mercredi 16 avril 2025

L'Impératrice de Pierre, tome 1 (2019)

En 1727, alors qu'elle agonise dans son lit, Catherine Ire, impératrice de Russie, écoute l'horloge battre les coups. Douze coups, douze heures, douze chapitres durant lesquels elle se remémore son parcours...

Et quel parcours. Née en 1684 en Livonie, une région qui semble correspondre à une partie des États Baltes actuels et qui était à l'époque sous domination suédoise, Catherine perd ses parents très jeune. Elle est recueillie par une tante, qui l'envoie ensuite travailler comme domestique (on pourrait presque dire comme esclave) dans une famille de Marienburg, également suédoise à l'époque. Ça ne se passe pas bien pour Catherine, dans l'ensemble. Puis elle est mariée à un soldat suédois, et, moins d'une semaine après, les Russes prennent la ville et massacrent à peu près tout le monde.

Catherine est emmenée par un officier qui la viole quotidiennemnet. Par la suite, toutefois, elle atterrit entre les bras du prince Alexandre Danilovitch Menchikov. Et grâce à lui, elle rencontre Piotr Alekseïevitch Romanov, le tsar qui veut moderniser et occidentaliser la Russie autant qu'il veut en étendre le territoire et la poser sur l'échiquier international. Le tsar qui préfère se faire appeler Peter, la version allemande de son prénom, et qui est entré dans l'histoire sous le nom de Pierre le Grand, fondateur de Saint-Petersbourg...

Bon, franchement, cette histoire est totalement dingo. La petite noble lituanienne de rien du tout qui traverse les tumultes de la guerre pour finir entre les bras d'un prince russe, puis du tsar en personne, c'est totalement dingo. Mais ce qui est encore plus dingo, c'est que le tsar l'a épousée, cette maîtresse-là, et qu'elle lui a succédé lorsqu'il est mort!!!!! 🤯🤯🤯

Kristina Sabaliauskaitė, autrice lituanienne, donne la parole à Catherine pour raconter ce parcours hors du commun et un caractère qui l'est tout autant. Tout cela est forcément pas mal romancé pour ce qui est des détails (par exemple, je doute que les archives nous apprennent que Catherine a découvert le plaisir sexuel avec Mechikov), mais les grandes lignes correspondent bien à la réalité (ou en tout cas à ce que Wikipédia m'en apprend). J'ai adoré découvrir cette époque turbulente, cette guerre de vingt ans entre la Suède et la Russie, durant laquelle la Pologne tient un rôle important, et où l'Empire Ottoman pointe aussi le bout de son nez. J'ai fait toute ma scolarité en France et on ne m'a pratiquement jamais parlé de l'Est, mais il y a autant de périodes palpitantes à découvrir, autant de familles royales et d'alliances éphémères, autant de palais somptueux, autant de familles aux ramifications impossibles à retenir (d'autant plus que, en bons Russes, les trois quarts des personnages de ce roman ont quatre diminutifs, lol!). Il y avait un monde entier qui n'avait, en fait, rien à envier à l'Europe occidentale pour ce qui est du pognon des riches. Sous d'autres aspects, en revanche, la Russie des années 1700-1710 semble effectivement très éloignée des standards européens, plutôt comme certains pays mulsulmans aujourd'hui. Par exemple, les femmes vivaient très confinées, et l'une des innombrables raisons pour lesquelles Pierre était appelé l'Antéchrist était qu'il faisait asseoir les femmes aux mêmes tables que les hommes...

Le roman se termine à huit heures du matin, alors que Catherine vient de se remémorer son mariage officiel avec Pierre, après un premier mariage organisé en secret. Nous sommes donc en 1712. Mais son histoire ne s'arrête pas là!!! Deux ans après avoir publié ce premier tome, Kristina Sabaliauskaitė a publié le deuxième, que j'ai déjà en ma possession et que je me réjouis immensément de lire bientôt. Franchement, le seul défaut que j'y ai trouvé, c'est le rôle prépondérant du sexe dans la vie de Catherine, d'abord par le viol puis comme outil de survie. Mais bon, j'imagine que ce n'est pas invraisemblable: une femme de rien du tout qui n'avait aucune alliance, elle devait sécuriser sa place comme elle le pouvait, quand elle en avait l'occasion.

Pour finir, un mot sur cette édition de la Table Ronde: le grand format est absolument superbe, avec titre doré en couverture et marque-page assorti. Un régal. C'est juste un peu dommage qu'il soit fragile: le simple fait de retirer l'étiquette du prix a laissé une marque sur la quatrième de couverture.

Pourquoi ce livre, me demandez-vous?
Mais parce qu'il est traduit du lituanien par Marielle Vitureau, bien sûr!!! Je vous ai déjà parlé d'elle parce qu'elle a écrit le Dictionnaire insolite des pays baltes et parce que c'est grâce à elle que j'ai lu La Saga de Youza de  Youozas Baltouchis. Je ne peux, bien sûr, pas évaluer sa traduction en tant que telle, vu que je ne lis pas le lituanien, mais la version française est un régal et se lit toute seule!!! 375 pages au grand format et je l'ai lu en cinq jours, dont deux où je n'ai pas lu, en fait, donc en trois jours de lecture réelle!!! Une rareté!!!

7 commentaires:

  1. Ca a l'air absolument génial ! Quelle histoire incroyable. J'allais te dire que je l'avais étudiée en cours mais je pense ça devait plutôt être sa fille?, Catherine 2 dans le cadre de l'étude du siècle des lumières, elle a eu son importance.
    C'est une bonne maison d'édition la Table Ronde, c'est chez eux qu'est paru le fameux livre Marie Toft ou la reine des lapins. J'ai un très bon a priori tant ce livre était génial.

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    1. @Tigger Lilly: Alors, comme je n'ai retenu aucun prénom des dix mille enfants de Catherine Ire, j'ai demandé à Wikipédia, qui m'informe que Catherine II est née en Pologne et est arrivée sur le trône russe par le mariage. Elle a épousé un petit-fils de Pierre le Grand. Pas de lien de sang avec Catherine Ire, donc. Mais tu as bien dû l'étudier dans le cadre des Lumières, car elle correspondait avec Voltaire et Diderot... Rien que ça! Ça ferait encore une biographie formidable à lire.
      Ah, mais je m'en souviens, de la reine des lapins! Ça avait l'air dingue!!

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  2. C'est vraiment l'exemple-type de l'adage qui dit que la différence entre la réalité et la fiction, c'est que la fiction doit être crédible, elle. Quelle vie improbable.

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  3. Effectivement, elle a eu un destin improbable ! Je ne la connaissais pas non, merci pour cette découverte.

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    1. @Shaya: Avec grand plaisir! Je me réjouis de la retrouver bientôt pour le deuxième tome!

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