Petit pays, le premier roman de Gaël Faye, a été très bien reçu par la critique lors de la rentrée littéraire de septembre et a obtenu le prix Goncourt des lycéens.
Le récit est raconté à la première personne par Gabriel, un jeune garçon d'une dizaine d'années qui mène une existence plutôt tranquille dans une impasse de Bujumbura, capitale du Burundi, au début des années quatre-vingt-dix. Son père est français, sa mère est rwandaise. Gabriel a une bande de copains dans l'impasse et va à l'école française sans trop se soucier de ces histoires de Tutsis et d'Hutus dont il entend parfois parler sa mère...
La première moitié du roman, voire les deux tiers, retrace ce quotidien perdu, ces derniers mois d'enfance savourés avec inquiétude par un enfant qui sent que les choses changent autour de lui et qui voudrait empêcher le temps de passer. Mais le changement arrive, inéluctable: ses parents se séparent et la situation politique devient de plus en plus tendue...
Bon, j'ai un peu honte de le dire, mais avant de lire ce Petit pays je ne savais pas placer le Burundi sur une carte et j'ignorais totalement que les Hutus et les Tutsis habitaient d'autres pays que le Rwanda. J'ai donc fait une remise à niveau express (merci Wikipédia...) sur la triste succession de coups d'État et d'affrontements ethniques dont a souffert le Burundi après son indépendance au début des années soixante. Le génocide rwandais a probablement attiré plus d'attention du fait de son ampleur exceptionnelle, mais je peux vous dire que ce pays a eu sa part de massacres, c'est vraiment effrayant. Et la situation reste très tendue à l'heure actuelle.
Gaël Faye a grandi au Burundi et on sent qu'il y a du vécu dans la description du quotidien de ce petit garçon qui veut juste jouer avec ses copains. L'auteur réussit d'ailleurs très bien à adopter un regard d'enfant sur les choses. Le style est parfois un peu faussement lyrique (peut-être sous l'influence de l'éditeur, désireux d'obtenir un "produit" haut de gamme?), mais très fluide et bien maîtrisé pour un premier roman. J'ai lu ce livre en une journée pendant mes vacances. C'était plaisant et prenant, malgré (ou à cause?) de la montée très progressive mais inexorable que l'on sent en arrière-plan. Il faut beaucoup de temps pour en venir au vif du sujet, l'entrée du Burundi dans la guerre civile au lendemain de ses premières élections et les liens de la mère du narrateur avec son pays d'origine, le Rwanda, qu'elle a fui mais où elle a encore de la famille. Des Tutsis, comme elle. Les derniers chapitres nous plongent enfin dans l'horreur qu'on imagine.
J'étais en thalasso quand j'ai lu ce livre et ça m'a laissée songeuse. Barboter dans le jacuzzi et manger des fruits de mer quand le quotidien d'autres personnes de ma génération a été marqué par ça, alors même que ça se répète partout dans le monde... Comment est-ce possible?
Je parlerai en dernier d'un élément qui n'est que peu abordé mais qui m'a marquée, forcément: le poids de l'héritage / la différence entre l'héritage et le ressenti (j'ignore si c'est clair...). Notre narrateur métis représente plus qu'une union Europe-Afrique: son père lui apporte sa nationalité française, sa naissance et sa vie au Burundi font de lui un Burundais, sa mère lui apporte l'héritage rwandais mais aussi tutsi... Mais il ne se reconnait que dans ce qu'il connaît, le Burundi... J'entends souvent dire que le biculturalisme est un atout, mais franchement c'est dur à porter quand on est petit et qu'on ne comprend pas bien les tenants et aboutissants de la chose. 😔
Je parlerai en dernier d'un élément qui n'est que peu abordé mais qui m'a marquée, forcément: le poids de l'héritage / la différence entre l'héritage et le ressenti (j'ignore si c'est clair...). Notre narrateur métis représente plus qu'une union Europe-Afrique: son père lui apporte sa nationalité française, sa naissance et sa vie au Burundi font de lui un Burundais, sa mère lui apporte l'héritage rwandais mais aussi tutsi... Mais il ne se reconnait que dans ce qu'il connaît, le Burundi... J'entends souvent dire que le biculturalisme est un atout, mais franchement c'est dur à porter quand on est petit et qu'on ne comprend pas bien les tenants et aboutissants de la chose. 😔
Je remercie chaleureusement mon amie M. de m'avoir prêté ce roman! Ça fait au moins deux ans que je n'ai pas lu de livre de l'actualité littéraire "officielle" et ça fait du bien... 💋
Allez donc voir ailleurs si ce petit pays y est!
J'entends beaucoup parler de ce livre et pourtant je ne suis pas spécialement l'actualité littéraire générale. En tout cas tu donnes envie.
RépondreSupprimerHa c'est bon signe ça. :) Je pense qu'il mérite son succès et a trouvé un ton vraiment pas mal pour parler des problèmes du Burundi. Donne-lui sa chance s'il croire ton chemin. :)
SupprimerComme toi, j'ai eu besoin d'un cours Wikipedia. C'est un roman marquant selon moi.
RépondreSupprimerOui, marquant et intéressant. Je vais aller lire ta chronique! :)
SupprimerTu donnes bien envie de le lire en tout cas !
RépondreSupprimerSuper, merci :)
SupprimerPour ne rien te cacher, je ne suis pas du tout au fait de la situation géographique du Burundi non plus, ni du reste... Hmm... On a tous des lacunes quelque part hein.
RépondreSupprimerBon, malgré toutes les bonnes critiques de ce roman, pour l'instant, je ne suis que peu tentée. Je verrai à l'occasion s'il me tombe dans les mains ! (c'est souvent comme ça que tout se joue !)
Certes, on a tous des lacunes mais les miennes me semblent particulièrement impressionnantes :p D'autant plus que je travaille à les combler depuis des années...
SupprimerJe ne suis pas persuadée que tu aimerais en fait, donc c'est une bonne idée d'attendre que l'occasion se présente. :)