samedi 22 novembre 2025

Au cœur des Méchas (2024)

Chronique express!

"Vous êtes là pour le combat, vous aussi ? Pour voir le Mécha se battre ? On peut attendre ensemble, si vous voulez. C'est votre premier ? Pas moi. Je suis comme qui dirait une habituée."
C'est sur ces mots que s'ouvre cette nouvelle de Denis Colombi. En attendant qu'un Mécha et un Titanide se tapent dessus, une femme raconte tranquillement sa vie à un inconnu dans le public. Le fait qu'elle soit "une habituée" est un léger euphémisme: elle a carrément travaillé durant des années DANS des méchas, avec toute l'équipe technique qui veille à faire tourner ces grosses machines qui défendent la Terre contre l'invasion de créatures gigantesques.

J'avais repéré ce texte chez le Chien Critique grâce à une interview de l'auteur, et c'est une franche réussite. Évidemment, le sujet des Méchas parle à l'hystérique de Pacific Rim qui sommeille en moi, mais, au-delà de ça, tout est très bien fichu: le ton oral qui est naturel mais passe bien à l'écrit, le parcours et l'évolution de la protagoniste, la manière dont on commence à comprendre que quelque chose cloche et dont la perception des Méchas évolue au sein de la société, les sujets sociaux abordés, l'aspect humain dans la machine gigantesque (le Mécha à proprement parler, mais aussi le système administratif et technique derrière), et même l'aspect "autre" des Titanides, qui sont très peu décrits mais ont néanmoins beaucoup de consistance. Un condensé de bonnes choses, en somme, vu que le texte fait à peine 74 pages en petit format! J'ai adoré et je l'ai lu d'une traite. Remercions donc Vert pour ce prêt, retenons un auteur à suivre et félicitons l'éditeur, 1115!

Allez donc voir ailleurs si ces méchas y sont!
L'avis du Chien critique
L'avis de Vert

lundi 17 novembre 2025

Feux (1936)

De Marguerite Yourcenar, j'ai lu et adoré Mémoires d'Hadrien et L'Œuvre au noir, deux romans magistraux absolument stratosphériques. Cette fois, je me suis penchée sur Feux, un court recueil de neuf textes sur des personnages antiques, entrecoupés de réflexions personnelles.

Le thème est celui de l'amour et de la souffrance qu'il engendre lorsqu'il n'est pas réciproque.

Et le titre est Feux.

Donc, oui, Marguerite Yourcenar parle ici des feux de l'amour. 🤣🤣🤣

Après cette petite blague télévisée (et dire que je crois n'avoir jamais vu le moindre épisode des Feux de l'amour 🤣🤣), passons à la liste des textes.

Phèdre ou le désespoir
Achille ou le mensonge
Patrocle ou le destin
Antigone ou le choix
Lena ou le secret
Marie-Madeleine ou le salut
Phédon ou le vertige
Clytemnestre ou le crime
Sappho ou le suicide

Je sors de cette lecture moins enthousiaste que des précédentes, et ce pour deux raisons. D'une part, je connais mal l'Antiquité classique, donc j'ai eu du mal à situer certaines histoires. Qui diable sont Lena et Phédon? Et Clytemnestre et Sappho, ça me dit quelque chose, mais quoi précisément? Même le texte sur Achille, personnage super connu, véritable star de l'Antiquité, parle d'un aspect de sa vie dont je ne savais rien. D'autre part, je n'ai pas toujours bien suivi ce que Yourcenar en disait. Ainsi, j'ai lu Phèdre deux fois et je suis bien incapable de vous dire de quoi ça parle. 

D'un autre côté, j'ai beaucoup aimé Antigone, qui résonne évidemment avec le texte d'Anouilh paru plusieurs années plus tard, Lena qui est tout simplement tragique (et ce d'une manière que je comprends très bien), et Clytemnestre, qui m'a, peut-être paradoxalement, pas mal rappelé la Phèdre de Racine. Et la plume de Yourcenar est dingue même quand je ne comprends pas trop où elle veut aller. Il y a une élégance, une force et un souffle hors de l'ordinaire dans ses écrits, et un sens de la formule assez stupéfiant. Je l'ai vraiment lu avec un grand plaisir formel.

"Créon, couché dans le lit d'Œdipe,
repose sur le dur oreiller de la Raison d'État."
💔💔💔

J'attire votre attention sur la couverture de cette édition Gallimard, dans la collection "L'Imaginaire". Il ne s'agit point de l'imaginaire tel que nous l'entendons, lecteurs et lectrices de ce blog (la SFFF, quoi), mais je trouve très sympathique que les premières lignes du texte soient mises en scène de manière à créer un objet en lien avec le texte. Ici, un petit feu.

Prochaine étape: Nouvelles orientales!

mercredi 12 novembre 2025

Noon du Soleil noir (2022)

Il y a deux-trois ans, quelques amis blogueurs ont mis sur mon radar un petit roman qui fleurait bon la fantasy classique des années trente à cinquante: Noon du Soleil noir de L. L. Kloetzer, c'est-à-dire Laurent et Laure Kloetzer. J'ai mis un peu de temps, mais j'y suis venue.

Et bon, évidemment, j'ai adoré. Je sentais bien que c'était ma came, donc je partais avec un a priori positif, et cela peut avoir joué. Mais bon, en gros, c'était effectivement TOTALEMENT ma came. Une ville genre médiévalo-renaissance, des caravanes, un médaillon ancestral lié à une divinité endormie au fin fond du désert, un guerrier expérimenté, un sorcier, youpi, youpi, youpi, YOUPI!!

On a donc affaire à deux personnages: Yors, le vieux guerrier qui gagne sa vie en jouant les gardes du corps et qui raconte l'histoire (et qui m'a beaucoup rappelé le merveilleux Capitaine Alatriste d'Arturo Perez-Reverte, qui gagne sa vie grâce à son épée et qui manque toujours d'argent), et Noon, un jeune sorcier un peu naïf qui débarque en ville. La magie n'est pas énormément présente pour l'instant, car il y a pas mal de mise en place et de découverte (normal pour un premier tome), mais elle est très sympathique, avec ce monde "du soleil noir" où Noon se transforme en oiseau. En plus, Yors raconte les choses avec pas mal d'humour, et les deux auteurs ont un vrai talent pour les dialogues entrecroisés (des gens qui parlent en même temps mais pas de la même chose), ce qui ajoute à la touche comique.

Je me suis donc éclatée, et je vais évidemment lire la suite. Seul problème: les couvertures de Nicolas Fructus sont tellement canons que je veux posséder ces livres. Ce premier tome, je l'ai emprunté en bibliothèque. Mais je veux l'acheter. Il me le faut. Il me les faut tous, impérativement. Il faut donc que je puisse investir en ce sens, et ce n'est pas une évidence au moment où j'écris ces lignes. Mais je vais y venir. Je vais y venir.

Allez donc voir ailleurs si ce Soleil noir y est!
L'avis de Lorhkan
L'avis de Vert
L'avis de Xapur

vendredi 7 novembre 2025

La gamelle d'octobre 2025

Comme d'habitude, retour sur les activités culturelles du mois, hors lecture.

Sur petit écran

Les Sept Samouraïs de Akira Kurosawa (1954)

Dernière étape dans mon parcours "arts martiaux" de l'été, ce grand classique du cinéma japonais, que j'ai regardé parce que je ne sais plus quel bouquin sur les arts martiaux en vantait les combats au sabre, a inévitablement vieilli. Les personnages des paysans sont insupportables et le traitement de la femme est affreux. Cependant, l'ensemble passe plutôt bien. Les sept samouraïs sont hyper charismatiques et classes. L'un d'eux est même assez rigolo et original. En outre, ces personnages racontent, en filigrane, une histoire assez tragique sur leur destin de guerriers. J'y ai vu pas mal de parallèles avec Légende de Gemmell, et je comprends très bien que le film ait été adapté en western: l'histoire s'y prête à merveille. En outre, il y a un propos sur la condition des paysans pauvres (je me suis sentie super mal de me gaver de Dragibus pendant la scène des grains de riz 😭😭😭), et un vrai talent pour mettre en scène l'action sur deux plans (avant-plan, arrière-plan) dans une même scène. J'ai tardé autant que je le pouvais à le regarder, car il dure 3 h 18 et que j'ai un mal fou à regarder des films chez moi, et j'ai fini par le regarder l'avant-veille du jour où je devais le rendre à la médiathèque; mais il mérite le détour.
Les Sept Samouraïs est sorti en 1954, soit la même année que Godzilla; quelle grande année pour la société de production, la Tōhō, et pour le cinéma japonais en général!

Leila et ses frères de Saeed Roustaee (2022)

Recommandé par Tigger Lilly sous mon billet sur Iran Awakening de Shirin Ebadi, ce film iranien met en scène une famille en galère: quatre frères qui n'ont pas un rond, une sœur qui se démène, un père qui ne pense qu'à obtenir le respect de son cousin, une mère qui geint tout le temps. À l'occasion d'un projet d'achat pour monter un commerce où travailleraient les quatre frères, la situation va progressivement imploser. C'était super, très humain, avec des personnages pleins de failles, et une vision poignante de la pauvreté. Merci pour la découverte! Par contre, je n'ai pas bien compris la fin. Lol.
L'avis de Tigger Lilly.

Sur grand écran

Avatar 2: La Voie de l'Eau de James Cameron (2022)

 🕷️🥹💕

Ma liste de critiques à l'encontre de ce film est longue comme le bras. Et pourtant... J'ADORE AVATAR 2. Je l'adore autant que le premier, de manière intégrale et inconditionnelle, défauts compris. Je le VIS de la première à la dernière image et je me reprends à chaque fois un choc esthétique d'ampleur. Avatar, c'est le dernier choc esthétique majeur de ma vie, le seul film qui a tout bouleversé alors que j'étais déjà une adulte, et le 2 a réussi à encore plus tout bouleverser. 
Je l'ai vu deux fois, à six jours d'intervalle, étant donné qu'il n'était diffusé qu'une semaine, et je ne me suis pas ennuyée une seconde la deuxième fois. Au contraire, je l'ai encore plus aimé. J'adore tous ces personnages que je me réjouis de retrouver et de voir grandir; je trouve plusieurs scènes extrêmement puissantes; j'ai pleuré d'émotion devant la beauté pure du récif; Payakan est le meilleur ami que je me sois fait au cinéma depuis qui sait quand; Spider est plus que jamais mon personnage préféré; je me réjouis de voir toutes ces pistes suivre leur cours dans le 3 qui arrive bientôt. Et à en croire le bref extrait diffusé à la fin du 2, le 3 va encore nous en mettre plein la vue. J'ai déjà une liste de critiques envers cet extrait à lui tout seul, mais je sens que je vais adorer de manière intégrale et inconditionnelle. 🥹🥹

Et le reste

Suite à l'achat d'un parfum, j'ai reçu le numéro automne-hiver de la revue du parfumeur Fragonard, que j'ai lu avec grand plaisir. Bien que le style vestimentaire et l'esthétique de Fragonard ne soient pas les miens, je trouve leur univers très élégant et alléchant, et la revue est exactement comme je les aime, sobre et qualiteuse à la fois. J'adorerais avoir l'opportunité de travailler sur ce genre de support dont on peut être fier. Dans la foulée, j'ai commencé à écouter leur podcast, À fleur de nez. Une merveille, là aussi.

J'ai également lu le hors-série de Mad Movies sur les adaptations télé et ciné de Lovecraft. Passionnant, comme toujours. J'aimerais tellement avoir le temps, l'énergie et l'organisation de regarder tout ce que ces journalistes regardent. Même si, bon, tout n'est visiblement pas quali dans les lovecrafteries, lol. (Ça vous étonne? 🤣) Et j'aimerais, bien sûr, avoir le temps, l'énergie et l'organisation de replonger dans Lovecraft.

En fin de mois, j'ai lu mon Cheval Magazine habituel (au sommaire de ce numéro: beaucoup de shopping pour préparer Equita Lyon, du tourisme dans le Dauphiné, les directionnels en cross, et des interviews), puis j'ai filé, justement, à Equita Lyon, le rendez-vous annuel qui donne quand même très envie de flinguer son épargne pour profiter de la vie en montant beaucoup durant deux ou trois ans, quitte à mettre fin à son existence de souffrance après, parce qu'on n'aura plus un rond pour affronter l'avenir. ❤️❤️

dimanche 2 novembre 2025

L'Inversion de Polyphème (1997)

Chronique express!

Un livre qui évoque la banlieue parisienne, c'est quand même rare, et c'est pour cela que j'ai emprunté L'Inversion de Polyphème de Serge Lehman à Vert! Bon, l'histoire se passe pendant les années soixante-dix, donc vingt ans avant mon propre vécu de la banlieue, et ne tourne pas du tout autour du fait qu'on est en banlieue, donc ne faites pas comme moi si vous êtes affamé de lectures banlieusardes. 🤣🤣 Néanmoins, je me suis bizarrement retrouvée dedans, car c'est l'histoire de quatre ados d'avant l'ordinateur, qui lisent des livres papier et qui se déplacent à pied et en vélo. Moi, je ne suis pas une vraie ado d'avant l'ordinateur, car tous mes amis en avaient un; mais comme mes parent n'en voulaient pas, j'ai vécu sans jusqu'à relativement tard par rapport à mon milieu social, et j'ai un peu fait les mêmes choses qu'eux.

Concrètement, on a donc quatre ados qui, un été, sont confrontés à un phénomène étrange. L'atmosphère est bien croquée et les personnages sont bien caractérisés, et j'ai donc apprécié; mais je dois dire que la partie science-fictive ne m'a pas beaucoup intéressée et que je n'ai même pas vraiment compris de quoi il en retournait. J'ai beaucoup de mal à piger les descriptions de trucs très différents de notre réalité, et c'est tout à fait ça ici. Heureusement, toutefois, que [divulgâcheur] j'ai lu Flatland de Edwin A. Abbott, ça m'a bien aidée à comprendre pourquoi je ne comprenais pas! 🤩 [fin du divulgâcheur] Donc voilà, une lecture sympathique, mais pas très marquante en fin de compte.

Comme toujours, la couverture de cet ouvrage de la collection Une Heure-lumière du Bélial est à créditer au talentueux Aurélien Police.

Allez donc voir ailleurs si ce Polyphème est inversé!
L'avis de Vert

mardi 28 octobre 2025

Tech Noir. The Art of James Cameron (2021)

L'an dernier, la Cinémathèque a organisé une exposition sur l'art de James Cameron. Pas juste son travail de réalisateur, mais tout ce qu'il a créé en dehors du cinéma et en soutien du cinéma: dessins, peintures, affiches, bandes dessinées, storyboards. J'en suis sortie enchantée, émerveillée, émue et hystérique, et j'ai demandé le livre qui l'accompagne en cadeau de Noël.

Sans surprise, j'ai lu le livre en étant enchantée, émerveillée, émue et hystérique. 😊

Début octobre, Avatar 2 est ressorti au cinéma durant une semaine, je suis allée le voir deux fois et j'ai commencé cette lecture dans la foulée, donc j'ai pensé James Cameron à peu près vingt heures sur vingt-quatre tout le mois d'octobre. Ce gars est tout simplement hallucinant. Même si on lui attribue un "talent" naturel pour le dessin, le fait qu'il ait réussi à se consacrer à son art et à maîtriser plusieurs techniques (stylo, crayon, peinture), puis à en faire son métier en dessinant des affiches pour le cinéma, puis à le mettre au service de sa carrière de réa, est juste dingo. Et rien ne prouve qu'il ait plus de "talent" qu'un autre, en plus; peut-être que beaucoup d'enfants intéressés par le dessin peuvent atteindre la même maîtrise s'ils y consacrent le temps nécessaire. Le débat entre inné et acquis me semble insoluble. Dans le cas présent, je pense qu'il y a des deux: le gars est hors de l'ordinaire ET il a fourni les efforts nécessaires.

Par ailleurs, j'aime tout ce que Cameron dit de l'humanité et tout ce qu'il rêve dans d'autres mondes, même la manière amusée dont il commente les dessins de filles sexys de son adolescence (quand il avait des "niveaux toxiques de testostérone"). Chaque image reproduite est accompagnée d'un commentaire de sa part, dans lequel il remet en contexte ce qu'il faisait à l'époque et ce qu'il a fait avec cette image en particulier, ce qui est, évidemment, super intéressant.

Franchement, le seul défaut que je pourrais trouver à cet ouvrage, qui est, par-dessus le marché, hyper agréable dans sa réalisation (papier, qualité des images), c'est la propension de Cameron à affirmer qu'il a envoyé balader telle ou telle personne qui remettait en question ses choix artistiques, et ce dès les cours de dessin de sa jeunesse. Je me demande si c'est vraiment 100% vrai ou s'il idéalise un peu pour se donner le rôle du gars intègre. Et si c'est vrai, ça lui donne quand même un assez gros égo, ce que je ne trouve pas fantastique, en soi. D'un autre côté, le gars est un putain de génie; s'il a un gros égo, c'est au moins un égo qui repose sur quelque chose. 😂😂

jeudi 23 octobre 2025

La Maison Tellier (1881)

Lorsque j'ai lu Toine et La Petite Roque, plus tôt cette année, je me suis penchée sur la bibliographie de Guy de Maupassant pour faire le point sur ce que j'avais déjà et ce qui me manquait, et je me suis rendu compte que je ne possédais pas le recueil La Maison Tellier. Ou, pour être exacte: j'avais un recueil de ce nom, mais il ne contenait pas l'intégralité des textes du recueil d'origine, tandis qu'il contenait d'autres textes qui n'en faisaient pas partie. 😱😱 J'ai fait une attaque. Puis, j'ai fait du tri, j'ai évacué deux ou trois recueils montés par des éditeurs modernes et j'ai racheté une édition correspondant à La Maison Tellier d'origine.

Et donc voilà, c'est parti pour quelques dizaines de pages en compagnie du grand Guy! La majorité des nouvelles avaient été publiées dans la presse avant la parution en recueil, tandis que trois étaient inédites.

La Maison Tellier (inédit)
Ce texte, qui donne son nom au recueil, est assez plaisant et rigolo. On est en Normandie, dans une petite ville, et la Maison Tellier, qui est une maison close, est fréquentée par des hommes très bien. Mais un soir, gros désarroi: la Maison Tellier est fermée "pour cause de première communion". Derrière le ton léger, Maupassant parle en fait de tas de choses malheureuses: l'exploitation des femmes, l'hypocrisie sociale, les destins brisés. Il y a une scène super triste dans l'église. Je l'avais forcément déjà lu, mais je n'en gardais aucun souvenir.

Sur l'eau (1876)
Grand classique de Maupassant, ce texte fait partie de ceux que j'ai lus en quatrième et qui ont marqué mon parcours de lectrice. J'y ai redécouvert, et conscientisé, le mot "épouvante". Il est magnifique et hyper efficace.

Histoire d'une fille de ferme (1881)
Une histoire désespérante sur la condition féminine. Vraiment, je pense que Maupassant, en parallèle d'une misogynie crasse, avait bien cerné combien les femmes partaient perdantes dans son monde.

En famille (1881)
Alors, ça, il fallait vraiment être Maupassant pour l'imaginer et surtout pour intituler l'histoire ainsi. 😂😂 Le début est pas mal désespérant à cause du parcours de raté du personnage principal (voir l'extrait ci-dessous), mais ensuite, quand on comprend (et on comprend bien avant lui 👀), ça devient assez drôle.

"C’étaient de grosses dames aux toilettes farces, de ces bourgeoises de banlieue qui remplacent la distinction dont elles manquent par une dignité intempestive ; des messieurs las du bureau, la figure jaunie, la taille tournée, une épaule un peu remontée par les longs travaux courbés sur les tables. Leurs faces inquiètes et tristes disaient encore les soucis domestiques, les incessants besoins d’argent, les anciennes espérances définitivement déçues ; car tous appartenaient à cette armée de pauvres diables râpés qui végètent économiquement dans une chétive maison de plâtre, avec une plate-bande pour jardin, au milieu de cette campagne à dépotoirs qui borde Paris."
Le Papa de Simon (1879)
Un autre texte que j'ai lu en quatrième et qui m'a marquée, quoique de manière très différente. Un bonbon de réconfort dans un monde de brutes. ❤️❤️❤️❤️

Une partie de campagne (1881)
Un autre grand classique de Maupassant, que je n'ai pas lu en quatrième pour le coup, mais que j'ai dû lire dans trois recueils différents au gré de mes trouvailles en bouquinerie. Je redoutais de le relire car je l'avais associé au viol, mais, en fait, ce n'est pas ça. C'est même triste, dans le genre "rencontres avortées". Comme souvent, Maupassant se moque des petits bourgeois de Paris...

Au printemps (inédit)
Un texte incisif et cruel, et surtout bien misogyne! Mais ça se lit avec plaisir.

La Femme de Paul (inédit)
Je crois que c'est la première fois que je rencontre des lesbiennes chez Maupassant. Je n'ai pas de certitude totale, mais le ton m'a semblé plutôt positif envers ces femmes. Le personnage principal, Paul, déteste l'homosexualité et il le dit, mais il m'a semblé que la voix narratrice s'incarnait plutôt dans les propos de sa femme, qui est plus large d'esprit. Bien sûr, tout cela finit remarquablement mal. C'est sympa, les guinguettes en bord de Seine, mais il peut s'y passer bien des drames. 👀

Et voilà, du Maupassant très constant dans sa qualité, comme d'habitude!

samedi 18 octobre 2025

Recours à l'abîme (1936)

Et voilà aujourd'hui le onzième tome de la saga des hommes de bonne volonté de Jules Romains!!

Mon enthousiasme est inchangé. Cette entreprise romanesque est ahurissante et je me régale. Si vous avez déjà lu certains de mes billets précédents, vous savez. Mais ce onzième tome m'a aussi mise très mal à l'aise. Je vous explique pourquoi avec de nombreux divulgâcheurs et ça parle de viol, donc ne lisez pas ce billet si vous comptez vous embarquer dans ce voyage au long cours ou si le sujet vous met mal à l'aise!

Le roman parle beaucoup de George Allory, un écrivain qui essaye d'entrer à l'Académie française. Dans un des tomes précédents, on avait déjà assisté, de loin, à sa première tentative. Ici, on suit, mais de bien plus près, sa deuxième tentative. Sauf que celle-ci se solde par un nouvel échec, et qu'Allory tombe dans une dépression assez sévère, dont il sort grâce à un autre personnage, qui le met en contact avec une sorte de proxénète, Madame Raymond(e). (Je précise que le "e" final du nom de famille de cette femme est entre parenthèses délibérément: certains l'appellent Madame Raymond, d'autres Madame Raymonde, et Allory pense son nom avec des parenthèses autour du "e". 🤣)

Madame Raymond(e) propose à Allory d'assouvir n'importe laquelle de ses envies. Et pas de bol pour nous, l'envie d'Allory est en fait un viol. Alors, Madame Raymond(e) organise une rencontre avec une jeune fille d'assez bonne famille, qui cherche une sorte de protecteur plus riche qu'elle, mais qui ne se doute quand même pas qu'on la livre en pâture à un inconnu. Le viol n'aboutit pas totalement, mais les chapitres durant lesquels Allory déroule son fantasme dans ses notes, puis durant lesquels la rencontre est organisée et a lieu, ont été très lourds pour moi, et j'ai refermé le roman avec un certain dégoût.

En outre, lorsqu'il prend des notes sur son fantasme, Allory écrit dans un cahier qu'il intitule plus ou moins "Notes pour un prochain roman", de manière que sa femme, si elle devait fouiller dans ses affaires, ne se doute pas qu'il s'agit de ses pensées à lui. En d'autres termes, on a un écrivain qui utilise un personnage virtuel comme subterfuge pour assouvir ses envies. De là à se demander si c'est ce qu'est en train de faire Jules Romains... 😱😱😱

Alors, attention, je ne dis pas que le roman est illisible ou à jeter à cause de cet élément.

D'une part, le ton ne cautionne absolument pas le projet d'Allory. Il ne le condamne pas non plus, me direz-vous. Mais ce n'est pas étonnant: la voix narratrice est toujours très proche des pensées des personnages, ce qui est d'ailleurs une des grandes réussites de l'auteur. Il y a déjà eu quelques horreurs dans les tomes précédents, notamment un meurtre, et jamais, me semble-t-il, la voix narratrice n'est venue critiquer, commenter ou valider un comportement; elle "rapportait" ce que pensait et éprouvait le personnage.

D'autre part, Allory, s'il ne se "rattrape" absolument pas, fait tout de même preuve d'une certaine transparence envers sa victime, Michèle, ce qui redonne à celle-ci une certaine... liberté? agentivité? Bon, ça ne dure pas longtemps, et il la prend bien au piège à la fin, mais c'est là. Il aurait pu garder une certaine information primordiale pour lui.

Enfin, le titre du roman, Recours à l'abîme, s'explique probablement par cette chute dans une sexualité crade et interdite, mais aussi par le dernier paragraphe, où Michèle, à son tour, se penche sur un abîme et plonge dedans. Là aussi, sans aucun commentaire extérieur de la voix narratrice. C'est un constat: elle dit "oui". Ce qui irait plutôt dans le sens de "des fois, les gens plongent dans les ténèbres".

Tout ça pour dire que, malgré mon gros malaise et le parallèle envisageable entre l'écrivain Jules Romains et le personnage-écrivain George Allory, je ne suis pas du tout convaincue que Jules Romains ait écrit ces scènes en mode "regardez comme c'est cool de toucher les seins d'une fille qui ne se doute de rien". On pourrait même y voir une critique d'un système qui fait qu'une fille sans ressources financières en est réduite par sa propre mère à trouver un homme plus riche qu'elle à qui vendre ses faveurs...

D'ailleurs, le chapitre intitulé "Quatre femmes" irait plutôt en ce sens: en donnant la parole à Mathilde, qui se rend, elle, à un rendez-vous avec son nouvel amant en sachant ce qu'elle fait, on pourrait presque prendre Jules Romains pour un féministe de notre temps. Elle y va volontairement... Mais en fait pas trop, c'est surtout qu'elle se sent coincée, elle est mal à l'aise avec son corps, elle pense à ses poils qu'elle va devoir épiler plus régulièrement, et à ses habits qui devront toujours être impeccables même là où le tissu est caché, bref elle a une charge mentale affreuse au sujet de son apparence à cause du rapport sexuel à venir! C'est le genre de commentaire qu'on "libère" de nos jours, ça. Sauf que le bouquin a quatre-vingt-dix ans.

Mais bon, tout de même, gros malaise!!!

Pour le reste, on retrouve dans ce tome des personnages et des thèmes récurrents: mes Jallez et Jerphanion adorés, mais peu présents; Margaret-Desideria, qui repart chez elle dans les Balkans et qui, à mon humble avis, aura un rapport avec un célèbre attentat qui aura lieu en 1914; la menace incessante de la guerre, le travail de fond de certains pour l'éviter et les manigances de certains salauds pour qu'elle ait bien lieu; et des tas de personnages qu'on retrouve pour seulement un chapitre, voire seulement quelques lignes, dans un extrait d'une lettre... Tout ceci reste absolument renversant de compléxité!!

Au hasard de mes pérégrinations sur Internet, j'ai découvert que cette édition Bouquins contient un récapitulatif des personnages. Le truc est totalement hallucinant. Il y a d'abord 75 pages de "Fichier des personnages", avec le récap de ce qui arrive à chacun. Puis presque 70 pages d'index listant les chapitres dans lesquels ils apparaissent. Le travail monstre que ça représente!!!! C'est complètement dingo!!!! Je vous mets une photo du début des deux documents, où vous aurez justement quelques infos sur Allory et sur l'Académie française, vu que ça commence par un A. 👀

  

lundi 13 octobre 2025

Écoutez nos défaites (2016)

Aujourd'hui, je vous parle d'un nouveau roman de Laurent Gaudé, auteur que j'ai découvert avec plaisir il y a dix ans, puis laissé de côté et redécouvert l'année dernière. Un grand merci à la consœur qui me l'a prêté après que nous avons vu son tout dernier opus dans la vitrine d'une librairie! 😊

Écoutez nos défaites est un roman polyphonique. À notre époque, il donne la parole à trois personnages: un agent des services secrets français, une archéologue irakienne et un homme dont je pense qu'il vaut mieux ne pas dévoiler l'identité. Dans le passé, il donne la parole à plusieurs grands combattants ou conquérants: Hannibal, Ulysses S. Grant et Hailé Sélassié (le dernier empereur d'Éthiopie – je le précise pour ceux qui, comme moi, n'ont aucune notion d'histoire africaine).

Ce qui les lie, tous: la violence. Soit la violence des missions des services secrets, soit celle des extrémistes en noir qui pillent les sites archéologiques, soit celle des batailles de grande ampleur, entre pays ou empires.

Évacuons tout de suite le souci stylistique qui a un peu terni ma lecture. De manière générale, chaque passage consacré à un personnage se termine sur quelques lignes en crescendo, avec une accélération du rythme et une sorte de souffle de désespoir, par exemple parce que le personnage s'apprête à plonger dans l'horreur du combat ou prend conscience de l'étendue du désastre. C'est très efficace et bien maîtrisé. Sauf que les différentes prises de parole sont assez courtes, de une à trois pages maximum. Du coup, le procédé revient très souvent. Et cela le vide pas mal de sa substance ou du moins de son efficacité. 🫤

Ce problème mis à part, la lecture est passionnante. En partie parce qu'on veut savoir comment va se dérouler la mission dont est chargé l'agent des services secrets français. En partie parce que le récit nous plonge dans des combats à grande échelle, où l'on retient son souffle. En partie parce qu'il m'a, personnellement, fait découvrir pas mal de choses sur la Guerre de Sécession aux États-Unis, la campagne d'Hannibal en Europe et surtout la vie de Hailé Sélassié, qui a essayé de résister à l'envahisseur italien à partir de 1935, a dû s'exiler mais a pu retrouver son trône en 1941.

Bien sûr, comme on parle d'un roman de Laurent Gaudé et que cet écrivain s'intéresse très clairement aux dynamiques de domination à l'œuvre dans le monde et à tout ce que l'humain fait de pire, l'ensemble n'est pas gai. Du sang, des massacres, des hommes qui meurent dans le sable, des hommes qui meurent de faim, des hommes qu'on traque, des alliés qui vous lâchent, des éléphants qui deviennent fous de peur et de douleur, Daesh qui détruit les vestiges antiques, des traumas dont on ne revient jamais – c'est un texte qui crie quelque chose sur l'état du monde, l'éternel recommencement de la violence et la défaite ultime de tout ceci. Même quand on gagne, on a déjà perdu, [divulgâcheur] à l'image d'Agamemnon, qui est prêt à sacrifier sa fille aux dieux pour que ceux-ci envoient le vent qui lui permettra de voguer jusqu'à Troie: même s'il remporte la victoire sur Troie, il a perdu [fin du divulgâcheur].

C'est cela qui donne tout son sens au titre, Écoutez nos défaites. Et pourtant, le roman se termine sur une scène d'apaisement... ☀️

Quand on a déjà lu La Mort du roi Tsongor, avec son siège épique et sanglant, ou Eldorado, avec son récit à deux voix, on ne peut s'empêcher de penser que ce roman s'insère parfaitement dans la production de Laurent Gaudé. Il a vraiment saisi quelque chose et sait l'exprimer avec ses tripes. C'est un écrivain engagé, comme on dit.

mercredi 8 octobre 2025

Les BD du troisième trimestre 2025

Comme d'habitude, retour sur les lectures graphiques du trimestre, qui était placé sous le signe de la lecture jeunesse et des héroïnes intrépides.

Complots à Versailles. 1. À la cour du roi de Carbone et Giulia Adragna, d'après le roman d'Annie Jay (2019)

Une BD jeunesse très plaisante, avec des héroïnes intrépides, de belles robes et une cour pleine d'intrigues. Ça m'a rappelé beaucoup de bons souvenirs de À la poursuite d'Olympe d'Annie Jay, autrice du roman adapté ici (que je n'ai pas lu, lui).
Éditeur: Jungle

Les Héricornes. Tomes 1 à 3: L'appel de la déesse, La digne héritière de Mu et Le silence de Ketys de Kid Toussaint (scénario) et Veronica Alvarez (dessin et couleur) (2024 et 2025)

 

J'vous jure! Mon mec vend une BD sur des filles qui ont des licornes et il faut que je voie les supports de com en boutique pour l'apprendre!! Il ne me dit jamais rien!!
Eh bien, c'était une franche réussite. Univers de fantasy féérico-médiévalisante, jeunes filles très différentes en route pour le temple de la déesse, licornes magiques qui viennent aider leur héritière quand celle-ci les appelle, humour, mignonnerie, méchante sorcière qui manigance dans l'ombre. Trop chouette. Purée, j'aurais TELLEMENT adoré lire ça quand j'étais gamine.
L'histoire n'est pas finie. Vivement le tome 4.
Éditeur: Le Lombard

vendredi 3 octobre 2025

La gamelle de septembre 2025

Comme d'habitude, retour sur les activités du mois écoulé, hors lecture!

Sur petit écran

The Thursday Murder Club de Chris Columbus (2025)

Une petite comédie bien sympathique, avec campagne anglaise de rêve, demeure seigneuriale à la Downton, cadavre, vieux pleins aux as et même quelques lamas. 🦙🦙 Maggie Smith et Angela Lansbury auraient été tellement parfaites dans ce cadre. 💞 Teasing: le plan de Pierce Brosnan dans la piscine dure à peu près une seconde et demie, mais j'en ris encore.

Sur grand écran

Sleepy Hollow de Tim Burton (1999) 🐎🎃🪓⚔️

Halàlà!! Quel chef-d'œuvre!! Quelle perfection!! Comme je comprends que ce film ait été un choc esthétique majeur dans ma vie d'ado!! Comme il représente tout ce que j'aimerais vivre et être!! Comme il représente tout ce que j'aurais aimé écrire et créer, moi!! Et comme il représente le climat automnal que j'a-do-re et que le dérèglement climatique a complètement flingué! 😭
Pour la petite histoire: Sleepy Hollow est le premier film que j'ai vu à cause du cheval, car j'avais entendu la pub à la radio et qu'on entendait le cheval galoper et/ou hennir (et qu'est-ce que j'ai bien fait: tous les plans avec le cheval sont géniaux); c'est le premier film que j'ai vu deux fois au cinéma; et c'est le premier (et l'un des très rares) que j'ai vu au cinéma dans deux pays différents, d'abord en France puis en Italie. Et de ce point de vue, le revoir est assez douloureux, car il représente aujourd'hui une époque révolue, qui n'était certes pas toute rose, mais qui avait de bons côtés et de bonnes personnes, qui sont aujourd'hui sorties de ma vie sans que jamais, à l'époque, je n'aie vraiment réalisé que j'avais de l'or entre les mains... 🥺

Downton Abbey: The Grand Finale de Simon Curtis (2025)

Quelle émotion! C'est juste la famille, cette famille! Ce troisième film est dans la droite ligne des deux premiers et j'ai adoré. Ma seule critique: le fait que le personnage indigne de confiance soit, justement, indigne de confiance est beaucoup trop flagrant. Mais à part ça, que du bonheur, et des larmes à la fin. Cette fois, mon copain m'a demandé non pas un mouchoir, mais deux. 👀

Du côté des séries

Toujours rien.

Et le reste

En fin de mois, j'ai lu mon Cheval Magazine habituel. Hélas, je n'ai pas lu d'autre revue. C'est la troisième fois cette année que je manque le rendez-vous et ça me saoule. Je ne peux qu'espérer que je prendrai et trouverai le temps pour ça le mois prochain. J'ai un Mad Movies sur Lovecraft qui attend... 🐙🐙

dimanche 28 septembre 2025

Les Pouvoirs (1935)

Chronique express!

 

Et voilà le dixième tome de la saga des Hommes de bonne volonté de Jules Romains ❤️‍🔥 Comme je manque de temps au moment d'écrire ce billet (et que j'ai déjà tardé à m'y mettre, ce qui signifie que mes souvenirs s'étiolent), je vais répéter les grandes lignes de ce que je dis à chaque tome: c'était génial, Jules Romains était un génie, tout s'imbrique et s'enchaîne merveilleusement, les pensées des personnages sont super différenciées mais sonnent toutes juste, c'est d'une ambition folle, je me régale... Mais je tremble aussi, car on parle énormément de la menace de la guerre avec l'Allemagne – et parfois, ça résonne un peu trop avec les tensions actuelles avec la Russie.

Trois choses à retenir de ce tome en particulier, toutefois: les doutes de Laulerque sur l'Organisation, l'espèce de vertige relatif au fait qu'il ne sait pas du tout quel en est l'objectif et dans quoi il s'est embarqué au juste; les subtilités et démélés politiques de Gurau dans les différents ministères, et la présence sûre et légèrement drôle de son bras droit Manifassier; et pour finir, une lettre merveilleuse de Jallez à Jerphanion, qui mêle une réflexion aiguisée sur le besoin de sécurité des peuples, sa peur de l'avenir dans lequel il voit venir la guerre et une déclaration d'amitié formidable; puis la réponse de Jerphanion; et enfin leur séjour ensemble, décrit en un chapitre d'à peine une page, mais riche, riche, riche. Comme j'ai le cœur serré en prévoyant que ce souvenir-là leur reviendra quand ils seront à la guerre...

mardi 23 septembre 2025

Quand la fontaine coule dans la vallée (2022) + Treize âges de la vie d'une femme (2024)

Aujourd'hui, petit interlude poétique!

Quand la fontaine coule dans la vallée.
Fables d'ici pour maintenant
(2022)

 

En octobre dernier, François Lavallée, traducteur canadien de passage à Paris, a animé la Matinale de la Société française des traducteurs pour présenter le Wiktionnaire, auquel il a largement contribué, et j'ai eu la chance de gagner un de ses ouvrages. (Il y a toujours un petit cadeau tiré au sort pour les personnes inscrites à l'avance, car l'inscription aide le café qui nous reçoit à s'organiser.) Quelques mois plus tard, j'ai donc lu de la poésie, ce qui ne m'arrive pour ainsi dire jamais.

Ce recueil réunit des poèmes en vers, à la métrique classique (= comme ce qu'on a étudié à l'école si vous êtes de ma génération), mais portés par un regard plus moderne ou malicieux. Voici deux titres pour vous donner une idée: "Le bonhomme de neige amoureux du feu" et "Le bilieux et l'urinoir à l'œil magique". 😂 Le mélange est assez rigolo et le rythme très réussi, à quelques exceptions près – par exemple, j'ai du mal avec les vers faisant soudain un nombre de syllabes très réduit par rapport au reste du poème. Les poèmes étant indépendants les uns des autres, j'ai lu l'ensemble "en picorant", par exemple tard le soir, pour décompresser deux minutes avant de dormir.

Éditeur: Les Presses de l'Université de Montréal

Treize âges de la vie d'une femme (2024)

Ce mois-ci, j'ai lu ce recueil de Marie Rouzin, qui m'a été offert par une amie il y a plus d'un an. Étant donné que le recueil suit un seul personnage et que l'amie en question m'avait prévenue qu'il y aurait des violences sexuelles, je l'avais laissé en attente, dans l'espoir de le lire à un moment où j'aurais du temps pour le lire en deux fois maximum pour ne pas perdre le fil ET où je serais "d'humeur" à me plonger dans des violences sexuelles (pas un jour où l'expérience humaine semble déjà intolérable, par exemple).

Le format est tout à fait différent ici: pas de métrique particulière ou régulière, pas de rimes. Je suppose qu'il s'agit de "vers libres" (mais si vous vous y connaissez en poésie, dites-moi; si ça se trouve, ce n'est pas du tout du vers libre, ni même de la poésie, lol). De base, ce format n'est pas du tout ce que j'aime, mais j'ai tout de suite été entraînée. Il s'en dégage un vrai rythme, quelque chose qui coule tout seul. Je me suis même retrouvée à penser, dans ma tête, mon propre récit de mon enfance ou de mon adolescence sur le même rythme. Chapeau! Je suis très admirative...

Quant au récit de ces treize âges, il est très varié et brasse pas mal de choses: la vision d'une enfant qui pédale sur son vélo, la découverte de la littérature, les différences de classe. Et la violence des hommes, donc. Mon amie a bien fait de m'informer. Il y a plusieurs scènes dérangeantes, du genre que nous avons probablement toutes vécues, et une scène épouvantable, que j'ai lue pratiquement sans respirer. Après, je me suis levée, je suis allée fermée à clé la porte d'entrée, j'ai fermé une fenêtre ouverte et je crois que j'ai même baissé les stores. Et une question revient depuis: "As-tu fermé ta porte?".....

L'ouvrage n'est toutefois pas étouffant, car il se termine sur une parole libérée et le partage avec d'autres femmes. Je ne sais pas dans quelle mesure tout ceci est autobiographique, mais j'espère que, si ça l'est (et le fait que l'éditeur le classe dans la catégorie "Récit" irait en ce sens), Marie Rouzin a effectivement pu trouver cette forme de "soulagement".

"Personne ne peut dire si ce que tu racontes est vrai.
Pourtant, c'est vrai, tu le racontes."
❤️‍🩹

Éditeur: Le Castor Astral

jeudi 18 septembre 2025

Roman de Ronce et d'Épine (2024)

Voilà une très belle découverte que ce roman de Lucie Baratte!

 

Dans un château au cœur d'une mystérieuse forêt naissent deux jumelles, Ronce et Épine. Deux filles on ne peut plus différentes: Ronce se consacre tranquillement à la broderie, comme leur mère, tandis qu'Épine ne rêve que de parcourir les bois pour chasser avec leur père, le seigneur des lieux. Cet univers très inspiré de l'Europe médiévale, qui ne peut cependant pas être associé à une période ou un lieu en particulier, est aussi très magique. Certains oiseaux n'ont pas un comportement tout à fait normal; les messagers peuvent errer des mois sans trouver leur chemin dans la forêt; la légende parle d'un être démoniaque; et il se pourrait bien que les images brodées se mêlent à la réalité.

C'est surtout le style d'écriture de Lucie Baratte qui fait le charme de ce roman que j'ai dévoré. C'est une histoire qu'on nous raconte, avec un rythme et une sonorité hors de l'ordinaire. J'ai bien tiqué sur un terme ou deux (je lis "jouvencelle" et je vois tout de suite des ados boutonneux qui essayent de "faire Moyen Âge" dans un support comique genre Donjon de Naheulbeuk 😅 alors même que je n'ai jamais écouté ou lu Donjon de Naheulbeuk 😅), mais c'est très efficace et poétique dans l'ensemble, et cela crée un univers bizarrement empreint de magie...

... Une magie qui peut protéger, mais aussi défaire, enserrer et envahir, à l'image de la forêt et du végétal. J'ai tendance à penser que pas mal d'auteurs ont exploré la dimension dangereuse du végétal, mais, ici, il y a aussi quelque chose de répugnant et de malsain qui marche très bien. J'ai pensé à Vert-de-Lierre de Louise Le Bars, qui a bien réussi à rendre l'étrangeté de sa créature végétale.

Attention, cependant, le roman parle aussi du corps des femmes et de la maternité, soit par le parcours de Ronce qui va en voir des vertes et des pas mûres, soit par la figure de la mère des deux protagonistes, qui a perdu tous ses bébés après avoir donné vie aux jumelles. Je pense que ça peut perturber certain(e)s.

En fond, la broderie est partout, avec plein de termes techniques qui laissent deviner un univers fascinant, et des dessins symboliques et naïfs ou au contraire sanglants, à à l'image de cette superbe couverture réalisée par Tristan Bonnemain, qui parvient à être à la fois bucolique et tragique.

Également pleine de détails, cette couverture m'a fait penser à celle de Du thé pour les fantômes de Chris Vuklisevic, et un autre parallèle me semble pertinent entre ces deux romans: ils proposent tous deux quelque chose d'unique, une ambiance nouvelle, ou en tout cas que je n'ai, moi, jamais rencontrée ailleurs.

Bref, une belle réussite!

Et pourquoi ce livre, me demandez-vous?
Parce que l'autrice a été reçue dans le podcast Passion médiévistes à l'occasion de la remise du Prix de la Rose d’or Jeunes Amis du musée de Cluny 2025. Une interview super intéressante, qui m'a convaincue d'emprunter le livre sur le champ (car mon super réseau de médiathèques l'avait acheté) (bénis soient les bibliothécaires!).

Éditeur: les Éditions du Typhon.

samedi 13 septembre 2025

La Force des choses (1963)

Après Mémoires d'une jeune fille rangée et La Force de l'âge, j'ai enfin eu et pris le temps de me pencher sur le troisième tome des mémoires de Simone de Beauvoir, La Force des Choses.

Comme pour les deux ouvrages précédents, le texte est extrêmement dense: deux volumes de 375 et 525 pages dans cette édition Folio, soit un total de 900 pages (😅😅). Et des pages pratiquement pleines qui plus est, vu que les paragraphes sont très longs et les chapitres aussi.

En outre – et c'est un élément que j'ai totalement oublié de mentionner dans mes chroniques précédentes –, c'est également dense du point de vue  du name-dropping: dans la mesure où de Beauvoir retrace parfois ses journées avec précision, du type "je déjeunai avec Machin, puis Sartre et moi dinâmes avec Truc et Bidule; le lendemain, Choso nous écrivit qu'il était à Paris et nous retournâmes au même restaurant", il y a énormément de personnages. Certains sont encore connus de nos jours, d'autres ne le sont pas; certains n'étaient probablement pas connus à l'époque mais étaient des amis.

J'attire votre attention sur cette info de février 1949, à une soirée en hommage à Dullin (qui était un metteur en scène, m'informe Wikipédia):

"Salacrou, Jules Romains, firent de brefs discours; un acteur lut celui de Sartre."
TADAM!!! Jules Romains!! Jules Romains fait un discours et il y a Simone de Beauvoir dans l'assistance!!! TADAM!!! ✨✨✨

Bref, hystérie Jules Romainsienne à part, ce n'est pas une lecture facile, et c'est précisément pour cela que je la garde pour mes vacances, lorsque je peux y consacrer un peu plus de temps.

Ce troisième volume commence en 1945, avec la libération de la France et de l'Europe, et va jusqu'en 1962. J'en retiens plusieurs éléments.

L'omniprésence de Jean-Paul Sartre. C'est une évidence, à tel point que son absence dans Mémoires d'une jeune fille rangée m'avait étonnée. De Beauvoir et lui ont vraiment partagé leurs vies, et elle l'adorait. Parfois, cependant, je trouve qu'elle lui laisse trop de place, par exemple quand elle trouve totalement inutile de participer à un évènement parce qu'il y a va, lui, et donc c'est comme si elle y était.

Deux autres amours: Nelson Algren, un écrivain américain, et Claude Lanzmann. Algren a l'air un peu torturé et malheureux, tel que de Beauvoir le décrit; il lui a proposé de l'épouser, mais elle a refusé et il a eu du mal à accepter pleinement le fait que Sartre serait toujours prioritaire. Lanzmann était beaucoup plus jeune que de Beauvoir (il avait dix-sept ans de moins qu'elle) et il lui a apporté une sorte de seconde jeunesse.

L'écriture et le milieu intellectuel. De Beauvoir détaille aussi ses processus d'écriture et ses publications: en 1949, le célébrissime Deuxième Sexe; en 1953, Les Mandarins, qui lui vaut le Goncourt. Je lirai tout ça le moment venu, bien entendu. Quant à son milieu, il est fascinant: parmi les noms que j'ai reconnus, elle a fréquenté Albert Camus, Boris Vian, Françoise Sagan, Gisèle Halimi, et même Han Suyin, l'autrice de Multiple Splendeur que j'ai adoré!!

Les voyages. Comme dans La Force de l'âge, de Beauvoir raconte énormément de voyages: en Italie, en Espagne, au Portugal, en Europe de l'Est, aux États-Unis, à Cuba, au Brésil, en URSS, elle est allée partout! Elle a aussi acheté une voiture, une Aronde. Mais ces voyages, dès le lendemain de la guerre, mettent en relief un autre thème majeur de ce livre...

... Le désenchantement. 1945, c'est l'euphorie de la chute du nazisme et du fascisme et l'espoir d'un avenir meilleur. Mais très vite, il apparaît que les États-Unis arrêteront là pour leur efforts: pour les Portugais et les Espagnols, la vie continuera avec Salazar et Franco. Puis les relations se tendent entre les deux blocs, et l'anticommunisme triomphe aux États-Unis et en Europe occidentale; les idéaux du Comité national de la Résistance se diluent dans l'action des gouvernements français successifs; la droite triomphe; l'Algérie se soulève dans le sang, l'armée française manque de peu de faire un coup d'État, de Gaulle revient, l'OAS fait des attentats partout... En bref, des années pleines de rebondissements, de violences et de tensions, à tel point qu'on pourrait presque relativiser les tensions actuelles autour de Gaza, par exemple. La guerre d'Algérie a eu lieu en Algérie, ok; mais en métropole, on n'était pas loin de la guerre civile.

L'âge qui avance. En parallèle à ce désenchantement quant à l'état du monde et surtout de la France, qui est tout de même contrebalancé par des espoirs à Cuba, au Brésil et en URSS du fait de la déstalinisation, de Beauvoir parle de l'âge qui avance et du temps qui passe et emporte tout. Le corps n'est plus aussi réactif qu'autrefois, les amis meurent, le passé est de plus en plus distant, l'avenir se fait plus étroit. Avec Camus, la brouille est idéologique, car il n'a pas pris parti pour l'indépendance de l'Algérie et surtout n'a pas pris la parole contre les exactions de l'armée française; mais quel passage poignant quand elle parle de sa mort en 1960! Même s'ils ne se voyaient plus, elle regrette l'homme d'autrefois, l'ami d'une autre époque. Quant à l'épilogue, dont j'avais lu des extraits très marquants dans un vieux numéro de la revue Une vie, une œuvre du Monde, il est hautement déprimant, tant pour les critiques qu'on lui a adressées et qu'on adresse à l'identique aux femmes aujourd'hui, que pour cette vision sombre de l'âge. C'est pour toutes ces raisons, je suppose, que ce tome s'appelle La Force des choses, comme si le monde l'avait rattrapée après la période où elle était dans la force de l'âge.

Bref voilà, c'était exigeant, une vraie lecture de longue haleine, mais c'était passionnant; et de Beauvoir était une géante parmi les humains! ✨✨✨

lundi 8 septembre 2025

Il est avantageux d'avoir où aller (2016)

Emmanuel Carrère étant un de mes écrivains contemporains préférés, je continue d'explorer sa bibliographie au gré du hasard et de mes trouvailles en bouquinerie. Aujourd'hui, je me penche sur un recueil de vingt-cinq textes courts, qu'il a publiés dans différents journaux de 1990 à 2015.

La couverture est un tableau d'Emmelene Landon,
artiste à laquelle est d'ailleurs dédié l'un des textes.

En bref, c'était un régal. J'adore comment Carrère écrit, comment il voit le monde, comment il se décrit et s'analyse, comment il fait des sortes de fixettes sur des gens. Je trouve dans ses ouvrages un certain réconfort et une meilleure compréhension de moi-même.

Pour vous en dire tout de même un peu plus, les textes réunis ici abordent toutes sortes de sujets. Le premier, "Trois faits divers", décrit justement trois faits divers, du genre "cette personne en a tué une autre". Le deuxième, "La Roumanie au printemps 1990", nous emmène dans le pays indiqué à l'époque indiquée, dans un certain flottement post-communiste. Plusieurs abordent des livres qui ont marqué l'auteur, et j'ai eu le plaisir de découvrir "Espèce de crétin ! Warren est mort !" qui revient sur sa rencontre avec Lovecraft. Plusieurs nous emmènent en Russie, ce que j'ai évidemment adoré. Un autre nous emmène à Davos en plein Forum mondial, et ça fait exploser le cerveau!

Pour certains, comme "Comment j'ai complètement raté mon interview de Catherine Deneuve" (nan mais ce titre!!!), le sujet était totalement nouveau pour moi dans sa bibliographie. Mais pour beaucoup, j'ai retrouvé ses obsessions habituelles ou le germe de ses livres à venir: "L'affaire Romand" de 1996 qui allait déboucher sur L'Adversaire en 2000, son introduction des nouvelles de Philip K. Dick publiées chez Denoel, qui fait évidemment écho à Je suis vivant et vous êtes morts, "La Mort au Sri Lanka" de 2005 et "Chambre 304, hôtel du Midi" de 2006 qui seront étudiées plus en détail dans D'autres vies que la mienne en 2009, "Le dernier des possédés" qui porte sur un certain Limonov, qui aura son livre en 2011. Et deux textes ouvrent la voie à un film, Retour à Kotelnitch, qui a lui-même ouvert la voie à Un roman russe.

Si vous connaissez un peu l'auteur, c'est donc un régal décuplé – mais je pense que quiconque se régalerait, tant la diversité des sujets permet forcément de trouver quelque chose à son goût et tant la verve de Carrère nous emmène avec une fluidité hors du commun. J'admire tellement cet homme. Il a l'air sérieusement névrosé, en fait, mais, déjà, il arrive à faire quelque chose de ses névroses; et il n'est pas *que* névrosé, il a aussi une analyse fine des gens et des situations, mais avec modestie en même temps; il a un humour qui me fait bien marrer; et il a l'air d'avoir mille idées par jour, davantage que moi en dix ans.

Voici deux extraits de "Une jeunesse soviétique, de Nikolaï Maslov". Le premier parle de Kotelnitch, en Russie; le deuxième du film que Carrère a consacré à cette ville, Retour à Kotelnitch.

"De fait, un séjour dans ce genre de patelin offre, sinon un spectacle car il n'y a rien à voir, du moins une expérience unique en son genre, une sorte de cinq étoiles du dépaysement dépressif."

Un "cinq étoiles du dépaysement dépressif". Si ce n'est pas le sens de la formule, ça.

"Après des mois passés à m'angoisser parce que le film risquait de ne pas se faire, je m'angoisse aujourd'hui parce qu'il semble bien parti pour se faire et je me demande si ce n'est pas pire, en tout cas je suis terrorisé: un lapin pris sur la grande route dans le faisceau des phares d'une voiture."

Putain. L'histoire de ma vie!

Et un extrait de "La Roumanie au printemps 1991" qui devrait plaire à certains lecteurs de ce blog:

"Je ne crois pas être seul à tenir l'écrivain de science-fiction américain Philip K. Dick (1928-1982) pour le Dostoïevski de ce siècle, c'est-à-dire, pour aller très vite, l'homme qui a tout compris." 

Je conclus ce billet comme je conclus les trois quarts de mes billets cette année, tant mes lectures sont enthousiasmantes et je passe mon temps à vous recommander de découvrir l'écrivain dont je parle: en bref, lisez Carrère!

Note de service: je tente, pour ce billet, d'utiliser une taille de police un peu plus grande, car j'ai l'impression, ces derniers temps, que la taille habituelle n'est pas très propice au confort visuel. (C'est peut-être l'approche de la quarantaine qui me frappe de plein fouet, lol!) Si vous remarquez une quelconque différence, en mieux ou en moins bien, dites-moi. D'ailleurs, dites-le-moi aussi si vous ne remarquez aucune différence, lol.

mercredi 3 septembre 2025

La gamelle d'août 2025

Ce mois-ci, c'était kung fu!! 💥💥💥

Sur petit écran

Fist of Fury / La Fureur de vaincre de Lo Wai (1972)

Ce film a horriblement mal vieilli (nan mais ces bruitages!!!), mais il a le mérite de parler de l'occupation de la Chine par les Japonais et Bruce Lee y est impressionnant. À noter également, son personnage perd complètement le contrôle et pousse la violence trop loin; je croyais qu'il avait joué des personnages plus positifs que cela.

The Way of the Dragon / La Fureur du Dragon de Bruce Lee (1972)

Ici aussi, tout a mal vieilli, et cette Rome peuplée exclusivement de sinophones et d'anglophones est assez étrange. Au total, il y a deux mots en italien: un personnage s'exclame "mamma mia". Pour une fois, en revanche, le fait qu'il y ait des Fiat Cinquecento partout n'est pas une image d'Épinal: cette voiture avait réellement un succès fou à l'époque. Bruce Lee est toujours aussi impressionnant, et le film se clôt avec un combat d'anthologie: Bruce Lee contre Chuck Norris. Je vous invite chaleureusement à prendre dix minutes de votre temps pour le regarder, car c'est du grand art ET IL Y A UN CHATON. Oui oui oui, UN CHATON. 😼😼😼 Et les poils de Chuck Norris, aussi. Ça, c'est très étrange. Mais attention, la douleur est montrée clairement et ça peut mettre mal à l'aise.

Fist of Legend / La Nouvelle Fureur de vaincre de Gordon Chan (1994)

Un remake de La Fureur de vaincre, avec Jet Li qui reprend le rôle du personnage de Bruce Lee. Malgré la nette modernisation de la manière de jouer et de filmer, je n'ai pas trouvé l'ensemble bien palpitant. Mais ici aussi, les combats imposent le respect, et le film a le mérite de parler des relations sino-japonaises – d'ailleurs, le fait que je ne parle ni le chinois (plus précisément le cantonais, selon le DVD) ni le japonais, et que j'aie donc besoin d'une certaine attention pour capter qui parle quelle langue, casse un peu certaines scènes.

Fearless / Le Maître d'armes de Ronny Yu (1996)

 

Le plus enthousiasmant des quatre films de kung-fu du mois: le rythme est nettement plus moderne, les acteurs plus sobres, les combats se font à mains nues mais aussi avec plusieurs armes différentes, il y a un peu de sauts et de cascades exagérées qui rendent très bien. Et alors le combat de fin entre Jet Li et Nakamura Shidō, j'ai adoré – et pas uniquement parce que ce dernier acteur est stratosphériquement beau et charismatique.
Pour la petite histoire, c'est en lisant la page Wikipédia de Huo Yuanjia, le personnage réel qu'incarne ici Jet Li, que j'ai percuté que ce personnage est aussi présent dans Fist of Fury / La Fureur de vaincre et donc dans son remake Fist of Legend / La Nouvelle fureur de vaincre: c'est le maître d'arts martiaux qui meurt avant le début du film et dont la mort, suspecte, pousse le personnage de Bruce Lee à mener l'enquête.

Sur grand écran

Le dernier des Mohicans de Michael Mann (1992)

Je rêvais tellement de voir un jour ce film sur grand écran, et le rêve s'est réalisé!! Quelle merveille!! Ce film est la perfection incarnée!! Comme Titanic, il joue sur plusieurs tableaux et réussit avec brio dans tous les domaines: fresque historique de la guerre franco-britannique et de ses implications pour les peuples amérindiens, histoires d'amour tragiques, aventure palpitante, parcours d'autodétermination d'une femme corsetée par son statut. Et le tout porté par une mise en scène léchée à la perfection, des acteurs absolument stratosphériques, et cette musique!!!! Et CETTE FIN, mais CETTE FIN!!!! Mais quelle merveille!!! Quel chef-d'œuvre!!! Et oh, comme je comprends que j'aie été amoureuse d'Uncas quand j'avais seize ans...

Du côté des séries


Toujours rien.

Et le reste

 

J'ai lu Translittérature, la merveilleuse revue de l'Association des traducteurs littéraires de France. Puis, en fin de mois, j'ai lu mon Cheval Magazine habituel.