf face au brillant de certains termes, mais ça reste agréable
à lire et ça colle bien à l’ambiance un peu surannée de l’histoire, très
tournée vers le passé. La progression est un peu scolaire, mais tout ça marche
bien; on n’a pas un chef d’œuvre, mais pour un premier roman, c’est pas
mal du tout.
Ce qui m’a moins plu, c’est l’impression que tout ceci
m’aurait plus parlé il y a quinze ans, voire vingt, quand je rêvais moi aussi
de jeunes filles mystérieuses entrevues dans un jardin ou fuyant dans la forêt,
et une certaine lassitude, de ma part, envers un élément que je commence à
considérer comme un poncif ([divulgâcheur] la protagoniste du roman de Rose a
été accusée de sorcellerie et internée en asile psychiatrique; loin de
moi de contester les persécutions dont ont été victimes les femmes en raison de
leur sexe, hein, mais bon, c’est comme quand le méchant est un nazi, ça ne me
fait pas crier à l’originalité et à l’engagement politique [fin du
divulgâcheur]). S’est ajoutée à cela une tristesse diffuse en constatant que ce
qui me parlait, ou plutôt me définissait, à un certain âge s’est
totalement dissous dans le découragement et l’indifférence; j’ai
tellement VOULU être le genre de personne qui écrit ce genre de bouquin, ou son
équivalent dans un univers de fantasy, et maintenant il n’en reste rien dans ma
vie. Aux alentours de la trentaine, j’en ressentais au moins le manque,
j’éprouvais de la frustration et de la jalousie. Ce n’était pas agréable, hein,
mais c’était quelque chose. Maintenant, il n'y a même plus ça. Il n’y a rien.
Alors certes, je souffre moins, car passer ses journées avec la frustration et
la jalousie n’a rien d’agréable. Mais c’est l’encéphalogramme et le
cardiogramme plats. Je n’ai plus de rêves et je n’ai plus d’imagination. Je
n’ai rien du tout.
Mise à jour: j'ai rédigé le présent billet à chaud, le jour après avoir fini de lire ce roman, et j'ai sorti le dernier paragraphe en toute honnêteté. Normalement, j'efface ce genre de chose lors de la relecture. Là, exceptionnellement, je laisse, car je pense que ce serait bien que je me souvienne d'avoir pensé ça sur le coup. Si jamais vous vous êtes inquiétés, rassurez-vous: je ne pense pas du tout, à temps plein, que "je n'ai rien du tout" dans ma vie. Il n'y a pas d'écriture, certes, mais il y a d'autres choses. Je ne peux toutefois m'empêcher de regretter d'être devenue l'adulte que je suis, et je constate quotidiennement que je trahis la fille que j'étais à quinze ans...