samedi 26 juin 2021

L'Hiver de la sorcière (2019)

Après l'Ours et le rossignol et la Fille dans la tour, place au dernier tome de la trilogie d'une nuit d'hiver de Katherine Arden! 😍

L'histoire reprend au lendemain de la fin du tome deux. Moscou est en piteux état, et, bien sûr, je ne peux pas vous dire pourquoi, sinon je vous révèle la fin du tome deux. Disons simplement cela, qu'elle est en piteux état, et que Vassia, notre protagoniste, y est grandement pour quelque chose. Elle a agi au mieux, évidemment, elle n'a pas mis Moscou dans cet état exprès. Mais c'est quand même un peu sa faute. Et même si personne ne le sait, quoi de plus pratique que d'avoir une sorcière en ville pour réunir la population mécontente et bouleversée? Rien, évidemment. Surtout pour l'odieux moine Konstantin. Eh oui, il est toujours là et il est toujours détestable, même s'il évolue dans ce roman...

Bref, Vassia finit en mauvaise posture, mais elle réussit à se libérer grâce à ses pouvoirs magiques, qu'elle découvre à peine, et s'enfuit dans la Minuit, une sorte de contrée magique, accessible à ceux qui savent qu'elle est là et invisible aux autres, où l'on peut voguer à travers toutes les minuits du monde. Elle pourra reprendre des forces à l'abri, découvrir la vérité sur ses origines et se mettre en quête du roi de l'hiver, Morozko...

Entre monde magique et Rus' réelle, Vassia rencontre de nouveaux personnages, tisse des alliances, prend des décisions difficiles et, toujours, est prête à payer de sa personne s'il le faut. C'est une véritable héroïne, au sens le plus noble du terme: la personne qui est prête à se sacrifier ou à prendre des risques pour elle-même, qui continue à aller de l'avant même quand elle n'a plus de forces. Alors, elle peut être un peu agaçante par moments, avec son côté tétu, mais c'est très léger, et en fait ça contribue en fait à en faire un être humain normal, juste une personne avec ses failles et ses sentiments et ses peurs et ses doutes et ses amours. Son frère Sasha, le moine guerrier, est également présent et est, lui aussi, très nuancé. Au final, comme je l'ai dit plus haut, même Konstantin évolue. Et même l'Ours, le borgne qui donne son nom au premier tome, se révèle plus subtil qu'on ne le croyait. Une chose est certaine: Katherine Arden sait créer ses personnages...

Des personnages riches, une magie subtile et puissante à la fois, un univers féérique à tomber, des chevaux sublimes, un message résolument positif... Et la cerise sur le gâteau: une fin dotée d'un souffle épique non négligeable... Et le tout, toujours porté par une belle traduction de Jacques Collin, qui a vraiment su trouver un ton qui colle à l'univers, avec une rédaction simple et soignée à la fois, dans laquelle les mots russes s'insèrent le plus naturellement du monde... Mais quel beau voyage, mes amis! Un vrai plaisir de lecture!

Allez donc voir ailleurs si cet hiver y est!
L'avis de Baroona
L'avis de Lhisbei
L'avis de Vert
L'avis de Yuyine

lundi 21 juin 2021

Espaces insécables (2008)

Après le Miroir aux éperluettes, je poursuis ma découverte de Sylvie Lainé avec ce deuxième recueil, qui est sorti en 2008 et réunit six textes parus entre 1985 et 2008. Comme pour le précédent, ce n'est pas encore le coup de foudre, car j'ai l'impression de passer à côté de beaucoup de choses. Les textes sont soignés, ça se sent, et Sylvie Lainé a des choses à dire; mais il me semble qu'il y a presque autant d'implicite que de propos clairement formulés et que cet implicite reste très flou pour moi. Mais voyons cela de plus près...

Carte blanche (1985) nous fait découvrir un vaisseau où la vie est régulée, dans une certaine mesure, par des cartes: chaque habitant reçoit des cartes qui lui indiquent quelles actions entreprendre. Par exemple, si vous avez la carte Duel, vous devez vous battre – libre à vous de choisir avec qui et par quel moyen. C'est très intéressant et il y a des répliques toutes faites dignes d'un slogan politique, mais je n'ai pas bien cerné la motivation du personnage. Ce texte a reçu le prix Septième continent en 1986.

Le chemin de la rencontre (1985) suit les recherches d'un homme sur une planète peuplée d'étranges êtres qui vivent en symbiose avec des créatures s'exprimant par l'odeur, où il essaye de retrouver sa coéquipière, disparue depuis peu. Je n'ai pas du tout compris la question de la dernière phrase, du coup je pense que j'ai raté quelque chose...

Partenaires (1985): Bon, là, je n'ai vraiment rien pigé, à part la référence aux Trois Mousquetaires.

Le Passe-Plaisir (1986) nous fait voyager en l'an 1100, époque à laquelle l'humanité consomme librement des passe-plaisirs, des dispositifs permettant d'associer le plaisir (pas forcément au sens sexuel) à des objets donnés. Vous pouvez ainsi vous découvrir une passion pour les araignées, par exemple. On est en compagnie d'un couple: une femme de l'époque et un homme provenant du passé, qui n'adhère pas du tout à ce concept. C'est très intéressant; comme dans Carte blanche, la construction d'univers est très réussie pour un texte si bref. Mais là aussi, la fin m'a laissée perplexe...

Définissez: priorités (2000) met en scène deux scientifiques qui échangent par écrit. Il y a tout un truc sur la télépathie et la musique que je suis incapable de vous décrire, mais le vrai propos du texte est ailleurs ([divulgâcheur] c'est une histoire d'amour brisé avant même de naître [fin du divulgâcheur]). C'est très bon.

Subversion 2.0 (2008) est une histoire de double très réussie qui m'a beaucoup parlé.

Le thème de ce recueil est le choix: comment agir face à telle situation, à qui s'allier, comment mener sa vie. Même si je n'ai pas tout capté aux quatre premiers textes, je reconnais à Sylvie Laine une vraie maîtrise de son art. Et les deux derniers textes, eux, m'ont emballée. Je poursuivrai donc ma lecture avec entrain, puisqu'il me reste deux recueils à lire.

Allez donc voir ailleurs si ces espaces y sont!
L'avis de Vert

mercredi 16 juin 2021

Mon évasion (2008)

Il y a quelques mois, la rediffusion d'un épisode du podcast le Book Club consacré à l'autrice et illustratrice Diglee a ravivé mon intérêt pour Benoîte Groult, écrivaine venue au féminisme assez tard dans sa vie, à la cinquantaine passée. J'ai donc souhaité lire Mon évasion, son autobiographie, et j'ai eu la chance d'être en bonne compagnie, puisque cette lecture s'est faite avec Shaya! 🤩

Elle a le prénom... Elle a le nom...
Et elle a le staïleuh!! 🤩

Mon évasion est, comme je le disais, une autobiographie. Benoîte Groult retrace donc sa vie, depuis son enfance et son adolescence à Paris, avec des parents plutôt "éclairés", jusqu'à ses différents mariages et son œuvre littéraire. C'est très intéressant car 1/ elle est extrêmement lucide dans sa description des rapports de force homme-femme et 2/ elle n'a pas sa langue dans sa poche. L'âge y est pour quelque chose; ce livre est sorti quand elle avait 88 ans, ce qui donne sûrement un peu de recul sur les choses de la vie. Comme elle le dit dans sa préface, elle a écrit "avec la franchise et l'insouciance que seul l'âge peut conférer".

Dans sa jeunesse, elle a bien senti une différence de traitement entre hommes et femmes, mais sans l'exprimer et sans l'intellectualiser énormément. On sent plutôt un ressenti obscur et imprécis, qu'elle exprime avec beaucoup de lucidité mais grâce au recul du temps. Néanmoins, elle a mené sa vie en bonne partie comme elle l'entendait, par exemple en divorçant à une époque où la chose était beaucoup plus rare qu'aujourd'hui. Quand elle s'est mise à l'écriture, elle a d'abord écrit à quatre mains avec sa sœur, puis elle s'est embarquée dans un essai féministe, Ainsi soit-elle (que ce serait vachement bien que je lise aussi...).

Certains chapitres centrés sur des périodes très précises, comme un séjour de ses petites-filles durant des vacances scolaires, sont moins intéressants et nets dans leur objectif, mais ils sont largement compensés par les autres chapitres sur sa vie et, surtout, par deux chapitres reprenant un long entretien avec la journaliste Josyane Savigneau. Là, c'est du beau niveau, la pensée est acérée, NUANCÉE et COMPLEXE, un truc que je trouve de plus en plus précieux à l'ère des réseaux sociaux et de leurs phrases-choc destinées à faire réagir sous le coup de l'émotion. Même les questions de la journaliste sont longues et articulées, c'est formidable.

Un seul regret pour ce bouquin: lorsqu'elle évoque son passage dans une émission de Bernard Pivot, qui ne s'est pas bien passé pour elle, Benoîte Groult dit que "Cavanna et Jean Vautrin [...] n'étaient pas venus pour me défendre". Je me fous totalement de Jean Vautrin, dont j'ignorais l'existence et que j'ai dû wikipédier pour savoir de qui il s'agit, mais j'adore Cavanna et cette petite phrase m'a attristée. Je ne veux pas chercher cette émission sur le net parce que je ne veux pas voir un écrivain que j'adore, et qui parle à tout va de fraternité entre humains dans ses bouquins, avoir un comportement déplacé/inique/moqueur/quesaisje face à une écrivaine féministe et un présentateur qui la met en difficulté. 💔

Allez donc voir ailleurs si cette Benoîte y est!
L'avis de Shaya

vendredi 11 juin 2021

The Horror at Red Hook (1927) + The Call of Cthulhu (1928)

De temps en temps, il est bon de revenir aux sources et de relire des textes fondateurs – soit de la littérature de manière générale, soit de ma petite personne en particulier. Comme ma pile à lire contient fort peu de livres en anglais depuis le début de l'année, je me suis offert le plaisir de relire du Lovecraft...

The Horror at Red Hook (1927)

J'avais déjà lu ce texte il y a plusieurs années, vu qu'il est présent dans un des recueils que j'ai lus, mais je n'en avais aucun souvenir. Je l'ai relu exclusivement pour des raisons politiques, à savoir que la nouvelle la Ballade de Black Tom de Victor Lavalle, publiée par le Bélial' dans la collection Une Heure-lumière, retourne le racisme que Lovecraft exprime ici. (Je n'ai pas lu le texte en question, mais tous les blogueurs qui l'ont chroniqué en ont parlé.) Je voulais voir si c'était vraiment si raciste que ça et si ça justifiait d'en écrire une autre version.

Dans le texte de Lovecraft, on accompagne Thomas F. Malone, un policier new-yorkais qui enquête sur les agissements d'un certain Robert Suydam. Ce dernier n'a pas forcément commis de crime bien identifié, mais il semble toucher à des pratiques occultes fortement douteuses importées d'Europe par des immigrés tout aussi douteux.

The Horror at Red Hook se lit bien et les chapitres mettent en place l'intrigue de manière progressive, avec cette enquête qui touche du bout du doigt des pratiques abominables (enlèvements, messes noires, usage de sang humain...). Hélas, on est un peu dans ce qui fait la limite de Lovecraft: on ne voit pas grand-chose, puisque quiconque VOIT ne veut surtout rien DIRE, donc on reste un peu sur sa faim... Je me suis donc pas étonnée d'avoir complètement oublié ce texte au fil des ans!

Côté racisme, eh bien oui, Lovecraft ne tient pas en haute estime les immigrés du quartier de Red Hook. Quand je disais "des immigrés tout aussi douteux" ci-dessus, ça voulait dire "des gens pas blancs": des noirs, des arabes, des kurdes, des gens de lieux indéfinis en Asie centrale... Ils ont des mines patibulaires et ils adorent le diable. Bon, moi je suis du clan "à l'époque, les trois quarts des gens pensaient ça" (une idée confortée par ma lecture de l'Orda, un bouquin sur l'émigration italienne), donc je ne serais pas allée réécrire le même texte du point de vue d'un noir, mais soit, toutes les raisons sont bonnes pour écrire une lovecrafterie, et je suis maintenant curieuse de voir ce qu'en a fait Victor Lavalle.

The Call of Cthulhu (1928)

Dans la foulée, j'ai relu LE texte le plus célèbre de Lovecraft. J'ai découvert au passage que j'ai dû le lire plus de fois que je ne le pensais, car je retrouvais des souvenirs de lecture assez frais au fur et à mesure, alors que je pensais ne l'avoir lu que deux fois. Bref, pas sûre qu'il y aura une énième relecture à l'avenir.

Cthulhu est super bien construit et c'est, je pense, ce qui fait sa force. On a un narrateur à la première personne, qui nous plonge d'abord dans les papiers de feu son grand-oncle, puis on remonte dans le temps, vingt ans plus tôt, pour découvrir le récit de l'inspecteur Legrasse, puis on lit le récit d'un certain marin qui a "vu des choses"... Ce procédé qui, en soi, a déjà été fait des tas de fois (coucou Maupassant et ton narrateur qui raconte l'histoire d'un autre narrateur qui raconte une histoire!), est super utile ici car il permet de faire deviner les ramifications immenses de ce culte tentaculaire (ah, ah! 🦑🐙), que l'on retrouve aussi bien au cœur du bayou aux États-Unis qu'au Groenland. Plus que les tentacules, c'est la présence insoupçonnée de choses gigantesques pendant des laps de temps complètement différents de l'échelle humaine qui fait tout le sel de Lovecraft. Et de ce point de vue, l'Appel de Cthulhu est juste exemplaire. En plus, il est raconté à la première personne, la première phrase est cultissime et la fin ([divulgâcheur] le narrateur qui annonce qu'il va forcément crever maintenant qu'il A VU [fin du divulgâcheur]) est tout à fait classique chez cet auteur. Bref, si vous devez lire un seul texte de Lovecraft dans votre vie, lisez celui-ci.

Un retour en terres lovecraftiennes fort agréable, en définitive.

dimanche 6 juin 2021

La Bête humaine (1890)

En voiture! Le dix-septième tome des Rougon-Macquart est prêt pour le départ! Embarquez à bord de la Bête humaine et découvrez les pires pulsions meurtrières de l'humanité...


L'intrigue
Roubaud, sous-chef de gare au Havre, pète complètement les plombs en apprenant que sa femme Séverine a été abusée depuis ses quinze ans par un riche bourgeois très influent au sein de la société ferroviaire de l'Ouest, le président Grandmorin. Après avoir roué Séverine de coups, Roubaud l'oblige à écrire à Grandmorin afin d'appâter celui-ci dans le train au bord duquel ils comptent quitter Paris pour rentrer au Havre. Ce même soir, Jacques Lantier erre comme une âme en peine le long de la voie ferrée allant de Paris au Havre, désespéré par les pulsions meurtrières qui s'éveillent en lui dès qu'il approche d'une femme. Et quand un train passe en coup de vent, il aperçoit, un bref instant, un homme qui en égorge un autre.

Meurtre à destination du Havre
Après avoir lu les deux premiers chapitres du roman, le lecteur n'a pas besoin de beaucoup réfléchir pour comprendre que c'est Roubaud qui a égorgé Grandmorin. Ce qui est intéressant, c'est comment la vérité va éclater (ou pas) et comment les personnages vont interagir entre eux. L'enquête est confiée au juge d'instruction Denizet, qui y voit l'opportunité tant attendue de faire évoluer sa carrière. Dès le début, toutefois, Zola nous laisse douter de l'efficacité de ses recherches: le président Grandmorin ayant été un monsieur très influent et ayant eu pas mal d'histoires douteuses avec des mineures, Denizet est prié de trouver le coupable mais surtout de le faire valider par les autorités parisiennes avant de l'arrêter, de peur d'éclabousser toute la bonne société. 🤣
Fatalement, les Roubaud rencontrent Jacques au cours de l'enquête et, même si celui-ci se déclare incapable de donner une description nette du meurtrier, ils ont extrêmement peur qu'il les dénonce. Pour l'amadouer, Roubaud n'hésite pas à envoyer sa femme en émissaire.

Adultère sur toute la ligne
Évidemment, Séverine prend son rôle très à cœur et finit par tomber dans les bras de Jacques, celui-ci étant tombé amoureux en deux temps trois mouvements, bien plus vite qu'elle. Par chance, en effet, il peut la toucher sans avoir envie de la tuer, elle! Ça colle donc parfaitement bien entre eux, d'autant que le ménage Roudaud part totalement en vrille après le meurtre; Roubaud passe son temps à jouer, laissant Séverine libre de vivre sa vie. En plus de celle-ci, il y a deux autres histoires d'adultère dans le roman: Pecqueux, le chauffeur de Jacques à bord de la Lison, a une femme à Paris et une au Havre, que son frère assomme de coups à chaque fois qu'il lui surprend un amant; et une des femmes habitant la gare du Havre espionne une voisine pour découvrir sa liaison. (En vain, héhéhé.)

Nous sommes tous des meurtriers
Mais beaucoup plus que d'adultère, ce roman parle de meurtre. Zola propose une densité de meurtriers assez déroutante. Je pense qu'on a tous plus ou moins envie de tuer quelqu'un à un moment donné dans sa vie, mais là, tout le monde passe à l'acte. Roubaud tue dès le début sous le coup de la colère. Au chapitre 2, Phasie, la tante de Jacques, annonce à son neveu que son mari l'empoisonne à petit feu. Plus loin, on verra d'autres personnes passer à l'acte, mais je ne dis rien pour ne pas vous gâcher votre plaisir... Il y a tout un délire sur la pulsion de meurtre, transmise de génération en génération depuis des temps immémoriaux; c'est cela, la bête humaine que Jacques sent enfler en lui. Il est aussi très intéressant de voir combien les personnages qui veulent tuer se trouvent des excuses pour le faire et s'arrangent exactement comme ils le veulent avec leur conscience. 👀

La Lison
La Bête humaine est très connu en raison des passages ferroviaires et de la Lison, la locomotive que conduisent Jacques et Pecqueux. Il faut attendre un peu, la Lison ne faisant son apparition qu'au chapitre 5, mais ça en vaut la peine! Tous les passages sur les trains et les gares sont très beaux et, évidemment, bien documentés. Il faut aussi citer toute la personnification de la Lison, qui, loin d'être une simple machine, a une véritable âme et est sans cesse comparée à une femme ou bien à un cheval, à tel point qu'elle a droit à une scène d'agonie pratiquement émouvante lors d'un accident ferroviaire spectaculaire.

Une ironie mordante
Comme d'habitude, Zola ne fait pas dans le monochrome et ne se contente pas de causer meurtre et trains; il glisse aussi beaucoup d'ironie dans ses pages, notamment grâce au chapitre 11, un immense foutage de gueule du juge d'instruction Denizet, qui a monté tout un échafaudage de pure logique pour inculper le meurtrier de Grandmorin... et qui a tout faux!! C'est juste beau.

Une fin à toute vapeur
Les deux ou trois dernières pages m'ont semblé particulièrement spectaculaires, avec un train fou qui traverse les gares et la campagne en traînant derrière lui des soldats qui ne se doutent de rien. Une image inoubliable de la folie de la guerre qui engloutira le Second Empire...

Allez donc voir ailleurs si cette bête y est!
L'avis de Tigger Lilly, ma camarade de relecture

mardi 1 juin 2021

La gamelle de mai 2021

Comme d'habitude, retour sur les activités culturelles du mois dernier.

Point info pour moi-même (pour m'en souvenir le mois prochain): je laisse tomber la recherche d'images, je ne trouve jamais ce que je veux et tout s'enregistre sous des formats improbables que je ne peux pas exploiter ici... 😕

Sur petit écran

Pas de film.

Sur grand écran

Rien. Les cinémas ont rouvert. Mais je n'y suis pas encore allée. La faute aux vacances, au travail, à la flemme, à la programmation...

Du côté des séries

Carnival Row de René Eschevarria et Travis Beacham – saison 1 – 2019

Alors eux... 😍

Une belle découverte pour cette série que j'ai regardée essentiellement parce que Orlando Bloom (🤩🤩). Je ne pense pas qu'elle soit au niveau des mastodontes du format, comme Game of Thrones ou, dans ce que je connais, l'exceptionnelle première saison de True Detective; mais si vous survivez à l'histoire d'amour mièvre et trop rapide pour être crédible de l'épisode 3, c'est un beau moment! L'univers du Burgue, ville humaine où se sont réfugiées de nombreuses créatures féériques après une défaite militaire, est extrêmement bien rendu; il s'agit essentiellement d'une ville victorienne, mais avec son fonctionnement politique, sa religion, ses règles, etc. C'est une très belle création d'univers et, pour une fois, ce n'est pas une adaptation mais une création originale! Les costumes et les ambiances sont également très beaux, et les personnages prennent progressivement du relief, jusqu'à vous laisser sur une fin plutôt haletante qui donne fortement envie de savoir ce qu'il adviendra de Carnival Row, le quartier des peuples féériques, dans la deuxième saison. Ajoutez à cela que les femmes, malgré qu'elles évoluent dans une société qui ne leur semble pas favorable, sont maîtresses de leur destin, qu'Orlando Bloom est toujours aussi séduisant, que plein de personnages humains et non humains sont joués par des acteurs noirs sans que la chose n'ait la moindre importance et qu'on retrouve Indira Varma, que je n'ai pas revue depuis Rome, et vous comprendrez que je recommande chaudement.

Love Death + Robots – saison 2 – 2021

Deux ans après une première saison très réussie, cette deuxième saison m'a laissée sur ma faim. Bien sûr, il est impossible de trouver tous les épisodes aussi bons les uns que les autres quand on change totalement d'histoire, d'univers et de dessin d'un épisode à l'autre, mais là, bon, je n'ai pas sauté au plafond. En même temps, la première saison avait mis la barre très haut... Mes épisodes préférés: l'aspirateur tueur et l'histoire de Noël. Celui que je n'ai pas du tout aimé: les baleines extraterrestres, même si, en fait, les baleines étaient superbes.
PS: Il n'y a pas de chat et ça, c'est nul.

Et le reste

Outre mon Cheval Magazine habituel, j'ai lu un ancien numéro de la revue Books, qui allie chroniques de livres, dossier thématique et extraits traduits, et, surtout, j'ai lu le Bifrost numéro 102, dont le dossier est consacré à Arthur C. Clarke. Ce fut une lecture fort agréable, comme toujours, même si j'ai eu l'impression d'avoir lu chez eux des dossiers plus fouillés et que je n'adhère pas à 100% à l'idée de choisir la nouvelle l'Étoile pour faire découvrir l'auteur au public. Quelques chroniques m'ont paru virulentes (en même temps, quand on voit qui les a rédigées...) et les femmes sont toujours aussi rares: une traduction signée Michelle Charrier et quelques chroniques signées Stéphanie Chaptal et Karine Gobled. Ça m'énerve tellement venant d'un éditeur qui se positionne du côté progressiste de l'échiquier politique, ça m'énerve, ça m'énerve... 🤷‍♀️

jeudi 27 mai 2021

Ford County Stories (2009)

J'ai découvert John Grisham il y a plusieurs années avec ce recueil de nouvelles, que j'avais récupéré auprès d'un copain, et comme ma pile à lire est microscopique et que je peux m'offrir le luxe de faire des relectures cette année, j'ai eu envie de le relire...

Blood Drive: Trois hommes quittent le comté de Ford, dans le Mississipi, en urgence pour donner leur sang à une connaissance, un ouvrier qui a eu un grave accident et qui est hospitalisé à Memphis. Sauf que... rien ne se passe comme prévu, à commencer par le fait que l'un d'entre eux engloutit bière sur bière dans la voiture. Ce texte est très drôle dès les premières pages, où Grisham décrit la propagation des rumeurs au sein de la ville et les réactions collectives. Quand les trois arrivent à la boîte de strip tease, je me marrais carrément. C'est une bonne entrée en matière. Grisham sait clairement y faire!

Fetching Raymond: Une femme en fauteuil roulant et ses deux fils quittent le comté de Ford pour rendre visite au cadet de la fratrie, emprisonné à deux heures de là et, on l'apprend assez vite, condamné à être exécuté le soir même. Là aussi, c'est très drôle, car Grisham rend le petit frère tout à fait horripilant. Puis... Bon... On rigole moins à la fin...

Fish Files: Un avocat de Clanton, le siège du comté de Ford, reçoit une offre alléchante concernant un vieux dossier-poisson qu'il avait totalement oublié. Les dossiers-poissons, ce sont les dossiers qu'il met dans un coin et qui puent de plus en plus avec le temps. 😅 Là, une entreprise offre à ses clients une petite fortune pour régler une vieille affaire de blessure engendrée par ses produits (un genre de tronçonneuse je crois, je ne me souviens plus des détails). Ce texte est moins bon que les deux précédents, mais quand même sympa.

Casino: Un habitant peu recommandable de Clanton s'invente des origines indiennes pour se lancer dans la grande aventure du casino. Un autre habitant, désespéré par le départ de sa femme qui l'a quitté pour le premier personnage, commence à fréquenter ledit casino. Et il découvre qu'il est très bon aux cartes. Très, très bon. Un texte drôle, une fois de plus, grâce à tout le processus de revendication abusive des origines indiennes et l'ironie mordante de l'auteur.

Michael's Room: Un avocat de Clanton est kidnappé pendant ses courses et obligé à affronter les conséquences d'une affaire qu'il a traitée des années plus tôt. Ce texte est plus sombre mais aussi moins marquant. On perd rapidement toute empathie pour le personnage principal...

Quiet Haven: Le nouvel employé d'une maison de retraite réunit discrètement des éléments gênants pour ses collègues, comme des photos montrant des problèmes d'hygiène, et se rapproche d'un vieux monsieur aux ardeurs libidineuses très gênantes. Comme dans Fish Files et Casino, on se passionne pour les agissements d'un gars super malhonnête, et la scène où il emmène son octogénaire voir un film porno au cinéma en plein air est assez savoureuse...

Funny Boy: En 1989, Adrian Keane, un habitant blanc de Clanton, parti en Californie depuis des années, revient en ville, soulevant un raz-de-marée de rumeurs. Il serait terriblement malade et condamné... Sa famille ne voulant pas de lui, il s'installe chez une femme noire âgée, Emporia, dans la partie de la ville habitée par les noirs. Grisham offre ici une histoire de qualité, simple et riche à la fois. Il y parle du SIDA, d'homosexualité, de rejet des différences, de ségrégation raciale et de deux êtres humains qu'on ne peut qu'aimer. Il fait toujours preuve de beaucoup d'humour (les rumeurs de Clanton, je vous jure 😂) , mais impossible de rester de marbre face à cette souffrance et cette amitié.

"The thought of a Keane living across the railroad tracks in the black section was hard to accept, but then it seemed logical that anyone with AIDS should not be allowed on the white side of town."
Traduction maison: "L'idée qu'un Keane vive de l'autre côté de la voie ferrée, dans la partie noire, était difficile à accepter, mais il semblait logique que quelqu'un qui avait le SIDA ne soit pas autorisé à rester du côté blanc de la ville."

Une simple phrase, et Grisham en dit beaucoup...

Vous avez peut-être remarqué qu'il y a beaucoup d'avocats dans ce recueil. Grisham a fait des études de droit et les utilise massivement dans ses bouquins, il y a toujours des détails ou des imbroglios juridiques et ça fait partie du charme. Dans Fetching Raymond, c'est même spectaculaire! J'aime beaucoup ce mélange d'humour, de lucidité quant à l'état de la société du Mississipi et de suspense. Je trouve Grisham très fort, décidément; il réussit à créer des "bouquins de plage" super intéressants et pas bêtes du tout et je lui tire mon chapeau!

Autres livres de l'auteur déjà chroniqués sur le blog

samedi 22 mai 2021

Comment parler à un alien? Langage et linguistique dans la science-fiction (2018)

Chronique express!

Frédéric Landragin, docteur en informatique-linguistique et directeur de recherche au CNRS, propose dans cet ouvrage paru au Bélial' d'étudier le traitement du langage proposé par les œuvres de science-fiction (qui deviennent, du coup, de la linguistique-fiction). De nombreux romans et films ont en effet imaginé des langues humaines alternatives ou des langues extraterrestres et se sont penchés sur la difficile communication entre notre espèce et une autre. Pour cela, l'auteur revient sur les bases de la linguistique, ce qui m'a bien rafraîchi la mémoire – car la fac, c'est loin, hélas... Avant d'explorer les langages imaginaires, vous y découvrirez donc ce que sont les morphèmes et les phonèmes et réfléchirez à la différence essentielle entre signifié et signifiant. Je n'ai rien retenu de mes cours de linguistique au-delà de ces deux points, mais j'aime bien cette matière car elle vous détache complètement de la langue que vous utilisez au quotidien et vous fait soudain prendre conscience que le langage n'a rien d'évident.

Un ouvrage facile et plaisant à lire, qui instruit et offre des idées de lecture à tout va. C'est une belle réussite. Si cette chronique est si courte, c'est parce que les copains ont déjà tout dit, donc n'hésitez pas à consulter les liens ci-dessous pour en savoir plus. ⤵

Allez donc voir ailleurs si cette linguistique-fiction y est!

lundi 17 mai 2021

The Right Hand of Doom and Other Tales of Solomon Kane (2007)

Une dizaine d'années après ma première lecture, j'ai retrouvé avec un immense plaisir Solomon Kane, un des personnages de Robert E. Howard. Cette édition Wordsworth réunit dix nouvelles publiées dans Weird Tales entre 1928 et 1932 ou bien de manière posthume en 1968 et ayant pour personnage principal un mystérieux puritain...

Dans le premier texte, Solomon Kane (aussi connu sous le nom Red Shadows), Solomon Kane poursuit un brigand français jusqu'au fin fond de la jungle africaine, où il assistera à un exploit de magie noire accompli par N'Longa, un sorcier qui lui offrira un bâton magique, un "bâton ju-ju". J'adore N'Longa, qui a une très haute opinion de lui-même! On le retrouve dans The Hills of the Dead, une histoire de vampires...

Skulls in the Stars et The Right Hand of Doom sont des histoires de meurtre, la deuxième évoquant fatalement Maupassant à quiconque a lu La Main d'écorché. Vient ensuite Rattle of Bones, une histoire délicieusement prévisible se déroulant dans une auberge.

The Moon of Skulls est un texte que Clark Ashton Smith et H. P. Lovecraft auraient pu concevoir, même s'ils auraient, bien entendu, employé un style très différent. Nous sommes au fin fond de l'Afrique, dans un coin isolé et inexploré par les blancs et que même les habitants noirs redoutent. Isolée de tout, insoupçonnée du monde, se dresse une ville gigantesque et majestueuse, rescapée d'une époque que l'humanité a oubliée, et à sa tête règne Nakari, une reine implacable et sanguinaire.

Dans The Footfalls Within, texte Lovecraftien s'il en est, c'est dans une autre jungle que Kane est confronté à une créature démoniaque, libérée de sa prison antidéluvienne par un vendeur d'esclaves trop peu prudent...

Wings in the Night met en scène un village africain harcelé par un terrible fléau, des créatures ailées affamées de chair humaine.

Dans Blades of the Brotherhood, point de magie, mais une histoire de règlements de compte et de pirates, avec un combat spectaculaire dans lequel Kane tue l'homme qu'il traque depuis deux ans après avoir fait avancer, centimètre par centimètre, une lame contre son cœur. Une description puissante qui vous donnerait presque pitié de ce vil individu...

Les nouvelles se concluent par Death's Black Riders, un texte incomplet – à peine une page – que j'aime beaucoup.

J'aime beaucoup le fait que Howard ait mis Kane en scène dans notre monde, mais à une époque où, les temps de trajet étant dix mille fois plus longs que maintenant et la planète dix mille fois moins cartographiée, on pouvait sérieusement imaginer découvrir des créatures surnaturelles ou des cités perdues. Il a aussi repris des mythes grecs ou hébreux, comme les harpies de Wings in the Night ou la figure du roi Salomon. D'ailleurs, le prénom de Solomon a son importance.

En parallèle, Kane reste un puritain fanatique, Howard le dit clairement, mais c'est très léger (rien à voir, par exemple, avec le Nicolas Eymerich de Valerio Evangelisti!); il ne condamne pas tellement les autres religions, se contentant de traiter les vendeurs d'esclaves musulmans d'infidèles (ce qu'ils lui rendent bien, me semble-t-il), mais est enclin à invoquer Dieu et la Bible à de multiples reprises, même si Howard ne nous cache pas (contrairement à Kane qui l'ignore lui-même) que sa mission divine est une bonne excuse pour exercer la vengeance et tuer (et ça, c'est comme Nicolas Eymerich!). Mais c'est aussi un homme doux et sincèrement bienveillant. Et il poursuit un appel incompréhensible qui l'incite à errer toujours, généralement vers l'est, sans savoir où il va...

Cette édition Wordsworth comprend aussi trois très courts récits en vers: un sans titre, The One Black Stain, qui mentionne Francis Drake et nous permet ainsi de dater les évènements dans la deuxième moitié du XVIe siècle, et Solomon Kane's Homecoming. Howard était un excellent poète, c'est ce qui m'a le plus séduite lorsque j'ai lu Conan, dont certaines nouvelles comprennent des strophes en vers, et c'est un plaisir de le lire.

Évidemment, les aventures de Solomon Kane ne plairont pas à tout le monde, mais si vous aimez les aventuriers solitaires, le surnaturel qui ne fait pas peur et surtout le bruit et la fureur, c'est merveilleux.

Allez donc voir ailleurs si ce puritain y est!
L'avis de Lorhkan

mercredi 12 mai 2021

Le Miroir aux éperluettes (2007)

Chronique express!

Des années après l'avoir repérée, j'ai enfin découvert l'œuvre de Sylvie Lainé grâce à Vert, qui m'a mis plusieurs de ses livres entre les mains. J'ai commencé par le recueil le Miroir aux éperluettes, paru en 2007 et réunissant cinq nouvelles publiées de 1985 à 2003 et un inédit datant de 1985. Au total six textes courts, qui explorent des situations étranges, légèrement ambiguës, où une personne est confrontée à quelque chose de très différent d'elle-même. C'est la rencontre de l'autre, pour résumer très brièvement.

Si je ne peux pas dire avoir été emballée outre-mesure par ce recueil, il s'est toutefois avéré très plaisant à lire et je retiens particulièrement un Rêve d'herbe, qui relève plus nettement du fantastique, genre que j'affectionne, ainsi que, dans une moindre mesure, la Mirotte, à cause de sa chute qui est à proprement parler vertigineuse. En revanche, je ne pense pas avoir compris Thérapie douce, qui parle de relations humaines, et un Signe de Setty, qui évoque une intelligence articielle. Cela ne m'empêchera pas de lire les trois autres recueils qui m'attendent, donc vous allez entendre parler de Sylvie Lainé cette année! 😊

Allez donc voir ailleurs si ce miroir y est!
L'avis de Vert

vendredi 7 mai 2021

La gamelle d'avril 2021

Coup d'œil sur le mois d'avril, qui, comme toujours, est passé bien trop vite.

Sur petit écran

Rebecca d'Alfred Hitchcock (1940)

Après avoir lu et adoré Rebecca de Daphnee du Maurier, il fallait, bien sûr, que je regarde l'adaptation cinématographique de Hitchcock, qui a remporté l'Oscar du meilleur film et de la meilleure photographie. Le film est très fidèle, même s'il doit, inévitablement, éliminer certains éléments pour tenir dans une durée raisonnable et s'il adoucit certains points de l'intrigue ([divulgâcheur] dans le roman, Maxim tue Rebecca de manière tout à fait délibérée, la chose n'a rien d'un accident [fin du divulgâcheur]), probablement parce que le cinéma était (et est encore) plus contrôlé que la littérature. C'est une belle réussite, en tout cas: Manderley est superbe et peut-être encore plus envoûtante que dans le roman et Hitchcock montre bien l'ombre de Rebecca qui plane sur les évènements, ce qui relève du génie vu que le personnage est mort et n'est jamais montré, même pas en photo ([divulgâcheur] quand Maxim avoue le meurtre, la caméra suit le mouvement de Rebecca dans la pièce en filmant simplement les meubles et les murs, mais avec la voix de Maxim et l'ambiance, ça marche très bien [fin du divulgâcheur]). Le jeu d'acteur est daté, évidemment, mais Joan Fontaine incarne très bien la narratrice gauche et effrayée, Laurence Olivier fait un bon aristocrate décontracté et Judith Anderson est très forte en intendante glaciale et flippante. Un bon Hitchcock, dirais-je, même si je connais trop mal sa filmographie pour avoir un avis tranché.

Sur grand écran

Toujours rien, pour des raisons évidentes.

Du côté des séries

True Detective de Nic Pizzolatto – saison 1 (2014) réalisée par Cary Joji Fukunaga

Il m'aura fallu sept ans, mais j'ai enfin regardé cette saison dont j'attendais énormément, en partie parce que sa réputation la précède, en partie parce que je savais qu'elle tourne autour du Roi en jaune de Robert W. Chambers et en partie parce qu'elle est réalisée par Fukunaga, réa que je tiens en immense estime depuis que j'ai vu Sin Nombre (il doit d'ailleurs être bien le seul réalisateur que j'ai connu et apprécié avant qu'il ne devienne célèbre!). Eh bien, je n'ai pas été déçue. Le scénario est bon, l'intrigue est ultraprenante, la mise en scène est magistrale, l'ambiance malsaine et poisseuse est étouffante et les acteurs sont tout bonnement excellents: Matthew McConaughey crève l'écran, mais Woody Harelson prend de l'ampleur dans des plans rapprochés assez dingues quand son personnage est furieux et Michelle Monaggan est très bien aussi. Je pense que je n'aurais pas respiré, pensé, rêvé et vécu True Detective avec une telle intensité si je n'avais pas été totalement "aïpée" par le Roi en jaune, mais c'est vraiment une saison de très haute volée. Il y a énormément à dire sur les rapports entre les deux personnages principaux, la violence de Marty, l'ambiance ultraflippante de scènes où il ne se passe rien (le "monstre" de la fin de l'épisode 3, putain j'ai agrippé mon fauteuil!!), la déliquescence sociale d'une Louisiane misérable recroquevillée sur elle-même dans le bayou, la représentation des femmes (exclusivement des prostituées ou des "femmes de", même si le personnage de Maggie en dit long sur un certain égoïsme masculin) et la mise en scène ma-gis-tra-le d'une certaine fusillade. Je n'ai pas assez d'éloges pour cette saison qui m'a tellement enthousiasmée que je l'ai regardée à raison de deux épisodes par semaine, soit deux fois plus vite que mon rythme habituel. J'écoute le générique en boucle et, quand je marche dans la forêt, je regarde les branchages d'un œil soupçonneux. 👀 "You're in Carcosa, man!"

Et le reste

Outre mon Cheval Mag habituel, j'ai lu le Monde Diplomatique de mars, acheté pour soutenir le journal le Monde, ma principale source d'information depuis un an (et parce que Mona Chollet y travaille). Je m'attendais à du journalisme pointu et de gauche, mais j'avais totalement sous-estimé la longueur des articles (de dix à vingt minutes de lecture concentrée) et j'ai été surprise par le ton partisan, qui s'exprime à travers des choix de vocabulaire très forts. Je l'ai mis aux toilettes en pensant le lire tranquille en une ou deux semaines, mais j'ai vite compris qu'il me faudrait une constipation ou une quelconque maladie intestinale grave pour vraiment le lire sur un laps de temps aussi court. 🤣🤣 Du coup, je le rachèterai sûrement, mais de manière très ponctuelle, une ou deux fois par an.

dimanche 2 mai 2021

We Have Always Lived in the Castle (1962)

Après The Turn of the Screw et Rebecca, je me suis penchée sur une troisième histoire de maison et de hantise avec We Have Always Lived in the Castle de Shirley Jackson, une autrice que je souhaite découvrir depuis longtemps et à laquelle je m'attaque enfin sous l'influence du Bifrost n°99, qui lui est consacré.

L'intrigue: Mary Katherine Blackwood vit avec sa sœur Constance et son oncle Julian dans la maison Blackwood. Ils sont les seuls survivants d'un terrible drame: six ans plus tôt, toute leur famille a été empoisonnée à l'arsenic. Constance a été accusée du meurtre, puis acquittée. Depuis, ils mènent tous trois une existence cloîtrée. Seule Mary Katherine, surnommée Merricat, quitte la maison deux fois par semaine afin de faire les courses et de passer à la bibliothèque du village, et ils reçoivent uniquement la visite du médecin et d'une amie ou deux pour le thé.

Bon, alors, ce roman n'est pas franchement facile à chroniquer.

Déjà, il ne se passe quasiment rien, donc on ne peut pas vraiment parler du peu qu'il se passe, de peur de raconter la moitié de l'intrigue. Le résumé ci-dessus correspond aux deux ou trois premiers chapitres.

Ensuite, ce livre est assez particulier, et cela tient au fait que Mary Katherine raconte l'histoire à la première personne et fait une narratrice très particulière. En effet, elle ne raisonne pas du tout comme une personne "normale". Elle fait preuve d'une paranoïa aiguë envers les habitants du village et le monde extérieur et pratique la pensée magique pour se protéger et protéger ses proches. Par exemple, elle enterre ou suspend des objets dans le domaine Blackwood afin d'empêcher les éventuelles intrusions extérieures. Elle parle régulièrement "d'aller sur la Lune" et écoute son chat lui raconter des histoires.

Le ton est donné dès le premier paragraphe, où elle annonce qu'elle aurait pu être un loup-garou, parce que les majeurs de ses deux mains font la même longueur. Je me suis demandée s'il s'agissait d'une référence à une croyance populaire que je ne connaîtrais pas, mais, après plusieurs occurrences du même genre, j'ai compris que c'est sa vision du monde. À l'heure actuelle, j'imagine qu'on lui diagnostiquerait un trouble mental.

En écoutant son récit, le lecteur est amené à adopter son point de vue et c'est brillant. Shirley Jackson fait très, très fort. On est plongé dans cette haine de l'extérieur et cet amour des petits détails et des routines: manger dans la cuisine où Constance prépare des repas succulents, se cacher dans une tanière de feuilles avec le chat Jonas, faire la même chose le même jour toutes les semaines.

En parallèle, Shirley Jackson fait monter le suspense avec brio. Car, bien sûr, un élément perturbateur vient enrayer cette routine pluriannuelle: l'arrivée du cousin Charles. Mais il n'y a pas que ça. Dès le premier chapitre, où Merricat raconte comment elle fait ses courses et comment se comportent les habitants du village, on est écrasés par une atmosphère pesante, qui pousse, en effet, à rechercher le calme et l'immobilité de la maison Blackwood. Autre exemple: la manière dont l'oncle Julian raconte le meurtre de toute la famille à une femme venue prendre le thé. Deux dialogues séparés se recoupent et font formidablement monter le suspense.

Au fond, ce roman parle de la difficulté d'être différents de la norme et de l'interaction difficile entre le foyer, synonyme de sécurité, et l'extérieur, source de dangers. Mais aussi de la méchanceté humaine, par exemple avec [divulgâcheur] une prise de possession bien virilement arrogante de la part du cousin Charles, un petit salaud appâté par les rumeurs sur la fortune des Blackwood, et les comportements odieux des villageois, d'abord par des moqueries puis par le vandalisme perpétré dans la maison ravagée par l'incendie, une vraie attaque de meute portée par la haine de ce qu'elle ne comprend pas et dont elle a peur [fin du divulgâcheur].

Il m'a fallu trois jours pour lire les quarante premières pages car je m'endormais dessus (la faute au manque de sommeil, pas au livre, hein!); le quatrième jour, j'ai lu les cent pages restantes d'une traite et j'ai crié au génie.

Une remarque en passant: [divulgâcheur] We Have Always Lived in the Castle rejoint Jane Eyre de Charlotte Brontë et Rebecca de Daphnée du Maurier dans une belle trilogie de romans sur des maisons où les choses ne sont pas ce qu'elles semblent être et où ça se termine en incendie 😂 [fin du divulgâcheur].

Pour info, cette édition Penguin Modern Classics contient une postface de Joyce Carol Oates que je n'ai pas bien comprise et qui m'a semblé pousser l'interprétation très loin.

mardi 27 avril 2021

10!!

Aujourd'hui, le blog fête ses dix ans! 🥰🥰 Tout a commencé le 27 avril 2011...

Portée par un enthousiasme délirant, j'ai décidé, il y a plusieurs mois, d'organiser un concours – plus précisément un concours à modalités truquées et à lots mystère – pour remercier certains lecteurs et lectrices qui me sont particulièrement chers. Le concept était simple: ils étaient inscrits d'office, qu'ils le veuillent ou non, et je leur envoyais un truc par la poste. À l'inverse, les gens que je n'aime pas, ou qui me connaissent dans la vraie vie et font semblant que mon blog n'existe pas, pouvaient s'inscrire autant qu'ils le voulaient, ils avaient déjà perdu. 👀

Et puis, le temps passant, toutes mes belles idées de cadeau se sont évanouies de mon esprit. Donc, pas de concours. Je pense que j'offrirai un restau aux copines quand on pourra aller au restau, et puis voilà. 🤣

Je me contenterai donc de répéter ce que je dis tous les ans: ouvrir ce blog a été une des meilleures décisions de ma vie. Il a énormément enrichi mon expérience de lectrice, a élargi mes horizons et m'a fait découvrir des gens formidables – y compris hors ligne, ce qui est quand même plutôt cool!

Un grand merci à tous ceux qui passent ici et nourrissent les échanges. C'est toujours un plaisir immense de vous lire et je vous dois beaucoup! J'espère que la blogo en a encore pour dix ans de plus, au moins!

jeudi 22 avril 2021

Schluss? (2006)

Durant l'hiver 1945, dans la province de Prusse-Orientale, la propriété du Georgenhof accueille les derniers membres de la noble famille des von Globig: Katharina, une femme quelque peu planante, son fils Peter et la tantine, qui fait tourner la maisonnée. Le père est en Italie avec la wehrmacht. Ils accueillent régulièrement des gens de passage, qui sont, à des degrés divers, en train de fuir l'avancée des Russes sur le front de l'Est.

Walter Kempowski est un écrivain allemand qui semble connu et reconnu dans son pays. En France, il est traduit par Olivier Mannoni, raison pour laquelle je me suis interessée à ce bouquin. Dans un premier temps, le roman n'a pas soulevé un enthousiasme délirant de ma part. Il se lit bien, ça coule tout seul, mais le quotidien des personnages n'est pas franchement palpitant. Ça correspond un peu à l'idée que je me fais de de la littérature blanche contemporaine: c'est sympa, c'est intéressant, mais ce n'est pas marquant.

Toutefois, mon intérêt a augmenté progressivement. D'une part, vers la moitié du roman, Katharina cache un Juif chez elle. Cet acte héroïque est traité avec un détachement et quasiment une incompréhension assez particuliers qui, je crois, ont dû réellement s'appliquer au cours de l'histoire. En tout cas, je crois que j'aurais un peu ce ressenti-là si je devais cacher un fugitif chez moi. 😅 Puis, dans le dernier quart, c'est l'exode: les combats éclatent sur le front qui était stable depuis un moment, les civils fuient vers l'Ouest et le Reich et le livre prend une tout autre dimension en basculant dans l'horreur. Pas forcément l'horreur gore, mais l'horreur de voir tant de gens sur les routes, certains encore accrochés à la conviction que la wehrmacht va renverser la situation, d'autres maintenant en place les structures de l'État nazi alors que tout s'est déjà délité. Et puis, les vols, la confusion... Et puis, les vies qui valent de moins en moins cher, les corps gelés au bord de la route...

Ces passages m'ont rappelé deux romans qui m'ont marquée.

D'abord, Suite française, dans lequel Irène Némirovsky parle de l'exode des Parisiens face à l'avancée de la wehrmacht. On retrouve la même incrédulité, la même incapacité à comprendre que le monde que l'on a connu a déjà été balayé et que plus rien ne sera comme avant. Certains s'accrochent à des objets – l'argenterie, ce précieux manuscrit – mais toi, lecteur, qui sait comment ça s'est terminé, tu as envie de leur crier de se casser de là sans tarder parce que le rouleau compresseur est lancé et n'aura pitié de personne et que des gens crèvent, putain, qu'est-ce qu'on s'en fout de ton précieux manuscrit! Et bien sûr, maintenant que 2020 est passé par là, on a tous plus ou moins vécu des contrariétés face à l'épidémie de COVID-19 qui, un, deux ou trois mois plus tard, nous ont fait penser "pfiou, j'étais tellement naïf à l'époque"....

Ensuite, Die verratene Armee, un livre d'Heinrich Gerlach que j'ai lu traduit en anglais (par qui?? Je n'en sais rien, je ne trouve pas de nom de traducteur en ligne et je n'ai pas le bouquin...) sous le titre The Forsaken Army. Gerlach était soldat dans la wehrmacht et a combattu à Stalingard, où il a subi le siège des Russes. Ce bouquin m'a dressé les cheveux sur la tête. J'étais plus jeune à l'époque, peut-être qu'il ne me ferait pas le même effet aujourd'hui. Mais c'est horrible, ce qu'ont vécu les soldats allemands à Stalingrad. On n'en parle pas parce qu'on ne peut pas rentrer dans les détails à l'école et parce qu'on a peu d'empathie envers le pays qui a provoqué la Seconde Guerre mondiale, mais ces hommes encerclés et abandonnés par leur Führer ont vécu l'enfer. Je garde un souvenir épouvanté des "renforts" promis par la radio, qui se révèlent, une fois arrivés, être les malades de l'infirmerie remis sur pieds de force et renvoyés au front! Une armée en béquilles...

Schluss? va beaucoup moins loin que ce dernier roman dans la noirceur, mais il vous plonge aussi dans ces journées de fin du monde. Il raconte d'ailleurs, bel et bien, la fin d'une certaine bourgeoisie/aristocratie pré-Seconde Guerre mondiale, qui n'a jamais retrouvé le lustre d'antan après la guerre. Une bonne manière de voir l'histoire du côté allemand, pour une fois, et de se souvenir que le jusqu'auboutisme de l'état-major allemand et son refus de la capitulation a provoqué bien des malheurs et des morts encore plus inutiles que les précédents...

samedi 17 avril 2021

Rebecca (1938)

"Last night I dreamt I went to Manderley again."

L'incipit de Rebecca de Daphne du Maurier est célébrissime. Et, dans sa simplicité même, il fait l'introduction parfaite d'un roman qui touche à la perfection.


L'intrigue: la narratrice se remémore la manière dont, alors qu'elle était une jeune femme inexpérimentée de vingt-et-un ans, elle a rencontré Maxim de Winter, un riche veuf anglais, durant un séjour à Monte-Carlo. Elle accompagnait alors une dame aisée en qualité de dame de compagnie, tandis qu'il se consacrait à de longs trajets en voiture le long de la côte. Quasiment sans un mot, l'amour éclôt, les deux se marient et, après une lune de miel en Europe, ils rentrent en Angleterre pour s'installer à Manderley, la superbe demeure familiale des de Winter. Mais dans ce luxe feutré aux habitudes bien réglées, une ombre occupe tout l'espace: bien que Rebecca, la première femme de Maxim, soit morte depuis quasiment un an, on devine encore sa présence dans le moindre détail.

Difficile de parler de Rebecca tellement ce roman est superbement bien écrit. C'est vraiment extraordinaire. Dès le premier chapitre, dans lequel la narratrice décrit le terrain entourant la demeure, ça déborde de détails et de senteurs, avec une netteté extraordinaire. La seule autre personne qui écrit comme ça, c'est Anne Rice; mais c'est quand même très différent, Anne Rice a quelque chose de plus riche et décadent.

Manderley, c'est donc une riche demeure de campagne à la Downton Abbey. Derrière la façade magnifique et le luxe tellement luxueux qu'il peut se permettre d'être discret, il y a une main de femme, reconnaissable dans le moindre détail: la décoration, les œuvres d'art, la papeterie, les repas... C'est Rebecca. Partout où notre narratrice tourne le regard, elle voit Rebecca. C'est Rebecca que le vieux chien aveugle attend. C'est Rebecca qui dicte l'horaire et le contenu des repas. C'est Rebecca que l'intendante regrette amèrement. C'est à Rebecca que tout le monde compare la nouvelle épouse. C'est Rebecca qui occupait la plus belle chambre de la maison, conservée telle quelle depuis sa mort.
"Rebecca, always Rebecca. Wherever I walked in Manderley, wherever I sat, even in my thoughts and in my dreams, I met Rebecca. [...] Rebecca, always Rebecca. I should never be rid of Rebecca."
Comme me l'a dit une amie, ce bouquin parle d'une "différente forme de hantise". Je l'ai lu pour le plaisir de la maison hantée; j'ai trouvé une obsession qui paraît à la fois incroyablement démesurée et parfaitement vraie – moi aussi, j'ai été hantée ainsi par des gens auxquels je me comparais sans cesse, généralement à mon désavantage, parfois dès que je sortais de mon lit le matin. Je connais bien cette sensation de ne pas être à sa place et de ne pas maîtriser les codes sociaux du milieu dans lequel on évolue. Je retiens, par exemple, le moment où la narratrice réfléchit à sa lingerie, imaginant ses femmes de chambre comparer le tissu de ses bas aux bas autrement plus fins que portait Rebecca... Timide, inexperte et gauche, elle ne sait où se mettre et n'ose pas creuser sa place, pas même auprès du personnel qui est censé la servir. Ainsi, la première fois que l'intendante, l'effrayante Mrs Danvers, lui demande quelle sauce servir avec le repas, elle répond: "ce que prenait Mrs de Winter". C'est la narratrice qui est devenue Mrs de Winter, mais ce titre est essentiellement utilisé en référence à l'autre Mrs Winter, celle qui s'est noyée et dont le corps a été repêché à des dizaines de kilomètres de là. Ce roman est une sorte d'illustration géante du syndrome de l'imposteur. Il illustre aussi combien le mythe de Cendrillon est trompeur. Pour une jeune femme pauvre, trouver l'amour en la personne d'un homme riche et le suivre dans sa demeure enchantée n'est pas forcément une bonne chose, et cela peut même tourner au cauchemar dans un milieu réglé jusque dans les moindres détails où les convenances sont reines. Et je pense que du Maurier a voulu montrer que ce carcan social est bien plus étouffant pour les femmes que pour les hommes...

Bien sûr, Rebecca, elle, était la maîtresse de maison parfaite, aussi belle, envoûtante et charmante qu'attachante. Tout le monde en garde un souvenir extraordinaire et certains peinent à accepter sa disparition. Sa fidèle Mrs Danvers pousse la chose jusqu'au morbide. La grand-mère de Maxim, dont l'esprit est embrouillé par l'âge, ne comprend pas qui est cette nouvelle épouse et demande, en pleurnichant, qu'on lui amène Rebecca...

Au-delà de sa rédaction superbe et de sa double ambiance de fous (Manderley, la maison superbe, et Rebecca, la morte qu'on devine encore partout), Rebecca est aussi haletant à lire à partir d'une certaine révélation. Le rythme s'accélère, le piège se referme. J'avais deviné cet élément-là, même si je n'avais pas identifié le pourquoi ([divulgâcheur] je pensais que Maxim avait tué sa femme à cause d'un adultère, alors que c'est à cause de sa grossesse [fin du divulgâcheur]). Mais, à la fin, boum, je suis restée scotchée: [divulgâcheur] le dernier coup de bluff de Rebecca, quel truc de fous. J'ai cru JUSQU'AU BOUT qu'elle était enceinte [fin du divulgâcheur]).

Le seul reproche qu'on pourrait faire à Rebecca, c'est que la narratrice effacée est, justement, trop effacée. Difficile d'imaginer une personnalité aussi discrète, aussi incapable de formuler la moindre exigence et allant jusqu'à cacher à ses domestiques qu'elle a cassé un objet de peur d'être réprimandée! Mais cela fait partie de la structure du livre: face à la figure titanesque de Rebecca, qui est tout simplement plus grande que nature, on ne peut que se faire tout petit.

Alfred Hitchcock a adapté ce roman au cinéma en 1940 et a remporté l'Oscar du meilleur film. Je vous en parle bientôt.

lundi 12 avril 2021

Les BD du premier trimestre 2021

Aujourd'hui, retour sur les bandes dessinées que j'ai lues en ce début d'année.

La Gameuse et son chat 1 de Wataru Natadani (2019)


Charmant manga sur une joueuse de jeux vidéo qui adopte, sans bien savoir pourquoi, un petit chaton que quelqu’un a trouvé sur son lieu de travail. La vie à deux se met en place, mais il est difficile de jouer autant qu’avant lorsqu’une boule de poils tape frénétiquement sur la manette ou passe devant l’écran… Ce manga est très mignon et parlera à tous les propriétaires de chat. Si en plus vous aimez les jeux vidéo, vous devriez vous y retrouver facilement. Je lirai la suite.
Éditeur: Bamboo

Conan le Cimmérien. La Maison aux trois bandits de Patrice Louinet et Paolo Martinello (2020)


Avec son ambiance fantastico-médiévale entre des murs de pierre, le dixième tome des adaptations des nouvelles de Robert E. Howard consacrées à Conan m’a beaucoup plu. C’est du Conan tout craché, poitrines féminines opulentes comprises. Il faut tellement que je relise Conan, ouin ouin. En revanche, les dessins sur deux pages sont assez chargés, j’ai parfois eu du mal à m’y retrouver.
Éditeur: Glénat

Conan le Cimmérien. Le Dieu dans le sarcophage de Doug Headline et Emmanuel Civiello (2020)


Le onzième tome de la collection est lui aussi tiré d’une histoire très classique, avec l’ombre d’un dieu disparu mais pas tout à fait mort qui plane sur un temple et un cadavre étranglé. Tout ce que j’aime. En revanche, j’ai trouvé le dessin inégal; certains plans sur Conan sont superbes, mais d’autres personnages sont grotesques, ce qui m’a empêchée d’adhérer totalement.
Éditeur: Glénat

John Constantine Hell Blazer – Péchés originels de Jamie Delano, John Ridgway et Alfredo Acala, traduit par Jérémy Manesse (1992 aux É.-U., 2008 en France)

Mieux vaut tard que jamais: après avoir écouté l’épisode des GG Comics consacré à ce personnage, je suis enfin passée à l’acte et j’ai attaqué les aventures de John Constantine. Ce volume de Panini paru en 2008 commence par le début en réunissant les numéros 1 à 9 de Hellblazer, parus en 1987 et 1988 chez DC Comics à raison d’un numéro par mois et réunis en volume en 1992. Jamie Delano est au scénario, John Ridgway et Alfredo Acala sont au dessin. En fait, le personnage était d’abord apparu dans une série Swamp Thing, mais c’est ici que commencent ses aventures à lui.
Ça se passe à Londres en 1982. Thatcher est au pouvoir, les inégalités se creusent et Constantine mène plus ou moins l’enquête sur des phénomènes surnaturels. Ou plutôt, disons que des ennuis surnaturels lui tombent dessus où qu’il aille. Deux sectes rivales semblent notamment œuvrer dans l’ombre, impliquant une femme avec laquelle il a noué une relation. Oh, et il est plus ou moins hanté par une ancienne bande d’amis qui sont plus ou moins tous morts à cause de lui…
Bon, je n’ai pas du tout aimé le dessin de ce volume, j’ai trouvé ça assez douloureux, mais j’ai bien adhéré au personnage désabusé et finalement assez passif. Il y a beaucoup de texte et une belle ambiance urbaine, sale et fatiguée avec le contexte dur des années Thatcher. Niveau intrigue, on est très loin de l’adaptation avec Keanu Reeves, mais en même temps Constantine a eu plus de 300 épisodes au fil des ans, peut-être que le film adapte des numéros que je lirai dans mille ans. 🤪🤪
Éditeur: Panini

John Constantine Hellblazer – Le Diable par la queue de Jamie Delano, David Lloyd, Richard Piers Rayner, Mark Buckingham et Bryan Talbot, traduit par Jérémy Manesse (1992 aux É.-U., 2008 en France)


Là, ça se complique. Ce volume publié par Panini en France en 2009 réunit les épisodes 9 à 13 de Hellblazer, parus chez DC en 1988-1989, les deux épisodes de HellBlazer Annual 1 parus jenesaisquand et les deux épisodes de The Horrorist parus en 1995-1996. Franchement, c’est tellement le bordel les comics, je ne m’y retrouverai jamais.
Hélas, j’ai beaucoup moins adhéré à ce tome: les révélations sur ce qu’il s’est passé à Newcastle, échec fondateur de la jeunesse de Constantine, m’ont laissé indifférente; l’épisode de vision d’apocalypse nucléaire sur la plage m’a perdue; le double numéro sur l’ancêtre de Constantine qui discute avec le crâne de Merlin m’a perdue aussi; et, enfin, le dernier épisode m’a plus plu, mais pas non plus emballée. Les dessins sont très variables en fonction du dessinateur. Je suis tristesse.
Panini n’a plus les droits DC pour la France et n’a donc jamais publié le troisième tome des épisodes de la série avec Jamie Delano au scénario. C’est Urban Comics qui a repris la publication à zéro avec trois beaux volumes intitulés "Jamie Delano présente". Le découpage n’étant pas le même, je ne peux pas enchaîner avec le tome 3 d’Urban Comics, sinon il me manquera des trucs qu’Urban a publiés dans les tomes 1 et 2, mais pas Panini. Je vais donc me procurer les trois et je vous en reparle le trimestre prochain.
Éditeur: Panini

mercredi 7 avril 2021

La gamelle de mars 2021

Le temps file, les mois défilent, et je ne comprends pas comment on peut être déjà en avril, sans même parler de 2021. 😄

Sur petit écran

Cendrillon de Clyde Geronimi, Hamilton Luske et Wilfred Jackson (1950)

Petite révision d'un classique Disney. Je vous l'ai déjà dit il y a deux ans, mais je tiens à le répéter: le chat Lucifer est tout bonnement exceptionnel. Il faut voir ce dessin animé juste pour lui. Sinon, le personnage de Cendrillon est intéressant car c'est l'incarnation de la consigne "subis et sois très gentille et tu finiras par être récompensée" – je comprends mieux pourquoi l'âge adulte m'a tant déçue quand je me dis que j'ai grandi en regardant des Disney. 😅

Quai d'Orsay de Bertrand Tavernier (2013)


Je n'ai rien à ajouter à mon rapide avis d'il y a trois ans, si ce n'est que ce film me fait pisser de rire.

Sur grand écran

Toujours rien. Je me demande parfois si je reprendrai l'habitude d'aller au cinéma après une si longue coupure. 🤪

Du côté des séries

Miss Marple – saison 3 (1987-1991)
J'ai regardé les trois derniers épisodes de mon coffret DVD, réunis sous le nom de "saison 3". Bon, en fait, la page Wikipédia de la série n'indique pas du tout un découpage en saisons, et il semble manquer un épisode dans mon intégrale, donc j'ai l'impression que ce coffret a été conçu un peu n'importe comment... Quoi qu'il en soit, cette série d'une grande ringardise aura été très plaisante. Je veux vieillir comme Miss Marple.

Et le reste

Outre mon Cheval Magazine habituel, j'ai lu plusieurs anciens numéros de Livres Hebdo récupérés auprès de Vert et un ancien numéro de Internazionale, un magazine italien reprenant des articles de la presse étrangère (l'équivalent italien de Courrier International, en d'autres termes). Tous ces magazines dataient de janvier à avril 2020, soit juste avant la crise Covid-19 ou en plein dedans, et ç'a été très amusant de relire ce qu'on en disait alors. Ce qui est moins amusant, c'est que rien n'a changé et que le maître-mot est toujours "incertitude". 🤪


Bon mois d'avril, chers lecteurs!