Dans L'écuyer mirobolant, Jérôme Garcin retrace la vie d'Étienne Beudant, militaire français devenu une sorte de maître à penser en équitation. Cavalier émérite né en 1863, il passe par Saumur avant d'être envoyé en Algérie, où il "reprend en main" tous les chevaux qui passent.
"Le plus souvent, à force de persévérance, d'équanimité, d'intelligence et de finesse, Étienne faisait des miracles. Il métamorphosait des carnes éteintes en athlètes brillants, les chevaux de bois en modèles de souplesse, les peureux en crâneurs, allongeait les brévilignes, élargissait les trapus, étendait les encolures trop courtes, rectifiait et musclait les dos creux, les poitrails mous, les épaules fatiguées, les jarrets compromis, retapait les plus faibles en les engraissant avec du fenugrec, finissait par obtenir, de juments destinées à mourir d'épuisement dans les brancards et à mourir au couteau, des changements de pied au temps, des pirouettes, des appuyers, parfois même un joli passage ou un piaffer royal."
Cet extrait est un bon exemple du style de Jérôme Garcin, qui arrive à faire de longues phrases remplies d'expressions équestres sans jamais s'y perdre. J'ai trouvé très agréable de le lire. Cependant, un non-initié pourra peut-être se noyer dans les figures et les défauts d'aplombs...
J'ai trouvé cette lecture assez triste, car l'histoire se passe en grande partie pendant les années vingt, trente et quarante, lorsque Étienne Beudant, infirme et abandonné par sa famille, vit seul dans les Landes avec quelques chevaux de propriétaire. La dernière jument qu'il a entièrement dressée, Vallerine, est partie à Paris sous la selle d'un autre cavalier, et Étienne ne montera plus après son départ. J'ai trouvé cette renonciation forcée à l'équitation très triste, décourageante, injuste. Mais le ton reste plutôt optimiste. À partir de là, Étienne Beudant s'est consacré plus que jamais à l'écriture, aussi bien pour répondre aux nombreuses lettres qu'il recevait que pour écrire ses propres livres (notamment Extérieur et haute école en 1923 et Mains sans jambes en 1945). (Ce dernier titre est une expression que tout cavalier a entendue plus d'une fois dans la bouche de son enseignant! ^^)
Le côté mélancolique de l'histoire ne m'a pas empêchée de beaucoup apprécier ce livre. Il est plein de considérations sur le dressage léger et aérien des chevaux et sur leur beauté, sans être sectaire (Étienne Beudant, par exemple, montait aussi les petits chevaux maghrébins que les Français considéraient comme "bons à riens"). Il déborde, en quelque sorte, d'amour du cheval.
Extrait de la quatrième de couverture de l'édition de poche de Folio, que ma librairie a exposé en pleine vue exprès pour me faire craquer: "Monter n'était plus alors une activité physique, c'était une pensée pure, un acte de foi."
"Le plus souvent, à force de persévérance, d'équanimité, d'intelligence et de finesse, Étienne faisait des miracles. Il métamorphosait des carnes éteintes en athlètes brillants, les chevaux de bois en modèles de souplesse, les peureux en crâneurs, allongeait les brévilignes, élargissait les trapus, étendait les encolures trop courtes, rectifiait et musclait les dos creux, les poitrails mous, les épaules fatiguées, les jarrets compromis, retapait les plus faibles en les engraissant avec du fenugrec, finissait par obtenir, de juments destinées à mourir d'épuisement dans les brancards et à mourir au couteau, des changements de pied au temps, des pirouettes, des appuyers, parfois même un joli passage ou un piaffer royal."
Cet extrait est un bon exemple du style de Jérôme Garcin, qui arrive à faire de longues phrases remplies d'expressions équestres sans jamais s'y perdre. J'ai trouvé très agréable de le lire. Cependant, un non-initié pourra peut-être se noyer dans les figures et les défauts d'aplombs...
J'ai trouvé cette lecture assez triste, car l'histoire se passe en grande partie pendant les années vingt, trente et quarante, lorsque Étienne Beudant, infirme et abandonné par sa famille, vit seul dans les Landes avec quelques chevaux de propriétaire. La dernière jument qu'il a entièrement dressée, Vallerine, est partie à Paris sous la selle d'un autre cavalier, et Étienne ne montera plus après son départ. J'ai trouvé cette renonciation forcée à l'équitation très triste, décourageante, injuste. Mais le ton reste plutôt optimiste. À partir de là, Étienne Beudant s'est consacré plus que jamais à l'écriture, aussi bien pour répondre aux nombreuses lettres qu'il recevait que pour écrire ses propres livres (notamment Extérieur et haute école en 1923 et Mains sans jambes en 1945). (Ce dernier titre est une expression que tout cavalier a entendue plus d'une fois dans la bouche de son enseignant! ^^)
Le côté mélancolique de l'histoire ne m'a pas empêchée de beaucoup apprécier ce livre. Il est plein de considérations sur le dressage léger et aérien des chevaux et sur leur beauté, sans être sectaire (Étienne Beudant, par exemple, montait aussi les petits chevaux maghrébins que les Français considéraient comme "bons à riens"). Il déborde, en quelque sorte, d'amour du cheval.
Extrait de la quatrième de couverture de l'édition de poche de Folio, que ma librairie a exposé en pleine vue exprès pour me faire craquer: "Monter n'était plus alors une activité physique, c'était une pensée pure, un acte de foi."
Je n'ai jamais lu cet auteur, pourtant dieu sait si j'ai lu plein de bouquins avec des chevaux dedans. A réparer un jour. En tout cas tu donnes envie.
RépondreSupprimerCool. :) C'était sympa et instructif comme lecture.
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