Le mois dernier, j’ai lu et adoré les Fiancés de l’hiver, le premier tome de la Passe-Miroir de Christelle Dabos. Depuis, je trépigne d’impatience en attendant de lire le deuxième tome, dont j’avais programmé la lecture un mois plus tard pour ne pas risquer de gâcher mon plaisir en enchaînant les tomes trop vite.
Alors, quid des Disparus du Clairdelune?
J’ai adoré. À vrai dire, je suis au niveau au-dessus de l’adoration, je suis obsédée par la Passe-Miroir, je me prosterne devant Cristelle Dabos, j’ai dix-sept ans et un crush amoureux irrémédiable, je veux aller vivre au Pôle ou encore mieux à Amina, je suis dingue de l’écharpe.
Attention, je vais inévitablement révéler des éléments de l’intrigue du premier tome dans ce billet.
Ce deuxième tome reprend là où s’était arrêté le premier, à savoir que l’héroïne, Ophélie, liseuse et passe-miroir de son état, s’apprête en quelque sorte à faire son "entrée à la cour" en rencontrant le seigneur Farouk, esprit de famille du Pôle. Ayant découvert que Thorn ne l’a choisie pour fiancée que pour bénéficier de son pouvoir de liseuse, elle est déjà très fâchée avec lui, mais la situation se complique encore lorsque Farouk la nomme vice-conteuse officielle, ce qui implique qu’elle divertisse la cour en racontant des histoires, puis lorsque des personnalités en vue du Pôle commencent à disparaître mystérieusement.
Bon, je ne sais même pas par où commencer tellement j’adhère à tout dans ce bouquin.
J’ai déjà mentionné l’univers génialissime dans le tome 1. Ici, l’effet de surprise et de découverte est, inévitablement, un peu passé, mais cela reste génial. La Citacielle, la ville suspendue qui peut se déplacer dans les airs, les Illusions pouvant aller jusqu’à déformer totalement l’espace, la présence inattendue d’objets rétro comme des dirigeables et des téléphones à fil… Tout cela forme un ensemble qui n’en finit pas d’étonner et de fasciner. C’est vraiment comme découvrir Poudlard et commencer à se dire: "putain, quand est-ce que je reçois ma lettre, moi!?"
J’adore les pouvoirs des habitants des arches et, au sein du Pôle, des différentes familles. L’animisme d’Ophélie et de son peuple est de loin mon pouvoir préféré, mais je prendrais bien les griffes des Dragons, franchement.
Les personnages sont tous géniaux, des plus importants aux plus secondaires. Ophélie bien sûr, qui évolue très joliment, gagnant en assurance et en lucidité sans changer ses caractéristiques essentielles – une discrétion à toute épreuve, une maladresse terrible, un sens moral fort et une détermination extrêmement persévérante derrière ses airs empotés. Thorn, glacial et raide comme un piquet, avec ses répliques cinglantes (je suis amoureuse de Thorn 😍 Mais franchement, qui ne l'est pas?!?). Archibald, négligé et dragueur, un feu follet irrésistible (je suis amoureuse d’Archibald aussi, maintenant que j’y pense). Farouk, terrible dans sa puissance démesurée. Le baron Melchior, obèse, raffiné et amusant ministre des Élégances que j’ai rapidement visualisé comme Ratcliffe, le méchant de Pocahontas de Disney. Gaëlle fait une rapide apparition et Renard revient aussi, et avec un chaton, Andouille. Et l’écharpe, n’oublions pas l’écharpe. Ni la mère Hildegarde avec ses cigares – seulement deux pages, mais quelle classe. Tous sont saisis avec une vivacité de fous.
"Gaëlle s’était hissée sur la rambarde comme un marin sur le beaupré d’un navire; au-dessus des contingences humaines, elle mâchonnait une cigarette juste à côté du panneau «INTERDICTION FORMELLE DE FUMER»."
Il y a aussi beaucoup d’humour dans ce tome: plutôt discret généralement, mais j’ai aussi éclaté de rire plusieurs fois.
"— Monsieur l’intendant, je me demandais où vous étiez!
— Ici, répondit Thorn comme une évidence."
J’ai posé le livre, j’ai ri. J’ai relu, j’ai reri. J’ai rerelu, j’ai rereri.
L’intrigue s’étoffe considérablement dans ce tome, puisque non seulement le mariage d’Ophélie dépasse les simples enjeux diplomatiques qu’elle avait imaginés, mais il ne concerne pas moins que le lointain passé des esprits de famille et la Déchirure, le grand cataclysme qui a fait de la Terre une série d’arches flottantes (autour, on suppose, d’un reste de noyau). J’ai hâte d’en apprendre plus sur ce mystérieux Dieu apparu dès la première page du premier tome.
Côté bémols, je pourrais exprimer quelques réserves sur ce tome, à savoir que j’aurais aimé voir plus la tante Roseline, un personnage extraordinaire, et peut-être découvrir un nouvel endroit aussi formidable que la Citacielle, à côté de laquelle la ville balnéaire des Sables d’Opale est finalement bien banale; et il y a de légère facilités à la fin, avec un méchant un peu trop bavard en présence d’Ophélie et un départ pour Anima bien expéditif au dernier chapitre – la réaction de Farouk à la disparition de Thorn aurait mérité quelques lignes d’explication plutôt que la simple mention du fait que Thorn est hors la loi. Mais je chipote totalement, un peu comme si, alors que vous vous extasiez sur un chat particulièrement sublime, vous commentiez la présence de trois poils gris foncé dans son pelage noir d’encre.
En bref: un deuxième tome très réussi pour Christelle Dabos. Chapeau, l’artiste. Je trépigne d’impatience en attendant le troisième. Lecture prévue durant la deuxième moitié de janvier, pour faire durer le plaisir.
Allez donc voir ailleurs si ces disparus y sont!
L'avis de la Petite marchande de prose
L'avis de Vert