vendredi 30 mars 2012

Mister Ed

En janvier, je vous proposais de découvrir le générique de la série Mister Ed ici. Je viens de finir de regarder la première saison et je suis absolument enthousiaste.

Mister Ed a été diffusé aux États-Unis de 1961 à 1966. C’est l’histoire de Wilbur et Carol Post, un jeune couple qui emménage dans sa nouvelle maison. Or, il se trouve que les anciens propriétaires ont laissé un cheval dans la grange, et que ce cheval parle. Il s’appelle Ed. Mais il ne parle qu’à Wilbur.

Wilbur Post et Mister Ed

Le fait que Ed refuse fermement d’adresser la parole à tout autre être humain est un des éléments comiques de la série, car cela donne lieu à toutes sortes de quiproquos et de situations embarrassantes. Par exemple, pendant des vacances au Mexique, Ed voit quelqu’un délibérément abimer la voiture de Wilbur. C’est le mécanicien local et son but est de se faire payer pour réparer la voiture endommagée. Ed dit à Wilbur ce qu’il a vu, et Wilbur refuse donc de payer le mécanicien, qui fait intervenir un policier.

Imaginez la conversation suivante:

Policier mexicain: Monsieur, pourquoi refusez-vous de payer les réparations?
Wilbur: C’est lui qui a abîmé ma voiture!
Policier mexicain: Et comment le savez-vous? Vous l’avez vu?
Wilbur: Non, mais mon cheval me l’a dit!

L’autre élément comique est constitué par le couple de voisins, les Addison. Roger et Kay s’aiment, fondamentalement, mais ils seraient tout à fait à leur place dans la série Scènes de ménage. Kay songe surtout à faire les boutiques avec l’argent de Roger, qui songe surtout à empêcher Kay de faire les boutiques avec son argent. J’ai adoré ce couple.

Kay et Roger Addison, mes héros

Mais venons-en au véritable héros de cette série, ED!!!

Mister Ed au téléphone

Ed est un beau palomino de sept ans. Il aime espionner les conversations téléphoniques de ses voisins, séduire les jolies juments et surtout, surtout, faire tourner Wilbur en bourrique! Un peu cynique, il a toujours une réplique bien cassante à la bouche. Il ne veut surtout pas travailler et il compte sur Wilbur pour s'occuper de lui et ne pas le laisser seul (d'où sa présence aux côtés des deux couples pendant leur vacance au Mexique et quelques petites tensions avec Carol, un peu agacée que Wilbur passe plus de temps avec son cheval qu'avec elle!). Mais il est aussi très cultivé, et il dispose d’une tellement belle voix qu’il va même enregistrer un disque! :)

La série a un petit côté désuet du côté du rôle des deux femmes, qui ne gagnent bien entendu pas d'argent et sont chargées de gérer la maison. Il faut imaginer Carol Post en train de faire le ménage et la cuisine sur ses talons de dix centimètres et amener son repas à Wilbur (qui a installé son bureau dans la grange) avec son petit tablier et son sourire immaculé! Mais je suppose qu'on peut difficilement critiquer une série réalisée il y a 50 ans pour cette vision datée de la parfaite épouse (et d'ailleurs, pour l'instant, aucune des deux n'est mère, pour mon plus grand bonheur!). J'ai été beaucoup plus gênée par les rires enregistrés.

Mister Ed et Carol Post

Bref, une très bonne série familiale et équestre, amusante et bien fichue, à tenter si vous avez envie de savoir ce que pense réellement un cheval! Les cinq premières saisons sont disponibles en DVD en zone 1.

Un grand merci à Marc Giraud, qui a cité cette série dans l'article "L'éthologie à la télévision" du Cheval Magazine de février dernier et m'a permis d'en découvrir l'existence, et à l'Homme, qui a eu l'excellente, adorable et judicieuse idée de m'offrir la première saison!

jeudi 29 mars 2012

De l'idéalisme

"Vous êtes une "idéaliste" -- et je traite, quant à moi, l'idéalisme comme une insincérité devenue instinct, comme la volonté à tout prix de ne pas voir la réalité : chaque phrase de mes écrits contient le mépris de l'idéalisme."

Friedrich Nietzsche
Lettre à Malwida von Meysenbug, 20 octobre 1888
(citée dans le hors-série "Friedrich Nietzsche, l'éternel retour" du Monde)

Ouf! Je ne suis pas la seule à constater que certaines personnes ferment grand les yeux (pour reprendre Kubrick) face à ce qui les dérange...

mardi 27 mars 2012

John Carter

Je suis allée voir John Carter pour plusieurs raisons. Déjà, je vais systématiquement voir les films dans lesquels il y a des épées, des guerriers et des "créatures alternatives", c'est-à-dire de grosses bêtes ou des peuples que nous ne côtoyons pas dans la vraie vie, et j'ai une faiblesse assumée pour les blockbusters américains dans lesquels il ne faut pas réfléchir. Ici, en plus, il y avait Ciarán Hinds, alors je ne pouvais vraiment pas le louper.


Résultat: j'ai adoré. J'ai rigolé comme une petite folle à cause de l'équivalent-toutou martien, j'ai souri devant la mise en abîme de l'histoire (car le film que nous voyons est en réalité le récit écrit par John Carter dans son journal et lu par son neveu Edgard Rice Burroughs -- si vous ne comprenez pas en quoi ceci est un clin d’œil, allez vite acheter Tarzan) et j'ai bavé devant la planète Mars et ses fascinantes créatures à six pattes.

Mais, surtout, j'ai vécu une des (désormais) rares crises d'hystérie de Moi et Moi.

Car John Carter, c'est un véritable revival de la série Rome.

Tout au début du film, lorsque Edgar Rice Burroughs arrive à Londres, c'est le notaire de John Carter qui le reçoit et lui parle de sa mort soudaine. Ce notaire, c'est Nicholas Woodeson, alias Posca dans Rome, l'esclave à tout faire de César.



Joie de votre dévouée blogueuse, toujours contente de retrouver des acteurs qui l'ont marquée dans d'autres films. Jusque là, à part Rome, je n'avais rencontré cet acteur que dans un épisode de L'inspecteur Barnaby.

Une fois que l'action déménage sur Mars, Ciarán Hinds, alias Jules César dans Rome, fait son entrée. Il joue Tardos Mors, chef de la ville d'Hélium et père de la princesse. Je commence à exulter car son rôle semble plus important que la bande-annonce ne le laissait penser (il y apparaît très précisément une seconde et demie).


Et là, alors qu'il débat avec ses officiers, Moi et Moi pètent les plombs.

Car son officier Kantos Kan, c'est JAMES PUREFOY. James Purefoy, c'est Marc-Antoine dans Rome, c'est Solomon Kane dans le film éponyme, c'est le croisé-héros dans Le sang des Templiers. Moi et Moi sommes FOLLES de James Purefoy.



Et ici James Purefoy retrouve Ciarán Hinds. Hystérie collective. Impossible de tenir intérieurement en place après ça.


Ce matin, en errant sur IMDB, je découvre en outre que c'est Polly Walker, alias Atia dans Rome, qui fait la voix de Sarkoja, une Martienne à quatre bras. Youpi, youpi, youpi.

Je vous laisse avec quelques photos de la version romaine de ces Martiens.

Atia et Marc-Antoine.

Posca, Jules César et Lucius Vorenus.

Jules César.

Marc Antoine.

Morale: Je crois que je vais rapidement replonger dans Rome.

vendredi 23 mars 2012

Salon du Livre 2012

Cette année, je suis allée pour la première fois au Salon du Livre de Paris. J'ai en effet pu avoir un pass grâce à mon organisation professionnelle.


Je suis passée seule le vendredi matin, dans l'espoir d'échapper à la foule, puis je suis revenue le samedi après-midi avec Anne Quent.

D'une manière générale, j'ai trouvé qu'il y a bien trop de monde pour profiter pleinement des livres proposés. Et, de toute manière, à moins de s'y rendre avec un budget extrêmement élevé, je ne vois pas comment on peut ressortir de là sans être extrêmement frustré par l'impossibilité d'acheter TOUS les livres du Salon...

Par contre, c'est une bonne occasion de découvrir de nouvelles maisons d'édition et de redécouvrir qui appartient à qui (par exemple, les livres de la collection Bouquins appartiennent à Robert-Laffont). Et puis on entrevoit des auteurs, ce qui est toujours sympathique.

L'exposition sur DC Comics était assez risible, puisqu'elle consistait en une dizaine d'affiches. Intéressant, et sûrement passionnant pour les fans, mais le terme "exposition" m'a semblé décidément injustifié.

Hum! Baiser passionné entre Superman et Wonderwoman.
J'ignorais l'existence d'une romance entre ces deux personnages.
 
Dans un moment de lucidité dont j'ai été très fière,
j'ai su qui avait dessiné cette couverture de Batman.
Quand on pense à Johnson le Homard,
il ne peut s'agir que de Mike Mignola.

Vendredi matin, Philippe Delerm tenait une petite conférence sur La langue française de Molière aux SMS. Je ne suis pas restée longtemps, mais c'était intéressant et j'ai appris un détail amusant sur Du côté de chez Swann de Proust.
 

Samedi après-midi, les éditions Albin Michel ont provoqué un gros embouteillage au centre du Salon, Schmitt, Signol et Pancol dédicaçant au même endroit à la même heure. (Il ne manquait que Nothomb, je crois, pour provoquer une vague d'hystérie collective.) Avec des auteurs de cette envergure du point de vue des vente, cette maison d'édition doit extrêmement bien se porter!

 Eric-Emmanuel Schmitt est aussi bronzé dans la vraie vie qu'en photo!

Quant à Katherine Pancol, elle a l'air aussi gentille en vrai qu'en photo.

Vue la longueur de la queue, ils ont dû dédicacer extrêmement longtemps: respect.

De mon côté, je suis allée faire la queue pour acheter un bouquin de Michel Robert (l'écrivain, pas le cavalier) et le lui faire signer. Discussions sympathiques avec la fille devant moi et le garçon derrière moi. Puis, prise de panique et d'émotion, j'ai déblatéré d'absurdes absurdités devant l'auteur, qui a néanmoins mis un mot sympathique dans mon exemplaire de L'Ange du Chaos. J'ose espérer qu'il a désormais l'habitude de rencontrer des gens un peu débiles pendant ses dédicaces. Pourtant, j'aurais aimé expliquer clairement pourquoi je trouve qu'il a un don pour nommer les choses et les peuples... Enfin, je possède désormais pour la première fois un livre dédicacé, ce n'est pas rien.


[Note pour plus tard: Prendre des calmants avant de me rendre à la dédicace d'un de mes auteurs favoris, car je risque de m'évanouir devant Anne Rice si je me mets dans un état pareil pour Michel Robert...]

Anne Quent est repartie avec un manga, et moi avec des hors-séries du Monde sur Freud, Nietzsche, Camus et Hugo, de quoi compenser un peu la frustration de ne pas avoir acheté tout ce qui me faisait de l’œil.

lundi 19 mars 2012

Les Gens de Dublin (1988)

Je viens de regarder le film Les Gens de Dublin (The Dead) de John Huston (le papa d'Anjelica). C'est une adaptation de la nouvelle Les Morts (The Dead), extraite du recueil Les Gens de Dublin (Dubliners) de James Joyce, un des écrivains irlandais les plus connus.


Je dois souligner que j'ai découvert ce film grâce à Anne Rice, qui en a posté un extrait sur Facebook juste après que j'ai relu Dubliners il y a environ un an. (Je vous conseille vivement de suivre Anne Rice sur Facebook, elle y est extrêmement active et on apprend plein de choses passionnantes.) Je n'ai pas plus apprécié Dubliners la deuxième fois que la première, mais ce film...

Ce film... Je sais à peine quoi en dire tellement je suis encore dedans...

C'est l'un des films les plus émouvants que j'aie jamais vus. Il y a une alternance entre gaieté et émotion qui transmet tout du long une mélancolie intense, puis une conclusion tellement triste, tellement posée, tellement belle avec cette neige qui se pose sur le paysage. Il est filmé tout en retenue, il ne s'y passe pas grand-chose, mais il y a tellement d'émotions subtiles et cachées qui font surface pendant juste une seconde ou deux. Et c'est une vision tellement réaliste de l'Irlande, ça m'a donné un tel cafard de l'accent irlandais et de Dublin... Je crois que je vais pleurer --intérieurement-- pendant une semaine.

Anjelica Huston est tout simplement exceptionnelle. Exceptionnellement belle, déjà, et exceptionnelle dans sa prestation. Je la hisse officiellement au même niveau que Cate Blanchett dans le palmarès de mes actrices préférées.


Je vais désormais essayer de creuser la filmographie de John Huston. Si tous ses films sont de cette même qualité, je vais passer de très bons moments cinématographiques.

jeudi 15 mars 2012

De Stephen King et des placards

Comme je le disais hier, j'ai adoré la nouvelle The Boogeyman (Le croque-mitaine) de Stephen King, dans laquelle ce même boogeyman, caché dans le placard, laisse la porte entrouverte quand il va et vient dans la chambre des enfants, en provoquant la terreur chez ses petits "colocataires".

Cette histoire de placard habité qui fait peur aux enfants m'a rappelé Cujo, un des rares livres de Stephen que j'ai lus. Cujo parle avant tout d'un chien --Cujo, justement-- et de ce qu'il lui arrive après qu'une chauve-souris l'ait mordu au nez. Mais il y a aussi un petit garçon de trois ou quatre ans. Ce petit garçon a peur de son placard. Il y a des odeurs bizarres de moisi et de putréfaction dans son placard. Ses parents pensent qu'il a tout simplement peur du noir. Mais le lecteur sait que la porte du placard s'ouvre toute seule lorsque la maison est vide...

Alors, Stephen King a-t-il la phobie des placards et de ce qui pourrait bien s'y cacher...?

Cette question --existentielle, soit dit en passant-- me ramène à une pensée qui m'a déjà traversé l'esprit: j'adore la littérature de l'étrange, de l'horreur et de la terreur (histoires de fantômes et de créatures gélatineuses et tentaculaires venues des confins de l'espace, me voilà!), mais qu'est-ce que je n'aimerais pas être un de mes auteurs préférés. Combien faut-il être hanté pour mettre sur papier des Cthulhu et des Boogeyman qui rampent dans les ténèbres et font tout juste assez de bruit pour qu'on sache qu'ils sont là? Je dors déjà le store entièrement relevé pour avoir de la lumière dans ma chambre pendant la nuit. Si mes peurs étaient assez précises pour créer un personnage bien déterminé, comme cela a été le cas pour un Lovecraft, un King ou un Le Fanu, je mourrais certainement d'un arrêt cardiaque.

mercredi 14 mars 2012

Danse macabre

Comme toujours lorsque je lis un recueil de nouvelles (exception faite, je pense, des recueils de Clark Ashton Smith ♥), j'ai trouvé Danse macabre (Night Shift) assez inégal. En outre, je ne l'ai franchement pas trouvé tellement enthousiasmant dans son ensemble.


J'ai trouvé certaines idées originales et sympathiques, notamment dans le cas des camions qui prennent d'assaut une station-essence et de l'irascible famille de pigeons territoriaux qui n'apprécient guère qu'un homme s'approche de leur nid situé au vingtième étage d'un immeuble. Mais le schéma des histoires est assez répétitif, on peut savoir d'emblée, une fois sur deux, quelle sera la fin en fonction du pronom personnel utilisé (le je survit, le il meurt), les femmes sont cantonnées à des rôles caricaturaux ou inutiles dans le fond et je n'ai pas trouvé la plume de Stephen King tellement remarquable.

(Je précise que, en écrivant ces lignes, je me demande quand même un peu: mais pour qui je me prends pour critiquer Stephen King?!? ^^)

Cependant, gros coup de cœur pour Le croque-mitaine (The Boogeyman), qui m'a fait délicieusement peur. C'est une histoire dans laquelle les portes de placard, que l'on avait refermées en sortant, sont ouvertes lorsqu'on revient dans une pièce. Entrouvertes. Mais à peine...

"The closet-door was open. Not much. Just a crack. But I knew I left it shut, you see."

Faites de beaux rêves...

mercredi 7 mars 2012

L'écuyer mirobolant (2010)


Dans L'écuyer mirobolant, Jérôme Garcin retrace la vie d'Étienne Beudant, militaire français devenu une sorte de maître à penser en équitation. Cavalier émérite né en 1863, il passe par Saumur avant d'être envoyé en Algérie, où il "reprend en main" tous les chevaux qui passent.


"Le plus souvent, à force de persévérance, d'équanimité, d'intelligence et de finesse, Étienne faisait des miracles. Il métamorphosait des carnes éteintes en athlètes brillants, les chevaux de bois en modèles de souplesse, les peureux en crâneurs, allongeait les brévilignes, élargissait les trapus, étendait les encolures trop courtes, rectifiait et musclait les dos creux, les poitrails mous, les épaules fatiguées, les jarrets compromis, retapait les plus faibles en les engraissant avec du fenugrec, finissait par obtenir, de juments destinées à mourir d'épuisement dans les brancards et à mourir au couteau, des changements de pied au temps, des pirouettes, des appuyers, parfois même un joli passage ou un piaffer royal."

Cet extrait est un bon exemple du style de Jérôme Garcin, qui arrive à faire de longues phrases remplies d'expressions équestres sans jamais s'y perdre. J'ai trouvé très agréable de le lire. Cependant, un non-initié pourra peut-être se noyer dans les figures et les défauts d'aplombs...

J'ai trouvé cette lecture assez triste, car l'histoire se passe en grande partie pendant les années vingt, trente et quarante, lorsque Étienne Beudant, infirme et abandonné par sa famille, vit seul dans les Landes avec quelques chevaux de propriétaire. La dernière jument qu'il a entièrement dressée, Vallerine, est partie à Paris sous la selle d'un autre cavalier, et Étienne ne montera plus après son départ. J'ai trouvé cette renonciation forcée à l'équitation très triste, décourageante, injuste. Mais le ton reste plutôt optimiste. À partir de là, Étienne Beudant s'est consacré plus que jamais à l'écriture, aussi bien pour répondre aux nombreuses lettres qu'il recevait que pour écrire ses propres livres (notamment Extérieur et haute école en 1923 et Mains sans jambes en 1945). (Ce dernier titre est une expression que tout cavalier a entendue plus d'une fois dans la bouche de son enseignant! ^^)

Le côté mélancolique de l'histoire ne m'a pas empêchée de beaucoup apprécier ce livre. Il est plein de considérations sur le dressage léger et aérien des chevaux et sur leur beauté, sans être sectaire (Étienne Beudant, par exemple, montait aussi les petits chevaux maghrébins que les Français considéraient comme "bons à riens"). Il déborde, en quelque sorte, d'amour du cheval.

Extrait de la quatrième de couverture de l'édition de poche de Folio, que ma librairie a exposé en pleine vue exprès pour me faire craquer: "Monter n'était plus alors une activité physique, c'était une pensée pure, un acte de foi."

mardi 6 mars 2012

Cheval de guerre (2011)

Un sentiment quelque peu mitigé pour le dernier Steven Spielberg, War Horse. Le moins que l’on puisse dire est que Steven n’a pas révolutionné ma vie en 2012 comme il l’a fait en 1993 avec Jurassic Park.

Pourtant, je versais déjà de grosses larmes rien qu'en regardant la bande-annonce, et je suis allée le voir toute seule comme une grande, de peur de sangloter du début à la fin et de devoir quitter la salle (j’ai une fâcheuse tendance à sangloter dès que je vois un cheval. Je soupçonne que je serais moins émotive et qu’il y aurait moins de posters de chevaux sur mes murs s’il y avait des chevaux dans ma vie et si ma vie équestre n’avait pas été un désastre, mais là n’est pas le sujet).

Cheval de guerre est un film familial. J’entends par là que les personnages manquent considérablement de subtilité. Ils ne correspondent pas tout à fait à des clichés préétablis, mais on n’en est pas loin. Le père d’Albert, le personnage humain principal, notamment, est tellement mou, minable et avachi sur lui-même que je n’ai même pas réussi à le mépriser, alors même que je me fais toujours un plaisir de détester les figures paternelles (là aussi, je soupçonne que je ne réagirais pas de la même manière si j’avais eu une famille saine et digne de ce nom, mais là n’est encore pas le sujet). Toute la première partie du film, qui retrace la jeunesse du cheval Joey (le personnage équin principal) dans la campagne anglaise, m’a franchement évoqué la série La petite maison dans la prairie. Heureusement que David Thewlis est là. Sa barbe fait ressortir son gros nez, mais bon, c’est le Roi Einon de Cœur de dragon, alors on s’incline. (Le reste du monde le connaît surtout sous les traits du professeur Lupin.)

À gauche: père avachi. À droite: le merveilleux David Thewlis.

La situation s’améliore lorsque le père (toujours avachi) d’Albert vend Joey à l’armée, plus précisément à un jeune officier, le capitaine Nicholls, joué par Tom Hiddleston. J’adore cet acteur. La petite vingtaine de minutes passée avec lui a été la meilleure du film. Il relève nettement le niveau, fait entrer de la subtilité en jeu, est émouvant et touchant juste en étant là. Du coup, j’ai hâte de le retrouver sous les traits de Loki dans Avengers, même si son costume est aussi ridicule que dans Thor. (Bizarrement, je n’ai pas flashé sur lui dans Thor… Par contre, je l’ai beaucoup aimé en Fitzgerald dans Minuit à Paris.)

Tom Hiddleston

Le capitaine Nicholls et son ami le lieutenant Charlier Waverly, joué par Patrick Kennedy, sont sous les ordres du major Jamie Stewart, joué par Benedict Cumberbatch (que j'ai remarqué récemment dans La Taupe, dans lequel il joue l'assistant de Gary Oldman, et qui est connu pour jouer Sherlock Holmes dans la série Sherlock de la BBC -- avis aux amateurs!).

En haut: Benedict Cumberbatch, Patrick Kennedy et Tom Hiddleston
En bas: Topthorn, personnage équin au nom inconnu, Joey

Par la suite, Joey rencontre pas mal de personnes au cours de la guerre et passe de l’armée britannique à celle allemande avant de finir du côté français. Accompagné de son compagnon Topthorn, un grand cheval noir (personnage équin secondaire), il tire des canons dans les tranchées. Bien entendu, c’est moche pour les chevaux et plusieurs plans font vraiment mal.

C’est cependant le grand intérêt de ce film: tout tourne autour de Joey. C’est lui le personnage principal. Bon, on nous sert une bonne partie des clichés équestres habituels (un jeune cheval –mâle, évidemment-- "indomptable", une amitié indestructible avec un jeune garçon, la mise en place d’un signal précis auquel le cheval répond après des années de séparation, des hennissements à tout va alors que les chevaux, dans la vraie vie, ne hennissent que très ponctuellement, la multiplication des cabrers en situation de danger alors que la défense spontanée d’un cheval consiste à te montrer ses fesses et à t’envoyer les sabots dans la figure – mais bon, le coup de cul est moins spectaculaire que le cabrer, je comprends). C’est néanmoins un des meilleurs films de chevaux que j’ai jamais vus, car il y a une certaine spontanéité et un certain réalisme dans le comportement des chevaux. Peut-être est-ce simplement dû au fait que ces plans sont assez longs et les chevaux avaient donc une plus grande liberté. Un cheval qui galope pendant trente secondes d’affilée, c’est plus "vrai" que 10 plans de trois secondes entrecoupés d’autres plans, vous voyez? Et je n’ai pas identifié de "trucs" de dressage flagrants comme je le fais d’habitude (notamment pour faire tomber les chevaux sur le côté en mettant leur nez du côté où ils doivent s’effondrer). Chapeau à la personne qui les a dressés.

Je pourrais même dire que Spielberg a sublimé les chevaux (mais, franchement, est-il besoin de sublimer un cheval, animal déjà sublime de base, comme le chat?): ils sont très bien mis en valeur, filmés de manière intéressante, rendus très expressifs mais sans tomber dans la caricature du cheval qui rit, par exemple. Je pense notamment au plan sur le visage de Joey une fois qu’il a remplacé Topthorn pour tirer un canon. Anthropomorphisme à part, ce que ce plan dit, c’est: Joey sait ce qu’il a fait.

Hello! I'm Mister Joey.*

Parallèle inévitable avec les plans incroyables de Pilgrim blessé et traumatisé au fond de son boxe dans L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, lorsqu’il regarde le personnage de Kristin Scott-Thomas droit dans les yeux et exprime une haine puissante.

Les scènes de cavalerie sont également super. Je suis une grande partisane de la cavalerie en crins et en sabots, par opposition avec la cavalerie numérique des Rohirrim par exemple, et c’est la première fois que je vois au cinéma une scène digne de la charge de l’armée d’Arthur dans Les chevaliers de la Table Ronde, film totalement anachronique, mais tellement culte, des années cinquante.


Pour conclure, Cheval de guerre est très spectaculaire, les scènes de guerre sont très réalistes tout en restant discrètement dénuées de sang pour ne pas effrayer les jeunes spectateurs, et Spielberg connaît parfaitement son métier, comme le montre la galopade finale dans le no man's land (si elle est bien plus courte que je ne le pensais, ça reste un grand moment de cinéma). La musique de John Williams est superbe et je suis un peu triste qu'il n'ait pas eu l'Oscar, même si je pense que The Artist le méritait également... Mais c'est très sentimental --la scène finale en contre-jour devant le ciel de l'aube est tout simplement dégoulinante de bons sentiments-- et il manque un petit quelque chose pour qu'un spectateur adulte prenne le tout (et surtout les personnages) un peu plus au sérieux.

Je vous laisse avec une jolie photo de Joey et Topthorn avant le début de leurs gros, gros ennuis.


*Ceci est un clin d’œil à la série Mister Ed, devant laquelle je m'esclaffe bêtement tous les matins au petit-déjeuner. :)

dimanche 4 mars 2012

Celui qui garde le ver

Six mois après avoir décidé de m'embarquer dans un mini-challenge personnel tournant autour de la figure du Ver blanc, j'ai enfin lu la nouvelle Jerusalem's Lot de Stephen King. Cette lecture suivait le roman Le Repaire du Ver blanc (The Lair of the White Worm) de Stoker, un livre au sujet duquel j'ai exprimé toute ma perplexité ici.

Je dois dire que j'ai été un peu déçue. Je n'ai pas lu cette histoire de Stephen King, auteur que j'ai par ailleurs apprécié lors de mes rares rencontres avec lui, dans les conditions idéales, puisque j'ai dû interrompre ma lecture plusieurs fois pour interagir avec d'autres êtres humains (un évènement assez rare pour être souligné) ou changer de mode de transport, mais je n'ai tout simplement pas été convaincue.

En fait, c'est sympa, on accroche bien, il y a des références littéraires sympathiques (bien que cette œuvre m'ait plutôt rappelé Dracula et la nouvelle Les rats dans les murs de Lovecraft plutôt que Le Repaire du Ver blanc), mais je l'ai tout simplement trouvée trop courte pour mettre en place une histoire détaillée et crédible. Heureusement, la dernière intervention de cette nouvelle épistolaire laisse imaginer le pire et la toute dernière phrase m'a redonné le sourire (sourire diabolique, s'entend).

Anne Quent fait une critique plus positive que moi ici.

Prochaine étape: mettre les mains sur le DVD du film de Ken Russell à moindre coût... :D


Dernière remarque: la nouvelle Jerusalem's Lot fait partie du recueil Danse macabre (Night Shift), qui est précédé par une courte préface de Stephen King. J'ai trouvé ce texte sur la peur, sur l'écriture et sur la littérature d'horreur très intéressant, alors même que l'auteur cite de nombreux auteurs dont je n'ai jamais entendu parler (peut-être des écrivains américains qui n'ont pas été exportés en Europe?). À lire!