The Perks of being a Wallflower de Stephen Chbosky est un roman épistolaire constitué des lettres envoyées par un adolescent, Charlie, à un destinataire anonyme, à qui il raconte sa première année au lycée. Publié en France sous le titre Pas raccord, le roman a été réédité sous le titre Le Monde de Charlie à l'occasion de la sortie du film, réalisé par l'auteur en personne... Et forcément, comme j'ai d'abord vu le film, je connaissais déjà l'histoire et j'ai un peu collé les visages des acteurs sur les personnages. Ce qui n'est pas forcément un mal d'ailleurs: pour une fois, on peut supposer que le réalisateur-auteur a choisi des acteurs correspondant vraiment à ses personnages!
Dans le livre, Charlie est plus "simplet" que dans le film. Au début, d'ailleurs, j'ai pensé qu'il était vraiment autiste et j'ai craint de ne pas accrocher. Mais en fait on s'habitue à ce ton très direct et clair, parfois rigolo et parfois touchant, toujours très juste... Charlie décrit sa vie de lycéen taciturne et discret, les relations avec sa famille, les lectures conseillées par son prof d'anglais qui le prend sous son aile, la rencontre déterminante avec des élèves en dernière année. On le voit observer avec attention les actions des autres et tenter de "participer" lui aussi, c'est-à-dire d'entrer dans le jeu. Il va faire quelques expériences avec sa candeur caractéristique et en tirer des enseignements, mais aussi commettre plein d'erreurs.
Par rapport au film, l'accent est beaucoup plus mis sur la famille de Charlie. Il décrit plusieurs fois ses parents, sa sœur et son frère, mais aussi la famille plus éloignée qu'ils ne voient que quelques fois par an, en soulignant les tensions accumulées depuis des lustres et les travers des uns et des autres. La question qui en ressort le plus clairement est celle du bonheur: ont-ils réussi à être heureux? Les violences et les malheurs de l'enfance ne les ont-ils pas déterminés à devenir les adultes qu'ils sont?
Charlie aborde aussi d'autres sujets graves, comme le rejet de l'homosexualité, la violence psychologique au lycée, le viol, le suicide... Ce n'est jamais sordide mais certains passages sont très très tristes, comme le poème que Charlie lit à ses amis. L'histoire d'amour complètement catastrophique de Patrick et finalement ses errances dans le parc la nuit sont le plus triste dans tout ça, le plus grand gâchis...
"Patrick just said that he wasn't sad because at least now, Brad doesn't have to get drunk or stoned to make love."
"We accept the kind of love we think we deserve."
The Perks est bien un livre que je regrette de n'avoir pas pu lire quand j'étais moi-même au collège et au lycée. Je pense qu'il m'aurait bien aidée à affronter la sensation de solitude profonde qu'on ressent forcément quand on ne rentre pas pile-poil dans le moule et que la majorité des élèves te regarde comme une bête curieuse. Mais je dois dire que même à mes presque trente ans, le livre m'a réconfortée et fait réfléchir, tout comme le film m'avait donné bien de l'espoir et du courage il y a deux ans.
Au final, j'ai préféré le film, peut-être parce que la musique, qui joue un rôle vraiment important dans la vie de Charlie, est bien mise en avant, tandis qu'elle se limite à des noms de chansons dans le livre (et forcément quand on n'a pas de baladeur et de connexion avec soi, on ne peut pas se ruer sur Deezer pour écouter les morceaux dont parlent les personnages en même temps qu'on lit); et certainement parce que l'effet de découverte est passé et que j'adore Logan Lerman en Charlie. ♥
Un dernier point sur le titre:
The Perks of Being a Wallflower signifie littéralement "les avantages d'être une fleur dans la tapisserie". Je l'aurais bien traduit par "De l'avantage de faire partie du décor" ou en utilisant l'expression "faire plante verte". L'idée est que Charlie est tellement discret que personne ne fait attention à lui, ce qui lui permet de tout observer tranquillement. Le titre français Pas raccord n'a rien à voir mais colle très bien au personnage et au contenu, parce que Charlie est vraiment tout sauf raccord (et cela m'a d'ailleurs fait cogiter que c'est une super traduction du mot anglais misfit). Le titre du film Le Monde de Charlie, en revanche, ne présente vraiment aucun intérêt du point de vue adaptation ni du point de vue du sens...